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Fenêtres sur le passé

1929

Une visite à la manufacture des tabacs de Morlaix

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A travers les ateliers.jpg

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Source : La Dépêche de Brest 30 octobre 1929

 

Voici d'abord les magasins où les ballots et boucauts (vastes tonneaux) sont rangés à l'arrivée,

classés d'après leur origine, et répartis ensuite en vue des besoins de la fabrication.

 

C'est dans cette première section que se font les mélanges des tabacs conformément ii un tableau dressé par le ministère, de façon à ce que le goût moyen du produit reste aussi constant que possible, ou soit amélioré tout en tenant compte des disponibilités du marché et des prix.

 

Les tabacs employés ici comprennent les tabacs exotiques et les tabacs indigènes.

 

Parmi les exotiques, notons le Kentucky, le Ohio, le Burley, le Saint-Domingue, le Brésil, le Manille, etc.

 

Parmi les indigènes, les tabacs du sud-ouest et sud-est de la France en majorité, et quelques tabacs du Nord et de l'Est, entr’autres ceux d'Alsace.

 

Certains tabacs sont mouillés deux fois avant l'époulardage, selon leur friabilité ; les tabacs de Hongrie en particulier ont besoin de ces deux opérations.

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On se sert pour la fabrication de la poudre à priser de tabacs riches en nicotine, gommeux, d'une composition chimique susceptible de lui donner de l'arôme et du montant.

 

Cette fabrication comprend deux séries de fermentation séparées par l'opération du râpage.

 

La première fermentation est une fermentation en masse qui dure 4 mois et demi environ, le tabac étant mis en tas de 65.000 kilos.

La température dans cette masse monte jusqu'à 90 degrés.

 

C'est un travail très dur pour les ouvriers employés à cette préparation ; il règne dans les salles une atmosphère lourde et pénible et ce n'est pas sans étonnement que j'ai vu s'élever d'une masse dans laquelle on piochait, une fumée âcre et vraiment peu agréable à respirer.

 

Cette opération de la fermentation a pour but de réduire le taux de la nicotine au taux voulu, de développer la teneur en acide acétique et de désagréger la matière pour qu'elle puisse se réduire en poudre.

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Vient ensuite le « râpage ».

Le tabac venant de la salle des masses passe dans un moulin appelé râpe, qui consiste en une cuvette et une noix munie de lames dont on règle l'écartement et la pression pour obtenir le grain de dimension voulue.

 

Après un remouillage, le tabac arrive dans des moulins qui sont ici séparés en deux batteries ayant chacune six moulins, un de gros et cinq de fin.

La production horaire pour une batterie est de deux cents kilos.

 

Le tabac sortant du moulin s'appelle le râpé sec.

Il est emmagasiné dans des cases d'où il est prélevé une fois par mois pour entrer dans le cycle de la deuxième fermentation, après un remouillage au taux voulu. (Eau chaude à 60 degrés).

 

La seconde fermentation s'opère en cases de râpé parfait et comprend quatre stades différents de durées égales et consécutives, chaque stade durant de 65 à 70 jours.

 

Pendant le premier stade, on incorpore au râpé du râpé du second stade ; c'est, en somme, un levain venant apporter les ferments voulus et donner la température initiale.

 

Les 2°, 3° et 4° stades consistent en brassages et fermentations à différents degrés.

 

Ces opérations sont faites pour développer la teneur en ammoniaque et en acide acétique, afin d'obtenir le montant de l'arôme exigé par le consommateur.

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Après ces fermentations, le tabac est mis dans des salles de mélanges pour uniformiser le produit et vérifier les fermentations auxiliaires ; il reste dans ces salles un mois, puis il part, enfin terminé, au magasin des produits fabriqués.

 

Pour être livré au consommateur, le tabac à priser est empaqueté actuellement par un appareil dû à un ingénieur mécanicien de cette manufacture, mais qui va être remplacé prochainement par trois machines plus perfectionnées, dont l'une, de marque française, est, paraît-Il, de tout premier ordre.

