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Fenêtres sur le passé

1935

Le drame du car Morlaix - Quimper
 

Drame dans l'autocar Quimper Morlaix 22-02-1935.jpg

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Source : La Dépêche de Brest 22 février 1935

 

Hier, à 19 h. 30, un drame s'est déroulé dans l'autocar S.A.T.O.S. assurant le service de Quimper à Morlaix, qui avait quitté Quimper à 17 heures.

 

Alors que le véhicule venait de passer le Roc-Trévezel, un homme, monté dans l'autocar à La Feuillée, tira à bout portant plusieurs coups de revolver sur sa voisine, trois, croit-on, puis, retournant l'arme contre lui-même, se logea une balle dans la tête.

 

La femme, mortellement blessée, s'affaissa sans pousser un cri, tandis que l'homme, hébété, tentait de jeter l'arme par la portière.

 

Le revolver, un browning de 6 mm 35, tomba à l'intérieur du car, où on le retrouva peu après.

 

Le chauffeur, M. Borderie, demeurant à Morlaix, stoppa aussitôt, puis reprit sa route en direction de Pleyber-Christ.

Arrivé dans cette localité, il alerta la gendarmerie en même temps que M. le docteur Prat, qui vint sur les lieux, mais ne put que constater le décès de la malheureuse femme.

 

Quant au meurtrier, il s’était blessé, légèrement semble-t-il, se faisant une blessure en séton à la tête.

On lui fit un pansement sommaire.

 

Le chef de brigade Le Hir et le gendarme Kerdoncuff interrogèrent le criminel.

Il déclara se nommer Henri-François Le Gall, 44 ans, chef de bureau à la préfecture de Quimper.

 

On prétend, mais nous n'avons pu en avoir confirmation, qu'il aurait été récemment révoqué.

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La victime de ce drame lamentable, Mme Le Gall, épouse de l'assassin,

appartient à une famille très honorable  de Morlaix.

C'était une demoiselle Marie Jaffrennou, 35 ans, dame employée des P.T.T., dont le père exerça des fonctions

d'agent de police dans notre ville.

 

Les parents de l'infortunée jeune femme, demeurant rue de Brest, ont été prévenus du malheur qui les frappait par les soins de la gendarmerie de Morlaix.

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Les gendarmes de Pleyber-Christ, après avoir recueilli l'identité de la victime et celle du meurtrier, prirent place dans l'autocar pour se rendre à l'hôpital de Morlaix.

C'est là qu'à 21 heures nous avons pu interviewer M. Borderie, conducteur à la S.A.T.O.S.

 

L'autocar est arrêté dans l'allée principale, près de l'entrée.

Le criminel, Henri-François Le Gall, est là, debout, la tête enveloppée de pansements, à côté des gendarmes.

On distingue dans l'ombre, à l'intérieur du véhicule, le cadavre de sa femme.

 

— Tu vois, répète-t-il, en s'adressant à celle qui fut sa compagne, tu as fait de moi un assassin.

Le Gall, sans cesse, repère un nom : c'est, dit-il, celui de l'homme qui lui a pris sa femme.

 

Deux infirmiers prennent le cadavre, le dépose sur une civière pour le transporter à la morgue, Le Gall assiste, impassible, à cette scène, puis les gendarmes l'entraînent à l'intérieur de l'hospice où il sera gardé à vue, en attendant d'être déféré au parquet.

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Ce que dit le chauffeur Borderie.jpg

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« — J'avais quitté Quimper hier, vers 17 heures, nous dit le conducteur du S.A.T.O.S.

L'autocar que je pilotais transportait près de 30 voyageurs.

Parmi ceux-ci, immédiatement derrière moi, se trouvait la victime, Mme Le Gall, qui était montée à Quimper.

Nous étions, paraît-il, suivis par un taxi qui nous rattrapa à La Feuillée.

En quittant cette station, un homme qui venait de descendre de ce taxi — c’était le meurtrier — courut

au-devant du car.

Je stoppai et l’homme monta dans la voiture.

Il se dirigea d’abord vers le fond puis vint s'asseoir à côté de la femme qu'il devait tuer.

Le criminel et sa victime échangèrent quelques paroles puis, soudain, Le Gall se leva, déchargea plusieurs fois son arme sur sa femme et se tira une balle dans la tête.

