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Soldats et Marins de Plouguin Morts pour la France
Noms de S - Saliou à T - Treut

Saliou François Marie
Né le 1 Mars 1896 à Plouguin
Loc Majan
Classe 1916 Matricule 2532
Incorporé le 8 Avril 1915
71e Régiment d'Infanterie
Soldat de 2ème classe
Réformé temporairement le 24 Avril 1915
Faiblesse
Maintenu Réformé Temporaire
le 16 Septembre 1915
Classé Service Armé le 21 Mars 1916
Incorporé le26 Avril 1916
71e Régiment d'Infanterie
96e Régiment d'Infanterie
le 1 Septembre 1916
Tué à l'ennemi
Le 1 Avril 1917*
Mort-Homme (Meuse)*
* selon Mémoire des Hommes
ou
Le 17 Mars 1917*
sur le territoire de Champien (Somme)*
*selon Registre Matricule
Inhumé au cimetière Nord Ouest
de Fromereville (Meuse) Rangée 27
Mort pour la France
Monument aux morts de Plouguin
Cité dans l'Historique du 96e RI
comme mort au combat
Historique 96e Régiment d'Infanterie
Cote 304. Avocourt
Après plusieurs étapes, le Régiment, commandé par le colonel BIGEARD, s’installe dans les baraques du camp Davoust, près de Nixeville, pour quatre jours de repos.
Le froid est devenu si vif que les hommes luttent jour et nuit contre l’engourdissement.
Le thermomètre descend à 22 au-dessous de zéro le 4 février.
Ce même jour, un magistral coup de main, exécuté par un « Stosstruppen » de la garde prussienne, au sommet de la cote 304,
anéantit complètement le bataillon chargé de la défense de cette célèbre colline.
Le 96e , mandé aussitôt, accourt et occupe le secteur mouvementé (2e et 1er bataillon).
Le 3e bataillon est détaché au réduit d’Avocourt.
La température est si basse que le pain et le vin sont gelés.
Des arbres éclatent comme frappés par la foudre, le sol se transforme en glace sur une profondeur de 40 centimètres.
Malgré les intempéries, les C.M.1 et C.M.2 restent vingt-cinq jours en première ligne et poursuivent, au milieu des plus grandes difficultés, l’organisation de la défense par mitrailleuses.
Dans les derniers jours de février, un nouveau glissement vers l’Est amène le Régiment sur les pentes sud du Mort-Homme,
dont les deux sommets sont, pour l’ennemi, des observatoires de premier ordre.
Le secteur, au nom sinistre, est à peine habitable et le dégel transforme en ruisseaux de boue les tranchées ruinées
où toute circulation est impossible de jour.
Deux mois après, grâce au travail méthodique de nos pionniers, aidés par quelques sapeurs du génie,
nos corvées circulent à toute heure sans pertes appréciables.
Le colonel BIGEARD s’est dépensé sans compter et ne peut résister aux fatigues de la mauvaise saison.
Il quitte à regret le 96e qu’il aimait tant et dont il avait si rapidement conquis l’estime et l’affection.
C’est à son successeur, le lieutenant-colonel CARE que reviendra, trois mois plus tard, l’honneur de conduire le Régiment
à son plus glorieux exploit sur ce même massif du Mort-Homme que nos soldats équipent sans relâche.
L’ennemi manifeste une certaine inquiétude et lance quelques Stosstruppen dans nos lignes.
Leurs tentatives des 18, 28 et 31 mars et 9 juin sont victorieusement repoussées malgré une véritable débauche de « Minens » et d’obus.



Saliou Paul
Né le 28 Décembre 1895 à Plouguin
Kervonen Vian
Classe 1915 Matricule 630
Incorporé le 15 Décembre 1914
118e Régiment d'Infanterie
151e Régiment d'Infanterie
le 11 Juin 1915
264e Régiment d'Infanterie
le 18 Juin 1915
Tué à l'ennemi le 5 Août 1915
blessures de guerre
sur la route de Tracy-le-Mont Quennevières (Oise)
Mort pour la France
Monument aux morts de Plouguin
Inscrit au tableau spécial
de la Médaille Militaire à titre posthume
"Soldat courageux et dévoué.
