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Chroniques d'un monde paysan à jamais disparu
Louis Conq de Tréouergat raconte ...
 

Source : "Les échos du vallon sourd" de Louis Conq - Brud Nevez

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Remerciements à Lucien Conq

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Temps de guerre à Tréouergat

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C’est ainsi que devaient faire les citadins pour avoir à manger quelque chose de plus que la soupe aux rutabagas, et les ruraux, tout spécialement les jeunes, pour se vêtir.

Des parents brestois venaient chez nous chercher le morceau de beurre de la semaine ; en échange, l'un d'eux offrit à notre père une petite pompe Japy.

Dorénavant il nous fut un peu plus aisé de « tirer » l'eau de notre puits pour abreuver les gens et les bêtes.

 

Pour nous éclairer, nous avions une lampe à carbure, mais encore fallait-il se procurer le combustible.

D’où venait- il ?

Probablement de l'un ou l’autre coin de l’Arsenal, grâce encore à un troc de nourriture.

 

Au cours de l'été 41, Jean Poull organisa, dans le bois du Klik, un camp de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne.

II réussit à faire venir à Tréouergat, pour trois ou quatre jours, en secret évidemment, une trentaine de jeunes Brestois.

Notre père leur prêta la grange pour dormir sur une bonne couche de paille fraîche.

De plus, il leur vendit un veau, « clandestin », bien entendu !

Un de moins pour les occupants.

En un tournemain, il fut abattu, saigné et pendu à une grande échelle dans la grange par deux apprentis bouchers de l'équipe de Jean.

Ensuite il fut partagé de façon à ce que chacun puisse en rapporter un petit morceau dans sa famille.

Quant au reste, il corsa les menus des repas accompagnés de beaucoup de patates, de quelques boules de pain un peu plus blanc que celui de la ville, et même d'une « lichette » de beurre à étaler dessus.

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Ah! Quelles furent belles et bonnes, ces journées pour ces gars, venus pour la plupart à pied de Brest, par petits groupes, certains sur un vélo "boyauté", selon notre jargon, avec des morceaux de tuyaux d'arrosage, et beaucoup d'ingéniosité.

Ils avaient barré la petite rivière courant au bas du Klik dans nos prairies, mais c'était à peine suffisant pour faire un bon brin de toilette.

Le dimanche soir, rendez-vous était donné à toute la jeunesse de Tréouergat à l'école de Pont-ar-Bleiz où Jean organisait un genre de veillée « Fest-Noz » : une fête du soir avec des chants, des sketches, des jeux.

Qui ne se souvient pas de la recherche de la « puce » à Madeleine, la jeune sœur de Jean, qui devait se trouver ces jours-là chez les cousins à Keroël ?

 

Beaucoup de ces gars-là, par la suite, firent du bon travail dans le syndicalisme ouvrier, et même tout de suite dans la Résistance qui accrochait à présent de divers côtés.

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