 

— Je ne vous répète, bien entendu, que ce que m'ont dit les voyageurs après le crime, car, personnellement,

je n'ai rien vu ;

j'ai entendu les coups de feu mais avant toute chose, je pensais à la vie des voyageurs que je transportais.

Comme nous étions dans une descente, j’ai freiné doucement et me suis arrêté.

 

— En jetant son arme, le meurtrier a, d'ailleurs, touché ma casquette et l'a fait tomber.

Comme je ne pouvais rien faire, ni pour la victime, ni au criminel, je me suis dirigé aussitôt vers Pleyber-Christ.

 

Une large flaque de sang s'était répandue sous la victime et des sacs postaux en furent tachés.

C'est bien par hasard qu'aucun autre voyageur n'a été blessé. »

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Quelles sont les causes du crime.jpg

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Mlle Marie Jaffrennou c'était mariée avec Le Gall, époux déjà divorcé.

Bien que le ménage ait deux fillettes : Claude, 6 ans, et Micheline, 2 ans et demi, l'entente ne régnait pas depuis quelque temps entre le mari et sa femme.

Ils vivaient d'ailleurs séparés.

 

Le Gall aurait demandé à son épouse de reprendre la vie commune.

Ce serait le refus de cette dernière qui aurait motivé son geste.

 

L'enquête établira, sans doute, s'il s'agit réellement d'un drame de la jalousie.

Le Gall subira aujourd’hui un interrogatoire au parquet.

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Henri Le Gall Meurtrier - Ouest Eclair 23 fev 1935.jpg

Ouest Éclair 23 février 1935

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Le drame du car Morlaix Quimper 23-02-1935.jpg

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Source : La Dépêche de Brest 23 février 1935

 

Nous avons relaté, hier, le drame lamentable qui s'est déroulé, jeudi soir, dans l'autocar de la S.A.T.O.S., assurant le service de Quimper à Morlaix.

 

Un ancien chef de bureau de la préfecture de Quimper, mis récemment à la retraite d'office,

le nommé Henri-François Le Gall, âgé de 44 ans, qui venait de monter dans le véhicule à La Feuillée,

tua froidement sa femme, née Marie-Joséphine Jaffrennou, âgée de 34 ans, de plusieurs coups de revolver.

 

La malheureuse victime avait pris l'autocar à Quimper, pour se rendre à Morlaix, où se trouvaient, chez ses parents, Mme et M. Jaffrennou, ancien agent de police dans notre ville, ses deux fillettes, Claude, 6 ans,

et Micheline, 2 ans et demi.

 

Le meurtrier qui, dès ses premières déclarations, attribua son acte à la jalousie, assassina lâchement sa femme, alors que l'autocar passait au Roc-Trévézel.

 

On sait que Le Gall, après avoir accompli son crime, tenta de se suicider avec son arme.

Il ne se fit qu'une légère blessure à la tête.

 

M. Borderie, chauffeur de l'autocar, au sang-froid duquel nous rendons hommage,

poursuivit sa route vers Pleyber-Christ, après s'être arrêté à Plounéour-Ménez pendant quelques instants.

 

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À Pleyber-Christ, le docteur Prat constata le décès de Mme Le Gall et pansa sommairement le criminel.

 

Le chef de brigade Le Hir et le gendarme Kerdoncuff, de Pleyber-Christ, prirent ensuite place dans l'autocar et accompagnèrent, à l'hôpital de Morlaix, Le Gall et sa victime.

 

Tandis qu'on transportait à la morgue le corps inerte de sa femme, Le Gall était conduit dans un local de l'hospice où, durant toute la nuit, il fut gardé à vue par les gendarmes.

 

L'autocar dans lequel s'était déroulé le drame avait été garé dans l'allée centrale de l'hôpital, pour que le parquet pût se livrer à toutes les constatations nécessaires.

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Le parquet de Morlaix, composé de MM. Dramard, procureur de la République ;

Rosec, juge d'instruction, et Denis, greffier, s'est transporté hier matin, à 10 heures, à l'hôpital de Morlaix,

pour interroger le meurtrier.

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Le Gall n'a voulu faire, devant le parquet, aucune déclaration.

Il a dit qu'il ne parlerait qu'en présence de son avocat.

Il a choisi comme défenseur Me Jadé, du barreau de Quimper.