 

La fabrication du tabac à priser dure 15 mois et demande beaucoup de soins, de vastes locaux qui vont être augmentés incessamment en raison de la production actuelle qui s'élève au chiffre de 650.000 kilos par an...

 

Quand on saura que les manufactures de Châteauroux et de Dijon fabriquent également du tabac à priser, on se demandera avec étonnement combien de nez vont renifler ces milliers de kilos de poudre à priser !

Que d'éternuements en perspective!...

À vos souhaits !

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Quittant M Daniélou qui m'a fait visiter de façon parfaite sa section, j'arrive à celle des tabacs à chiquer.

 

Dans la catégorie des tabacs à chiquer, la manufacture fabrique trois produits différents :

1° Le menu-filé, qui est vendu par bobines de 50 et 100 grammes ;

2° Le rôle ordinaire, par 500 grammes et 1 kilo ;

3° La carotte, par paquets de 2 k. 100 à 2 k. 200.

 

Les tabacs qui sont employés pour ces produits doivent être riches en nicotine, gommeux et résistante.

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Il est vraiment intéressant et ingénieux le rouet qui, par enroulement et par torsion, sert au filage du menu-filé.

 

Ce menu-filé, qui est la chique des chiqueurs délicats, la chique chic !... est fabriqué avec des feuilles de tabac corse, saines et intactes.

 

Ces feuilles sont mouillées avec un jus nicotineux salé et essorées pour enlever l'excédent de jus, uniformiser la mouillade par appareil centrifuge et faire pénétrer le jus dans le tissu.

 

Le menu-filé subit aussi l'opération de l'écôdage, qui consiste à enlever la côde principale pour séparer la feuille en deux parties appelées robes.

Les feuilles impropres servent à la fabrication de produits inférieurs.

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Dans le menu-filé, il n'y a qu'une enveloppe, une feuille enroulée sur elle-même.

Chaque rouet file environ quarante kilos par jour de menu-filé qui a 6 millimètres à 6 millimètres 5 de diamètre.

Du rouet, le menu-filé passe au rolage, simple appareil à bobiner, puis après un retrempage dans un second jus nicotineux salé pour lui donner la teneur finale et nécessaire en nicotine, il est pressé pour perdre l'excédent de ce jus, puis ficelé et mis en chapelets, ayant l'aspect de gras et noirs boudins.

La manufacture fabrique 25.000 kilos de menu-filé par an.

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Le rôle ordinaire subit les mêmes opérations que le menu-filé, plus une humidification préalable à l'étuve des tabacs pour robes ct l'adjonction du travail des intérieurs.

 

En effet, outre la couverture, ou robe, le rôle ordinaire comprend des intérieurs de tabac en feuilles également mouillées au jus nicotineux salé et écôdés partiellement.

 

On fabrique ici 200.000 kilos de rôle ordinaire par an.

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La carotte est de beaucoup le plus répandu et le plus commun des tabacs à chiquer.

Elle est consommée partout, mais surtout en Bretagne, principalement dans les ports, et en Auvergne.

 

La carotte subit toutes les opérations du rôle ordinaire pour arriver à former le gâteau, autrement dit le tabac enroulé sur la bobine.

Le gâteau est alors débité en brins de 55 centimètres assemblés par huit par l'opération du lisiérage, soumis à deux pressions et mis en dépôt de fermentation pendant 5 semaines.

Après cette première fermentation, la carotte est remise dans le jus pour avoir plus de compacité, pressée de nouveau deux fois et relisiérée.

 

Une nouvelle fermentation de 5 semaines, puis le paquet de 8 carottes est ficelé, tel qu'il est livré dans le commerce, et ébarbé pour présenter des bouts réguliers et sans barbures.

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Chiqueurs, savez-vous qu'il faut deux mois et demi pour mettre au point votre chique juteuse et savoureuse,

qui ne sort de la manufacture qu'après un mois de dépôt pour que vous ayez bon poids de votre gâteau favori ?

 

On fabrique ici 720.000 kilos de tabac en carotte par an.

 

Chiqueurs, vous avez de la carotte sur la planche.

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