Mort glorieusement pour la France le 5 Août 1915
à son poste de combat
devant la ferme de Quennevières"
Croix de guerre avec étoile de bronze
Historique du 264e Régiment d'Infanterie
Lithographie militaire
P. Demange – Angers – 1920
Quennevières - Tracy-le-Mont - Tracy-le-Val.
Le régiment vient de s'imposer de lourds sacrifices et ses pertes sont sévères.
Plus de 300 braves ont payé de leur vie l'issue glorieuse de ces deux rudes journées.
Ses unités ont besoin d'être reconstituées, aussi ne passe-t-il pas bien longtemps dans le secteur de Tracy-le-Val,
dont il fait l'occupation depuis le 19 juin.
Quelques jours de repos à Chelles (sud de l'Aisne) et nous le retrouvons, le 21 juillet, prêt à reprendre son service dans les tranchées.
Le régiment occupe le secteur conquis de Quennevières jusqu'au 25 octobre 1915.
Occupation très meurtrière.
Il ne s'est pas reposé du 21 juillet au 25 octobre 1915.



Thomas Jean Marie
Né le 31 Mars 1885 à Plouguin
Couloudouarn
Classe 1905 Matricule 1110
Rappelé à l'activité le 3 Août 1914
19ème Régiment d'Infanterie
Disparu le 31 Octobre 1915
Mort le 31 Octobre 1915
à Sommepy Tahure (Marne)
Blessures de guerre
Mort pour la France
Monument aux morts de Brélès


Tournellec François Marie
Né le 14 Février 1879 à Plouguin
Classe 1899 Matricule 2344
Rappelé à l'activité le ..... 1914
87e Régiment d'Infanterie Territoriale
151e Régiment d'Infanterie
le 14 Décembre 1914
162e Régiment d'Infanterie
le 22 Mai 1917
Tué à l’ennemi le 7 Septembre 1917
au bois des Caurières devant Verdun (Meuse)
Mort pour la France
Monument aux morts de Bréles
Inhumé au cimetière de Marceau
Croix de guerre
Citation à l'Ordre du Régiment n°75
du 30 Septembre 1917
Excellent soldat, courageux et dévoué.
Tombé au champ d'honneur
Croix de Guerre avec étoile de bronze
Historique du 162e Régiment d'Infanterie
L'offensive de Verdun 1917 nécessite encore l'appoint de la 69 e D.I.
Du 1er au 20 août, le 162 e occupe un secteur très agité entre la ferme des Chambrettes et la corne nord-est du bois des Caurières.
Dès le 16 août, il supporte une violente et subite attaque de l'ennemi qui réussit à refouler notre première ligne.
Mais une contre-attaque immédiate vivement menée par le 3 e bataillon nettoie le terrain, et le 17 août au matin la situation est rétablie. Dans l'affaire périt un officier que tout le monde considérait à juste titre comme l'incarnation du régiment, le capitaine CUNY, commandant le 1 er bataillon, tué de plusieurs coups de revolver au moment où il abritait sa compagnie de réserve.
Du 28 août au 8 septembre, le régiment organise le terrain conquis dans le bois de Chaume au cours de l'attaque du 20 août,
repousse des contre-attaques et prépare par des reconnaissances journalières la base des attaques du 8 septembre.
Enquittant Verdun, une deuxième citation à l'ordre de l'armée avec attribution de la fourragère vient récompenser ses efforts.