 

Le criminel, nullement troublé, n'a manifesté aucun regret.

À une question qui lui fut posée, à propos de ses enfants, il répondit qu'en commettant son acte,

il n'avait pas pensé à eux.

Ce ne fut que plus tard qu'il songea aux deux pauvres petites fillettes...

C'était trop tard, hélas !

 

Après avoir subi l'interrogatoire d'identité nécessaire, Le Gall fut placé sous mandat de dépôt.

Les pièces à conviction : arme, douilles, etc., furent saisies.

 

M. Faou, armurier à Morlaix, choisi comme expert par le parquet, examina l'arme du crime,

un browning du calibre de 6 mm 35, ainsi que le car.

Il retrouva dans le véhicule cinq douilles.

On peut, dès lors, supposer que Le Gall tira trois balles à bout portant sur sa malheureuse femme et tenta de se suicider en déchargeant deux fois son arme dans sa direction.

 

Un projectile seulement l'atteignit légèrement à la tête.

 

On sera d'ailleurs définitivement fixé à ce sujet, ce matin même, quand M. le docteur Leyritz, médecin-légiste, aura procédé à l'autopsie du cadavre.

 

Aucune trace de balle n'a été relevée dans le car tragique.

 

Le Gall, la tête entourée de pansements, fut d'abord conduit à la gendarmerie de Morlaix, où il s'inquiéta de savoir si les journaux avaient relaté son crime.

 

Il lut les différents articles concernant le drame sans paraître autrement troublé.

 

Transporté à la gare en auto entre deux gendarmes, Le Gall prit l'autorail pour Brest à 13 h. 55 et fut, dès son arrivée, incarcéré au Bouguen.

On sait les onéreux trajets que doivent faire en chemin de fer, durant l'instruction, les inculpés, depuis la suppression (par économie !) de la prison de Morlaix.

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Nous nous sommes livrés, hier, à une enquête à Morlaix pour connaître les causes de ce crime.

 

Mlle Marie-Joséphine Jaffrennou, jeune femme sérieuse et d'excellente famille, employée des P.T.T. à Quimper, jouissait de l'estime de tous ceux qui la connaissaient.

 

Il y a environ neuf ans, elle résolut d'épouser Le Gall, mari déjà divorcé, bien que ses parents fussent nettement opposés à cette union.

Le ménage eut deux fillettes, mais Le Gall était loin d'être le compagnon tendre et dévoué qu'aurait rêvé la jeune femme.

 

Le Gall, en effet, par son inconduite notoire, fut mis d'office à la retraite, comme chef de bureau de la préfecture de Quimper, en décembre dernier, après avoir subi diverses sanctions.

 

Mais, Mme Le Gall n'osait pas se plaindre à ses parents des mauvais traitements que lui infligeait son mari.

Celui-ci, en effet, la frappait souvent et divers certificats médicaux qu'elle se fit délivrer font foi de la violence de Le Gall à son égard.

Aux coups, succédèrent des menaces de mort, si bien qu'il y a une quinzaine de jours, M. et Mme Jaffrennou furent mis au courant, par des amis de Quimper, des dangers que courait leur fille, qui vivait séparée de son mari.

« Faites attention, leur disait-on, il la tuera. »

 

À ce moment, Le Gall vint à Morlaix en taxi, après avoir fait l'achat d'un revolver chez un armurier quimpérois.

 

Le Gall rôda la nuit autour de la maison de M. Jaffrennou, mais celui-ci avait changé les serrures des portes de sa demeure pour empêcher toute tentative criminelle de la part de son gendre, qui se montrait violent envers toute la famille.

 

En conciliation, à Quimper, Le Gall affirma qu'il n'avait jamais eu l'intention de tuer sa malheureuse femme.

Comme on lui demandait pourquoi, lors de sa venue à Morlaix, il était porteur d'un revolver, il aurait déclaré :

« C'était pour moi, mais j'ai réfléchi et j'ai jeté l'arme dans la rivière, entre le Bassin et Locquénolé... »

 

Hélas ! Le Gall avait un projet bien ancré qu'il mûrit longuement et qu'il mit à exécution jeudi soir...

 

Maintenant, une jeune femme gît, livide, dans une chambre de l'hôpital de Morlaix, tandis que le mari criminel s'apprête à répondre de son acte, enfermé dans une cellule, à Brest.

