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1936 - Suppression d'enfant à Ploudalmézeau

Une domestique de ferme

conservait depuis 18 jours, dans une malle, 

le cadavre d'un nouveau-né

Le Petit Breton - Dimanche 26 Janvier 1936

Une suppression d'enfant à Ploudalmézeau

Une domestique de ferme conservait depuis dix-huit jours

dans une malle le cadavre d'un nouveau-né

 

UNE LETTRE ANONYME

Il y a huit ans, Françoise Jaouen, née le 4 Janvier 1897, à Plouguin,

entrait au service de son oncle Yves Pluchon, 59 ans,

cultivateur à Kerarch Ouézan, en Ploudalmézeau.

L'homme, veuf, vivait avec son fils Yves, 26 ans.

Les années passèrent.

La nièce donnait entière satisfaction.

Selon les propres déclarations du fermier, elle était sérieuse,

active et honnête.

Le soir, elle s'absentait juste pour aller à la veillée chez les voisins.

Or, mardi dernier, une lettre anonyme destinée au « brigadier »,

de Ploudalmézeau, parvenait entre les mains du chef de brigade,

M. Roué.

L'écriture était grossière.

Les fautes d’orthographe nombreuses.

L’auteur, d’une façon assez naïve du reste, laissait entendre que

« ça n'allait pas chez les Pluchon, que la bonne aurait une histoire » , etc.

Le chef fit des sondages sous un prétexte quelconque mais les voisins,

sagement, ne soufflèrent mot.

Mais les enquêteurs avaient à peine tourné les talons

que les commérages reprenaient avec nouvelle vigueur.

Un homme finit par indiquer le nom d'une personne qui savait quelque chose et la personne en question mangea le morceau.

La fille Jaouen avait accouché mais le nouveau-né

était demeuré invisible.

Alors on supposait...

LA FILLE JAOUEN PASSE DES AVEUX

Samedi, à 9 h. 15, le chef de brigade Roue et le gendarme Grannec

se rendaient au domicile des Pluchon.

Précisément ceux-ci étaient absents.

Le père se trouvait dans un champ du côté du cimetière.

D'une carrière voisine le fils tirait de la pierre.

La fille Jaouen, en tablier, lavait la vaisselle près du lit clos réservé

dans la cuisine à ses patrons.

— « Qu'avez-vous fait de votre enfant ? »

lui dit à brûle pourpoint le chef Roue.

La domestique devint pâle et baissa la tête sans répondre.

Elle resta ainsi prostrée durant 15 minutes.

Enfin, faisant un effort, elle murmura :

— « Il est là-haut, dans la malle ! »

A sa suite, les gendarmes montèrent l'étroit escalier de bois

conduisant au grenier.

La bonne avait dit vrai.

Le cadavre était là en complet état de décomposition.

Françoise Jaouen fut conduite aussitôt à la caserne de gendarmerie,

où elle compléta sa confession.

Le bébé était venu mort au monde.

Avant de reprendre ses occupations journalières, elle avait enfoui

le cadavre dans la malle, où il devait séjourner 17 Jours.

La fille-mère attendait que ses forces fussent revenues pour enterrer

le petit corps quelque part dans un champ.

Françoise Jaouen eut soin d'innocenter ses patrons.

Le père et le fils Pluchon protestèrent énergiquement de leur innocence.

A aucun moment ils n'avaient remarqué l'état de leur domestique.

Au surplus le fils nia avoir flirté avec sa cousine.

Une confrontation des trois personnages eut lieu à 10 h, 30.

Chacun resta sur ses positions.

A midi, le fils Pluchon, escorté d'un gendarme retournait à la ferme

pour soigner les bêtes.

Quelques instants plus tard, Yves Pluchon, père,

regagnait également son habitation.

LE PARQUET SUR LES LIEUX A 14 h. 30

Le Parquet de Brest, composé de M, Bourriel,

procureur de la République; M. de Lapeyre Juge d'instruction accompagnés de M. Lang capitaine de gendarmerie;

M. le docteur Mignard, médecin-légiste et M. Le Gall,

secrétaire du Parquet arrivaient sur les lieux.

Tandis que le médecin légiste procédait à l'autopsie du nouveau-né

les magistrats interrogeaient la fille Jaouen et ses patrons.

Un peu avant 17 heures, M. le docteur Mignard faisait connaître le résultat de sa macabre opération.

L'enfant du sexe féminin n'avait pas vécu.

En conséquence Françoise Jaouen qui, déjà en 1920 avait été mêlée

à une histoire identique, sera poursuivie devant le Tribunal correctionnel pour suppression d'enfant. *

Le Parquet a regagné Brest à 17 h. 30.

 

La demoiselle Jaouen, le soir, a pu rentrer chez ses patrons.

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