Tréguer François Marie
Né le 2 Novembre 1889 à Plouguin
Tréféac'h
Classe 1909 Matricule 3696
Bon Service Armé le 13 Décembre 1914
3e Régiment d'Infanterie Coloniale
le 19 Février 1915
Soldat 2ème classe
3e Régiment d'Infanterie Coloniale Mixte
le 1 Avril 1915
Tué à l'ennemi, 14 Septembre 1915
à Souain (Marne)
par éclats d'obus
Mort pour la France
Monument aux morts de Plouguin
Historique 53e Régiment d’Infanterie Coloniale Mixte
Par dépêche ministérielle n° 7329 1/6 du 7 août, le 3e régiment colonial mixte de marche
devient le 53e régiment d'infanterie coloniale à la date du 16 août 1915.
Le 53e colonial prend les tranchées de premières lignes jusqu'au 27 août, puis, du 2 au 7 septembre, du 12 au 16 septembre,
du 20 au 23 septembre, en avant et à l’est de Souain, menant à bonne fin et jusqu'à la veille de l'attaque, les travaux préparatoires
de l'offensive qui va se déclencher


Treut Yves Marie
Né le 8 Mai 1881 à Plouguin
Kergonguy
Classe 1901 Matricule 10806
Second Maître Mécanicien chauffeur
Disparu en mer le 27 Avril 1915
Disparu avec son bâtiment "Léon Gambetta"
torpillé en Méditerranée.
Mort pour la France.
Monument aux morts de Saint Renan.
Identifié:
YM Trent dans la base mémoire des hommes
Identifié:
YM Le Treut dans base Geneawiki Saint Renan
Communiqué officiel d’après Bulletin des Armées, 19 avr.-3 mai 1915
Le croiseur cuirassé Léon-Gambetta, en croisière à l’entrée du canal d’Otrante, a été torpillé dans la nuit du 26 au 27 avril
et a coulé en dix minutes.
Tous les officiers (dont le commandant, capitaine de vaisseau André) ont péri à leur poste.
136 hommes de l’équipage, dont 11 sous-officiers, ont été recueillis par des navires envoyés d’urgence à leur secours
par les autorités italiennes.
110 survivants de l’équipage du Léon-Gambetta ont été conduits à Syracuse (Sicile).
Les 26 autres sont à Brindisi (côte orientale d’Italie).
Les corps de l’amiral Sénès et de 52 marins ont été inhumés à Leuca.
Le Léon-Gambetta était un croiseur cuirassé du programme de 1900 ; il avait été lancé à Brest en 1901.
Il faisait partie d’un groupe de trois croiseurs, dont les deux autres, le Victor-Hugo et le Jules-Ferry,
formaient avec lui la 2e division légère.
Son déplacement était de 12600 tonneaux, avec 146m50 de longueur, 21m40 de largeur et 8m20 de tirant d’eau.
Son appareil moteur avait une puissance de 28500 chevaux, correspondant à une vitesse de 23 nœuds.
La protection était assurée par un cuirassement de 170 millimètres d’épaisseur à la flottaison, de 200 millimètres au blockhaus du commandant et de 140 aux positions de l’artillerie.
L’armement comprenait quatre canons de 194 en tourelles axiales, seize de 164, dont douze en tourelles doubles, et vingt-quatre de 47 ; plus, deux tubes lance-torpilles sous-marins.
L’effectif réglementaire était de 22 officiers et 714 hommes d’équipage.
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Article écrit par Denise Bourven
Bénévole de l'association "Aux Marins"
Petite fille de Jean Marie Le Roy Second Maître mécanicien de Bolazec disparu dans le naufrage.
http://www.amedenosmarins.fr/le-leon-gambetta-une-tragedie-oubliee.html
Le contexte
Si les "Sissi" ont véhiculé l'image d'un François-Joseph romantique, l'empereur d'Autriche-Hongrie n'a rien d'un démocrate, et, dans l'empire, certaines minorités, italiennes, serbes, s'agitent.
Pour lui qui rêve d'annexer la Serbie et le Monténégro à son vaste territoire, l'attentat de Sarajevo est le prétexte à l'attaque de la Serbie.
Le 29 juillet 1914, tout l'espace adriatique va basculer dans la guerre.
Cet espace n'est pas uniforme : les côtes orientales, de Fiume à Cattaro, offrent des chapelets d'îles où il est facile de disparaître,
et de grands ports en eau profonde.