Et deux fillettes ont perdu à jamais la tendre affection de leur maman et le soutien qu'elles devaient attendre de leur papa !...

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Notre enquête à Quimper.jpg

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Quimper, 22 février.

 

Tout d'abord, nous devons faire une rectification à la première information parue, car le meurtrier n'appartient plus à la préfecture de Quimper depuis le 1er décembre 1934, ce qui ne l'empêcha pas sans doute, de déclarer aux enquêteurs qu'il était chef de bureau à la préfecture, ce qui est doublement faux.

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Henri-François Le Gall est né le 30 octobre 1890 à Brest-Recouvrance.

 

Il s'engagea dans la flotte en 1907, fit la guerre dans la marine et, à cette époque, on doit le dire, il donna satisfaction à ses chefs, puisqu'il fut cité deux fois en 1914 et en 1915 pour actes de courage ; il fut blessé le 24 octobre 1914 et il est titulaire de la croix de guerre.

 

Hélas ! dans la vie civile, Le Gall eut, depuis, une conduite déplorable.

 

Le Gall entra à la préfecture du Finistère le 23 décembre 1916 comme expéditionnaire.

Le 15 août 1921, il fut nommé secrétaire en chef à la sous-préfecture de Châteaulin.

 

Le 1er juin 1927, on dut l'enlever de ce poste et il fut employé à la 1ère division de la préfecture, à Quimper.

 

Sur sa demande, il passa une visite médicale le 22 octobre 1934, fut présenté à la commission de réforme

le 30 octobre 1934, rétrogradé le 23 novembre et mis à la retraite le 1er décembre 1934.

 

Ses notes sont mauvaises, elles furent toujours mauvaises et, dans son dossier, il reconnaît souvent ses erreurs, fait des excuses, des promesses, remercie ses chefs, très indulgents pour lui en raison surtout de ses charges de famille ; mais tous ses serments — serments d'ivrogne — ne furent jamais suivis et son intempérance l'a conduit à l'horrible crime qu'il a commis jeudi soir.

 

Dans son dossier, on trouve aussi des avertissements, des blâmes pour scandales, voies de fait sur une employée de la préfecture et une débitante de Quimper, pour ivresse ou fugues ;

déjà, le 21 avril 1921, il avait été radié du tableau d'avancement.

 

La conduite de Le Gall, de plus en plus mauvaise, devait lasser la patience de M. Larquet, préfet du Finistère, qui, comme ses prédécesseurs, avait fait preuve à son égard d'humanité et de bienveillance, si bien que,

le 15 octobre 1934, Le Gall était déféré devant le Conseil de préfecture.

 

Voici en quels termes, très modérés, M. le préfet demanda sa comparution devant ce Conseil :

 

Quimper, le 15 octobre 1934. 

Le préfet du Finistère,

 

à Monsieur le secrétaire général de la préfecture du Finistère, à Quimper.

J'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé pour les faits suivants de déférer au conseil de discipline M. Le Gall, chef de bureau à la 4e division et je vous serai obligé de vouloir bien ouvrir la procédure prévue par la loi.

 

Si je veux ignorer tout ce que M. Le Gall a pu commettre de répréhensible dans ses fonctions avant mon arrivée dans le département, je ne puis ne pas tenir compte, d'une manière générale, que son service a souvent laissé à désirer ;

que de nombreuses fois, il s'est, au cours des heures de bureau, absenté et que j'ai dû le changer de service afin qu'avec un chef, n'ayant pas souvent à se déplacer, il pût être mieux surveillé.

 

J'étais au courant non seulement par la rumeur publique, mais aussi par ses chefs, qui usèrent vis-à-vis de lui de la plus extrême bienveillance dans ses habitudes d'intempérance, mais il me fut donné, le 27 mars dernier, de faire la constatation moi-même.

 

M. Le Gall, après 21 heures, crut devoir me téléphoner de Briec, et comme Je lui disais de s'adresser à la gendarmerie, il me répondit : « Les gendarmes de Briec, ils s'en foutent... »,

puis une expression que nous ne pouvons reproduire. Je raccrochai le téléphone, ne pouvant que mettre sur le compte de l'ivresse ces propos délictueux et les conditions dans lesquelles ils étaient proférés.

 

Je ne fis pas d'observations à M. Le Gall espérant toujours un amendement de sa part.

