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Fenêtres sur le passé
1895
Double évasion à la prison de Landerneau
Source : La Dépêche de Brest 8 janvier 1895
Une double évasion a eu lieu hier, à la maison centrale de Landerneau.
Deux détenus, les nommés Dubost et Lidoire, ont escaladé le mur de la prison et pris la clef des champs.
Dubost et Lidoire étaient employés à la boulangerie.
Vers 7 h. 1/2 du matin, ils étaient occupés au premier étage d'un local situé en dehors du chemin de ronde et qui donne sur la rue de Plouédern.
À l'aide d'une échelle de couvreur, qu'ils ont prise on ne sait où, ils ont gagné le toit par une fenêtre qui donne sur la cour de la prison ; puis, avec une corde qu'ils ont attachée au tuyau d'une cheminée, ils sont descendus dans la rue.
C'est vers 7 h. 45 qu'on s'est aperçu de leur disparition.
L'alarme a été aussitôt donnée.
Pendant que les vingt hommes du poste du 19e, de garde à la porte de la prison, se livraient, baïonnette au canon, avec les gardiens, à de minutieuses investigations dans tous les coins et les recoins de la maison centrale,
où on supposait que les détenus avaient, pu se cacher, le directeur, M. Gramacci,
faisait prévenir le maréchal des logis Reaux, commandant la gendarmerie de Landerneau qui télégraphia aussitôt
le signalement des deux fugitifs à toutes les brigades limitrophes.
Les recherches faites dans l'intérieur de la Prison étant restées infructueuses, deux patrouilles de la compagnie du 19e
qui est caserné dans la maison centrale, et composées chacune de dix hommes, ont été lancées en ville.
De leur côté, les deux brigades de gendarmerie de Landerneau,
l'une l'autre à cheval, se mettaient en route et faisaient une battue dans les communes de Saint-Thonan, de Plouédern,
de Plounéventer, de Saint Derrien, de Saint-Divy, de Lanneufret,
de la Roche, de Pencran et de Trémaouézan, soit un rayon d'environ cent kilomètres.
Dès la réception à Brest du télégramme annonçant l'évasion, les trois brigades de Brest en faisaient autant.
Toutes ces recherches n'avaient, hier soir, donné aucun résultat.
À neuf heures, quand nous avons quitté Landerneau, aucun télégramme annonçant l'arrestation des fugitifs n'était parvenu à la maison centrale.
Aucun renseignement précis, de nature à mettre la gendarmerie sur la piste des évadés, n'a non plus été recueilli.
Un jeune homme, nous dit-on, les aurait vus du côté de la Roche-Maurice, à trois ou quatre kilomètres de Landerneau.
On les aurait également vus à quelques kilomètres de Landivisiau, où ils auraient arrêté un char à bancs,
dans lequel se trouvaient deux cultivateurs.
L'approche de plusieurs personnes les aurait mis en fuite.
Les deux fugitifs sont deux dangereux repris de justice, condamnés à la relégation,
et qui attendaient à Landerneau leur départ pour la Nouvelle Calédonie.
Le premier, Dubost (Claudius), est né le 1 octobre 1863 à la Chapelle-de-Guenchay-Mâcon (Saône-et-Loire), cordonnier, sans domicile fixe.
Le second, Lidoire (Jacques), est né le 25 mars 1855 à Libourne (Gironde) , marchand-ambulant, également sans domicile fixe.
Dubost porte sur l'avant-bras l'inscription « 19e arrondissement » et une tête de souteneur en casquette avec le mot « Loulou » ; entre le pouce et l'index droit, un cœur.
Il a plusieurs cicatrices, dont une horizontale de deux centimètres
sur la bosse frontale gauche et une circulaire sous le menton.
La tête est ronde, le visage long et ovale, la bouche moyenne,
le menton rond et relevé, le cou long et moyen.
Lidoire est également tatoué.
Il a sur l'avant-bras droit un zouave et porte plusieurs cicatrices.
En outre, le lobe de son oreille gauche est déchiré.
Son visage est large et ovale, la bouche grande.
La nouvelle de cette double évasion a naturellement produit une assez vive émotion à Landerneau
et dans les environs.
Source : La Dépêche de Brest 9 janvier 1895
Lidoire, l'un des deux détenus évadés de la maison centrale de Landerneau, a été arrête avant-hier soir,
entre La Martyre et Ploudiry.
Vers six heures, Lidoire et Dubost longeaient le plus paisiblement du monde la grande route,
derrière une voiture chargée de son, quand l'instituteur de La Martyre les aperçut.
Il courut aussitôt prévenir le gendarme Gerbier, resté seul à la caserne par suite de la mort de sa fille,
une jeune enfant, tuée par le croup.
Le gendarme Gerbier, faisant trêve à sa douleur et n'écoutant
que son devoir, se mit immédiatement à la poursuite des fugitifs.
Il ne tarda pas à les rejoindre, mais dès que ceux-ci l'aperçurent,
ils prirent la fuite à toutes jambes.
Le gendarme Gerbier parvint néanmoins, après un parcours de
800 mètres environ, à rejoindre Lidoire, qu'il écroua à la chambre
de sûreté de la caserne.
Quant à Dubost, il continua sa course, se dirigeant, suppose-t-on, vers Landivisiau.
Dès hier matin, six heures, les brigades de Brest, de Landerneau, de Daoulas, de Sizun, de Lesneven, de Lannilis,
de Plabennec, de Lambézellec et de Landivisiau étaient prévenues télégraphiquement de l'arrestation de Lidoire
par le télégramme suivant :
« Lidoire, évadé de la maison centrale de Landerneau, arrêté par brigade de La Martyre.