Justement, la flotte austro-hongroise est déjà basée à Pola et Cattaro (Trieste ne lui paraît pas assez autrichienne).
De là, la Méditerranée lui est ouverte, ainsi qu'à son alliée l'Allemagne, qui assemble à Pola des sous-marins envoyés en pièces détachées par voie terrestre.
Pas question de leur laisser le champ libre.
Déjà, la division allemande de l'amiral Souchon, partie de Pola, après l'attaque de Bône et Philippeville en Algérie, fait cap à l'est,
pour franchir les Dardanelles, et, avec l'accord de l'Empire Ottoman, mouiller devant Constantinople,
à proximité de notre alliée la Russie.
Suite à l'accord naval franco-britannique de février 1913, la mer Adriatique est placée dans la zone de commandement
dévolue aux Français en Méditerranée occidentale.
Dès le 10 août 1914, l'amiral Boué de Lapeyrère reçoit l'ordre d'anéantir la flotte austro-hongroise.
Mais les grands navires autrichiens, qui n'ont aucune envie de se faire canonner, ne franchissent pas le canal d'Otrante,
et les sous-marins, qui se faufilent partout, disparaissent ensuite comme des poissons de roche.
Que faire ?
Toute notre flotte entre dans l'Adriatique, avec pour résultat la destruction du petit croiseur autrichien Zenta, en endommageant
un peu nos propres navires, et, tout de même, la libération du port d'Antari, port monténégrin.
Les cargos, qu'escortent nos bâtiments, peuvent ainsi ravitailler en vivres le Monténégro et la Serbie enclavée.
Mais les côtes dalmates regorgent de filins et de mines.
Après plusieurs pertes, il est donc décidé que les croisières nord-sud feront place aux patrouilles ouest-est :
puisqu'on ne peut pas anéantir la flotte austro-hongroise, il faut au moins l'empêcher de sortir de l'Adriatique,
et de s'engager dans les Dardanelles où l'empire ottoman s'est allié aux Allemands contre les Français et les Anglais.
Ces patrouilles sont assurées essentiellement par les croiseurs cuirassés, dont le Léon-Gambetta.
La tragédie
En mars 1915, un plan de blocus est établi, précisant les points de ravitaillement et de rendez-vous pour la division de l'Adriatique,
ainsi que des routes de patrouille.
L'opération de débarquement dans les Dardanelles a échoué.
Plus que jamais, il faut aider l'armée serbe.
Or, le canal d'Otrante grouille de sous-marins ennemis et les équipages des vapeurs refusent d'appareiller.
En attendant l'entrée en guerre de l'Italie aux côtés des alliés, une ligne de croisière est établie entre le cap Santa Maria di Leuca, à l'ouest, et l'île Sainte Maure, à l'est.
Quatre croiseurs cuirassés " Victor-Hugo, Jules-Ferry, Waldeck-Rousseau, Léon-Gambetta." font chacun leur tour un quart du trajet.
Dans la nuit du 26 au 27 avril, une nuit de printemps calme et paisible, sans Bora glacée ni Sirocco brûlant, c'est le Léon-Gambetta
qui est dans "la gueule du loup".
Dans les soutes, il ne lui reste que 400 tonnes de charbon.
C'est que, dès le lendemain, il doit regagner Malte, pour charbonner, et, aussi, pour permettre à l'équipage de prendre un peu de repos.
Si le contre-amiral Sénès sommeille, le Capitaine de vaisseau Georges André, veille dans sa cabine.
Minuit est passé depuis plus de 30mn, les bâbordais dorment, les tribordais veillent.
Tout est silence, hormis le bruit des machines.
A la vitesse de 6 noeuds, la silhouette oblongue du croiseur s'éloigne de Santa Maria di Leuca, dont le sémaphore est à 15 milles environ (entre 20 et 25 km).
Soudain, dans le cercle de ses jumelles, la vigie croit apercevoir quelque chose.