 

Le 10 septembre, vers 22 heures, M. Le Gall se présenta à la préfecture pour me parler, et le 11, avant 8 heures, il m'appela au téléphone. Je n'eus avec lui aucune communication.

 

Dans la matinée. M. Burin, chef de division, vint me présenter un mot que lui avait laissé M. Le Gall pour m'avertir qu'il avait besoin de s'absenter dans la matinée ; là ce moment-là, M. Burin me mit au courant d'une situation qui me fut confirmée par écrit le 12, et de laquelle il résultait que M. Le Gall, le 10, était le matin et le soir arrivé en retard, et que l'après-midi il était plus loquace que d'ordinaire, semblait être légèrement pris de boisson, mais pas cependant au point de ne pouvoir assurer son service. »

 

Je n'ignore pas de quelle indulgence on a toujours fait preuve vis-à-vis de M. Le Gall et j'ai cru inutile d'obtenir des précisions sur les renseignements qui m'étaient fournis.

 

Mais je ne pus accepter les explications que M, Le Gall me fournit sur les motifs de son absence le mardi matin 12.

 

Je ne veux pas les qualifier, ni rechercher les motifs que pouvaient avoir d'être affolés Mme Le Gall mère et ses petits-enfants.

À 8 heures, c'est-à-dire avant l'heure d'entrée au bureau, M. Le Gall pouvait savoir si sa femme avait ou non repris ses fonctions, et il n'ignorait pas que ses enfants — comme chaque jour où lui et sa femme étaient de service — auraient les soins nécessaires.

 

Sa présence n'était nullement utile ; en tout cas, il s'est absenté sans motif et sans autorisation.

 

M. Le Gall n'a pu ignorer que j'avais, dès le 12 septembre, décidé de le traduire devant le conseil de discipline.

 

Je pouvais espérer que, jusqu'à cette comparution, il s'efforcerait, par une attitude convenable, de gagner l'indulgence de ses juges et la mienne.

 

C'était mal connaître M. Le Gall.

Le 2 octobre, en effet, à 14 heures, ce chef de bureau prenait son service dans un tel état d'ivresse, constaté dans la rue par des témoins, que son chef de division lui conseillait de rentrer chez lui.

Il n'en fit rien.

 

Au bureau, M. Le Gall prit à partie une employée dans des conditions telles que M Burin dut le menacer d'aller chercher la police,

 

Ainsi se trouve établie la justification de la comparution de M. Le Gall devant le conseil de discipline.

Je me suis borné à l'exposé de faits irréfutables, pris parmi beaucoup d'autres.

 

Je crois M. Le Gall incapable de tout amendement, digne d'aucun intérêt.

Ce matin encore, alors que par extrême bienveillance je lui avais accordé un congé, n’est-il pas rentré deux heures en retard « ayant manqué l'autobus. »

 

Mais si M. Le Gall ne mérite par le mauvais exemple qu'il donne à tous aucune pitié ; si depuis de nombreuses années, il a bénéficié d'une faiblesse coupable ; malgré tout, je ne puis oublier sa situation de famille, sa mère, sa femme, ses enfants ; les malheureuses aussi qui furent ses victimes.

Le conseil trouvera là les motifs d'atténuation quand il me fera connaître son avis.

 

Le préfet, signé, : LARQUET.

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Malgré ses fautes, on accepta, sur sa demande, une mise à la retraite pour raison de santé, de façon que ses enfants, sa vieille mère, puissent toucher encore une modeste pension.

 

Le Gall aurait dû être satisfait.

Non, il voua une haine farouche à ses chefs et les menaça même de son revolver !...

 

D'un premier mariage, il eut un enfant, ensuite un enfant illégitime qu'il reconnut et c'est avec irrégularité qu'il paya les pensions de ses deux premiers enfants, ainsi que celle de sa vieille mère, alors qu'il touchait 3.353 francs par mois.

 

Le 29 mars 1923, il épousait celle qui devait être sa victime.

De cette union naquirent deux enfants, deux fillettes âgées aujourd'hui de 6 ans et de 2 ans et demi.

Pauvres petites !...

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Si tout le monde, à Quimper, considère Le Gall comme un alcoolique invétéré et un homme brutal lorsqu'il avait bu, ce n'est qu'une suite de louanges que nous recueillons sur sa malheureuse femme.