Dubost, en fuite, pris direction de Landivisiau »
Immédiatement, toutes ces brigades se sont mises de nouveau en route et ont pris la direction de Landivisiau,
où Dubost ne peut tarder à être cerné.
Lidoire a raconté aux gendarmes que dès son évasion de la maison centrale de Landerneau avec Dubost,
tous deux étaient venus se cacher dans un bois situé non loin de La Martyre,
d’où ils ne sont sortis qu'à la chute du jour c'est à-dire peu de temps avant son arrestation.
Leur intention était de voyager toute la nuit, « mais je n'ai pas eu de veine, dit-il.
Au moment même où je quitte les champs pour aller sur la grande route, je me fais pincer. »
Lidoire a aussi reconnu que, depuis longtemps déjà, Dubost et lui avaient arrêté leur plan d'évasion.
« Nous ne serions pas restés en France, a-t-il ajouté.
Notre intention n'était pas non plus de faire de mal à personne. »
Lidoire, qui avait été écroué à la chambre de sûreté de la caserne de gendarmerie de La Martyre,
a tenté de nouveau de s'évader hier matin.
Pendant qu'on enterrait la fille du gendarme Gerbier, la caserne était déserte.
Lidoire, qui avait sans doute appris ce détail, essaya d'enfoncer la porte, dont il avait déjà démoli le cadre,
quand une petite fille, entendant le bruit, vint prévenir le brigadier et un gendarme de Landerneau qui,
à ce moment, passaient sur la route faisant des recherches pour retrouver Dubost.
Il était temps que ceux-ci arrivassent, car la porte avait déjà cédé sous la pression et, deux minutes plus tard,
le prisonnier s'évadait pour la seconde fois.
Lidoire a été aussitôt écroué dans un autre local de la caserne,
d'où il était extrait, à 2 h. 3/4, pour être ramené à Landerneau.
Solidement menotté, Lidoire a pris place dans un char à bancs requis par le maire de Ploudiry.
Il avait à côté de lui le maréchal des logis Reaux
et un gendarme de Landerneau.
À quatre heures moins dix, le char à bancs s'arrêtait à la porte de la maison centrale de Landerneau
dans la rue de Plouédern, où quelques curieux stationnaient.
Aux devantures et aux fenêtres des maisons voisines, quelques curieux également.
Lidoire, que nous avons pu voir arriver dans le char à bancs, avait l'air transi et appréhendait vivement sa réintégration à la maison centrale, où il compte attraper de soixante à quatre-vingt-dix jours de cellule, au pain sec et à l'eau.
Il semblait aussi regretter sa tentative d'évasion.
Dès son arrivée, il a été conduit devant M. Gramacci, directeur de la maison centrale,
qui lui a fait subir un assez long interrogatoire.
Lidoire qui, ainsi que nous l'avons dit hier, est né à Libourne le 25 mars 1855,
exerçait la profession de marchand ambulant.
Il purgeait à la maison centrale de Landerneau une condamnation à six ans de prison,
prononcée contre lui pour vol à la tire.
Cette peine ne doit expirer qu'en 1898.
Il sera ensuite dirigé sur lu Nouvelle-Calédonie pour y être relégué.
Dubost purgeait, lui, une condamnation à cinq ans de prison,
pour vols qualifiés, qui doit expirer cette année.
Selon toutes probabilités,
Dubost ne tardera pas à être arrêté à son tour.
Source : La Dépêche de Brest 10 janvier 1895
Ainsi que nous le faisions prévoir, Dubost, le deuxième évadé de la maison centrale de Landerneau,
a été arrêté à son tour.
Avant-hier, vers deux heures de l'après-midi, Dubost se trouvait au village de Robien, dans la commune de Hanvec.
Il s'est arrêté chez un cultivateur du nom de Manach, chez qui il a bu et mangé,
se donnant comme « un Parisien égaré dans la montagne ».
Le fugitif ne payait cependant pas de mine.
Les espadrilles qu'il avait aux pieds en quittant la prison tombaient en lambeaux.
Manach lui a donné un chapeau de paysan et une paire de sabots et il a continué sa route.
Deux heures plus tard, les gendarmes Gouriou, Landeau
et Oliviéro, de la brigade de Landerneau, étaient sur la piste
de Dubost, mais cette piste dut être abandonnée.
On brûlait cependant et, hier matin,
quatre autres gendarmes quittaient Landerneau
par le premier train pour descendre à Hanvec.
Enfin, dans l'après-midi, le télégramme suivant arrivait à Brest :
« Dubost arrêté par brigade de Sizun. »
C'est la fin de l'odyssée des deux évades.
Réintégrés à la maison d'arrêt, les mesures de rigueur dont ils vont être forcément l'objet leur feront amèrement regretter leur tentative avortée.
Lidoire Jacques
Embarqué pour la Guyane
le 15 mars 1899
Sur le Transport « la Calédonie »
Évadé le 10 avril 1899
Réintégré le 1 août 1899
Évadé le 18 septembre 1899
Réintégré le 15 novembre 1899
Évadé le 20 août 1900
Réintégré le 5 février 1904
Évadé le 1 juillet 1904
Réintégré le 20 juillet 1904
Évadé le 10 septembre 1904
Jamais réintégré
Dubost Claudius
Embarqué pour la Guyane
le 15 mars 1899
Sur le Transport « la Calédonie »
Évadé le 20 septembre 1899
Réintégré le 21 septembre 1899
Évadé le 7 décembre 1899
Réintégré le 12 décembre 1899
Décédé le 26 janvier 1901