Aussitôt, une déflagration formidable ébranle le navire, jetant les endormis à bas de leur couchette :
une torpille a frappé à bâbord, au niveau de la cloison qui sépare la chambre des dynamos de la chaufferie en activité.
Quelques secondes plus tard, une deuxième torpille atteint l'arrière de la passerelle : la machine bâbord est touchée,
l'eau envahit les deux autres machines ; deux gerbes d'eau jaillissent à bâbord plus haut que les cheminées,
et retombent en cataractes sur le pont.
Il n'y a plus ni lumière ni TSF (télégraphie sans fil) : impossible d'adresser le moindre SOS.
Les commandes ne répondent plus…
"Sauvez-vous, mes enfants", dit le commandant André
De jeunes officiers éclairent de leurs lampes de poche les différentes échelles donnant accès sur le pont, et des hommes valides
peuvent ainsi monter aux embarcations, "sans bousculade ni cris".
Cependant dans les entrailles du navire, plusieurs dizaines de marins resteront bloqués pour l'éternité.
On tente de mettre les embarcations à l'eau.
Mais le navire s'incline, de plus en plus, et bascule, libérant des embarcations qui se brisent, tuant des hommes sur leur passage.
Un canot, cependant, manœuvré par 8 hommes, tombe d'aplomb et flotte.
Prévu pour 50 hommes, il en accueillera 108, qu'il conduira jusqu'au phare de Leuca peu avant 9 heures.
Il reste encore la vedette de l'amiral, que trois officiers mettent à l'eau. " Viens donc", appelle un marin.
Mais son camarade l'en dissuade.
Bien lui en a pris.
Sans doute trop chargée, la vedette coule à pic.
Le croiseur cuirassé bascule, et s'enfonce dans l'Adriatique.
Quinze minutes à peine se sont écoulées depuis que le sous-marin U5, sur ordre du commandant autrichien Georg Von Trapp,
a tiré sa première torpille.
Le sous-marin austro-hongrois U (250t, 22m de long) a quitté Cattaro le 24 avril, et surveille les côtes.
Sans doute a-t-il constaté le passage d'un croiseur, forteresse flottante, seul, dans la nuit
Ensuite, il lui a suffi de se tenir en embuscade, et de guetter...
Contre un sous-marin embusqué, que peut un croiseur cuirassé ?
Il est armé ?
Certes. Mais qui tenterait dans la nuit de neutraliser une fourmi à coups de canon ?
"Un jour, probablement, nous succomberons dans cette guerre sournoise que nous font les sous-marins",
écrit l'enseigne de vaisseau de 1ère classe Auguste Lefèvre, disparu dans le torpillage.
Le sauvetage
Pendant qu'à distance le sous-marin observe, environ 300 hommes tentent de se maintenir en surface, cramponnés à des madriers,
des mâts, des cages, à poules ou à de "jolis cochons roses" (Emile Abgrall, disparu).
Le matelot survivant Monfort (de la Cadière, dans le Var), écrit à ses parents :
"j'ai ramassé mon courage et je me suis tenu sur l'eau avec deux rames que je me suis passé sous les bras.
Heureusement, la mer était bonne".
Les marins se regroupent, s'encouragent, se soutiennent, et soutiennent les officiers, physiquement moins entraînés.
Certains appellent leur mère, d'autres leur femme.
Et, dans ces instants qui peuvent être les derniers, ils pensent à ces enfants qu'ils voudraient tant voir grandir.
Si encore, comme leurs camarades anglais, ils avaient reçu les collets de sauvetage !
Mais ceux-ci ne seront distribués que bien plus tard, trop tard pour eux.
Peu à peu, les voix s'affaiblissent.
Déjà, froid, fatigue, congestion et crampes achèvent certains.
Des madriers auxquels ils étaient cramponnés, des hommes, comme des fruits trop mûrs, se détachent et coulent à pic,
en dépit des efforts de camarades plus robustes.
Bientôt le jour se lève, et au froid va succéder le soleil qui brûle ces hommes affamés et assoiffés.