 

Épouse irréprochable, mère affectueuse, femme simple et travailleuse !... 

 

Voilà ce que nous entendons partout, aussi bien chez ses collègues des P.T.T. que chez les voisins des époux Le Gall.

 

Jaloux à tort, il soupçonnait la pauvre femme, il voulait, sous menaces du revolver, lui faire avouer des amants que son cerveau maladif imaginait.

En plein hiver, il la jetait la nuit, à peine vêtue, dans la rue ; il la battait souvent…

Si bien qu'elle demanda le divorce...

 

Sa victime avait une telle peur de lui qu'elle avait souvent dit à ses amies :

« Il me tuera, j'en suis certaine !... »

 

Il y a quelques semaines, devant, pour son divorce, être mise en présence de son mari, elle fit demander par un parent que Le Gall soit fouillé, craignant qu'il ait une arme sur lui.

 

Voilà la vie de celle qui devait bientôt tomber sous les balles du revolver dont il l'avait souvent menacée.

 

Et lui, qui accusait à tort sa femme d’inconduite, menait une vie scandaleuse, accumulait des actes répréhensibles qui furent souvent signalés à ses chefs et préparait son crime.

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Le drame du car Morlaix Quimper _24-02-1935.jpg

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Source : La Dépêche de Brest 24 février 1935

 

Le drame du car Morlaix-Quimper continue à causer une vive émotion dans notre ville.

Depuis deux jours, c'est devenu le sujet de conversation et chacun déplore la fin tragique de la malheureuse

Mme Le Gall, lâchement assassinée par son mari.

 

On s'apitoye sur le sort des petites Claude et Micheline, brutalement privées de leur maman.

On plaint aussi la famille Jaffrennou, si douloureusement éprouvée.

Mme Jaffrennou, impotante depuis plusieurs années, a dû être prévenue avec beaucoup de ménagements du malheur qui la frappait.

 

Chacun commente, à sa façon bien entendu, les causes et les circonstances du crime.

Cependant, toute la population juge avec la dernière sévérité le geste odieux de Le Gall et souhaite qu'il recevra le châtiment qu'il mérite.

 

Au cours de l'enquête à laquelle nous nous sommes livrés vendredi, à Morlaix, nous avons recueilli de mauvais renseignements sur l'assassin, renseignements dont nous avons publié l'essentiel hier.

Ils correspondent d'ailleurs avec ceux qu'a recueillis à Quimper notre confrère L. Tuail et qui ont paru hier également, à la suite de notre article.

On dit, par contre, le plus grand bien de la victime.

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Hier, de 10 h, 30 à 13 heures, M. le docteur Leyritz, médecin légiste, a procédé, à l'hôpital de Morlaix, à l'autopsie du corps de la victime, en présence de MM. Dramard, procureur de la République ;

Rosec, juge d'instruction, et Denis, greffier.

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Il résulte de l'autopsie que Le Gall a tiré cinq balles, quatre à bout portant sur sa femme et une sur lui.

 

Les quatre projectiles qui ont frappé la victime à la tête sont groupés sur le côté droit de la figure, entre le haut de la bouche et la tempe.

Ils ont été retrouvés de l'autre côté de la tête par le médecin légiste.

La première balle a traversé la joue droite, a brisé une dent et s'est logée sous une molaire gauche.

La seconde, tirée un peu plus haut, a traversé la voûte du palais et s'est logée à côté de la première.

La troisième, tirée un peu plus haut encore, a été déviée, puisqu'elle s'est logée près de la tempe gauche.

La quatrième, qui était certainement mortelle, a atteint la malheureuse femme à la tempe droite et a traversé le cerveau.

Elle a été retrouvée à hauteur de la tempe gauche.

 

La précision avec laquelle les coups ont été tirés indique la ferme volonté de l'assassin de donner la mort à son infortunée compagne.

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Le Gall a-t-il voulu se donner la mort.jpg

 

Il est permis de dire, par contre, que Le Gall a fait preuve de beaucoup moins de précision dans sa tentative de suicide.

On peut, dès lors, croire qu'il ne s'est livré qu'à un simulacre de suicide.

La balle qu'il s'est tirée, de haut en bas, lui a simplement effleuré le front et a percé sa casquette.