Vers 14h, une fumée noire apparaît, disparaît, reparaît enfin : à l'arrivée de la chaloupe,
le chef du sémaphore de Santa Maria di Leuca, Mario Sandri a aussitôt déclenché l'alerte par téléphone.
Partis à la seconde, de Tarente, de Brindisi, torpilleurs et contre-torpilleurs italiens arrivent, ils sont là !
Ils parviendront à sauver 29 naufragés, et retrouveront ce jour-là 58 morts, dont l'amiral Sénès.
Les victimes seront enterrées solennellement à Castrignano del Capo, commune la plus proche du promontoire de Santa Maria di Leuca, en présence de survivants, de la population locale, et de représentants de l'état italien.
Depuis, on leur a érigé une chapelle, à Castrignano del Capo.
Quant aux survivants, fêtés et accueillis en héros "les héros du Gambetta", ils sont vêtus, nourris, soignés, ainsi que le racontent
Albert Cazabat et Jean François Grall, qui ajoutent "viva Italia !".
Le quartier maître mécanicien Olivari, qui s'était cru perdu, accoste à dos de boeuf.
Pour le remercier de cette opération de sauvetage, il bénéficiera d'un an de sursis, dans les champs des Pouilles,
auprès de ses congénères italiens.
Les conséquences
Le 27 avril 1915, des pourparlers sont en cours, mais, officiellement, l'Italie est neutre.
Les survivants seront donc, suivant la convention de Genève, conduits à Syracuse,
mais leur régime n'y sera pas vraiment celui de prisonniers.
D'ailleurs, quand l'Italie entrera en guerre aux côtés des alliés, le 24 mai 1915, ils demanderont à combattre
"auprès de leurs frères italiens", ce qui leur sera refusé.
Cette solidarité entre gens de mer perdure, puisque l'Association des Marins d'Italie rendra le 27 avril 2015 deux hommages
aux marins du Léon-Gambetta, l'un à la pointe de Santa Maria di Leuca, l'autre au cimetière de Castrignano.
Si le "Bouvet" a sauté sur une mine dans les Dardanelles le 18 mars 1915,
le "Léon-Gambetta" est le premier (mais pas le dernier, hélas !) navire de cette taille à avoir été torpillé et coulé par un sous-marin ennemi.
Le 1er maître Jean François Grall n'a pas abandonné un instant son carnet de rôle, et a fourni ainsi une liste exacte de l'équipage.
Sur les 821 hommes d'équipage
684 ont péri (dont les 32 officiers)
624 sont portés disparus, et inscrits au registre des décès de la ville de Brest
60 cadavres ont été retrouvés par les marins italiens*.
137 seulement ont survécu au torpillage
* Le lieutenant de vaisseau Ballande, retrouvé le 19 mai 1915, sera identifié grâce à son alliance
Après ce drame, l'amirauté décida d'établir la ligne de croisière plus au sud, avec une escorte de torpilleurs,
jusqu'à l'entrée en guerre de l'Italie, qui se chargea de l'Adriatique.
Le 7 mai 1915, le torpillage du "Lusitania" fit oublier le "Léon-Gambetta".
En Autriche, on frappa une médaille à l'honneur de l'équipage du sous-marin U5, et de son commandant.
Sources :
-
les carnets de 14-18- le forum de Brasparts-
-
les lettres de marins du Léon-Gambetta : Abgrall Emile, Cazabat Albert, Grall Jean François, Jaillard Pierre, Lefèvre Auguste, Le Roy Joseph, Monfort (la Cadière), Mudes Francis
-
les cahiers de la Méditerranée
-
-"Patrouilles tragiques dans la nuit" (Paul Chack)
-
"L'éperon et la cuirasse" (Paul Randier)
-
"Trieste, une identité de frontière" (Angelo Ara et Claudio Magris)
-
Presse régionale, nationale, et italienne, d'avril-mai 1915 (gallica)
-
Archives de Vincennes


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