S'il avait voulu se détruire réellement, n'aurait-il pas essayé de se viser droit à la tempe, soit à la bouche, soit encore au cœur ?

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La balle que Le Gall s'était soi-disant destinée a été retrouvée sous la quatrième banquette droite de l'autocar.

Comme l'assassin se trouvait à la première banquette gauche, on peut dire que le voyageur qui se trouvait à la place où le projectile égaré a été découvert l'a échappé belle.

 

On peut concevoir l'émotion que ressentirent les voyageurs et l'évanouissement d'une femme qui se trouvait dans le véhicule s'explique aisément.

 

Quant au jeune chauffeur, M. Borderie, qui fit preuve d'un grand sang-froid, nous ne saurions le féliciter trop vivement.

Nous espérons qu'il recevra une juste récompense.

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Le parquet de Morlaix a été chargé d'instruire cette affaire.

 

La suppression de notre maison d'arrêt, par mesure d'économie, apparaît aujourd'hui comme devant être très onéreuse.

 

Pour chaque interrogatoire qu'il aura à subir, Le Gall devra être transféré de Brest à Morlaix.

Les frais de ses voyages, de ceux des deux gendarmes qui l'accompagneront, de son avocat arriveront à faire une belle petite somme !...

Ce seront des économies à rebours.

 

Le Gall comparaîtra vraisemblablement devant les assises de Quimper à la session de juillet prochain.

 

Nous ignorons encore à quel moment il sera interrogé sur le fond par M. le juge d'instruction.

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Les obsèques de la victime seront célébrées aujourd'hui dimanche, à 15 heures, à l'hôpital de Morlaix.

Nous adressons à M. et Mme Jaffrennou, ainsi qu'à toute la famille, nos vives condoléances et les assurons de toute notre sympathie en ces pénibles circonstances.

 

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Source : La Dépêche de Brest 26 février 1935

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Le drame du car Morlaix Quimper 26 fev 1935.jpg
Le drame du car Morlaix Quimper à l'instruction.jpg

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Source : La Dépêche de Brest 2 mars 1935

 

Comme nous l'avons annoncé, Henri-François Le Gall, âgé de 44 ans, ex-chef de bureau à la préfecture de Quimper qui, le jeudi 21 février, tua sa femme, née Marie-Joséphine Jaffrénou, âgée de 34 ans, à coups de revolver, dans l'autocar S.A.T.O.S. Quimper-Morlaix, a été longuement interrogé hier par M. Rosec, juge d'instruction.

 

Le Gall arriva à Morlaix, venant de Brest, par l'express qui entre en gare à 9 h. 2.

Quelques curieux stationnaient çà et là, à proximité de la sortie.

Le temps était menaçant, avec un ciel gris et bas.

Peu de temps après l'arrivée du convoi, Le Gall apparut entre deux gendarmes.

Il a toujours la tête entourée de pansements.

Il est vêtu d'un long ciré noir et son allure vulgaire ne permet guère d'imaginer qu'il occupa une fonction importante à la préfecture de notre département.

L'alcool, sans doute, a hâté cette déchéance qui l'a amené jusqu'au crime.

 

Nous n'entendrons qu'un seul cri ; c'est une insulte lancée par une femme :

« S... », s'exclame-t-elle !

Le Gall, indifférent, descend par la rue Courte et traverse toute la ville pour se rendre au palais de justice.

Son passage, bien entendu, attire l'attention des curieux qui observent le plus grand silence.

 

Ne songent-ils pas, en voyant le criminel, à sa malheureuse victime et aux deux petites Claude et Micheline ?

La pitié qui va vers ces dernières ne l'emporte-t-elle pas aussi dans beaucoup d'esprits sur la haine que la société doit vouer à un assassin ?

Certains de nos concitoyens qui ont connu Le Gall ont peine à le reconnaître, tant il a les traits tirés et tant il a changé depuis son crime.

Le remords, châtiment implacable, est-il venu troubler sa tranquillité apparente ?

Le Gall aura-t-il enfin compris toute l'horreur de son acte ? Peut-être.

 

Il n'aime pas, en tout cas, les photographes et, dès qu'il les aperçoit,

il cherche à se cacher le visage avec le bras ou la main.

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L'assassin Le Gall sortant de la gare de Morlaix.jpg
Le Gall demande à voir ses enfants.jpg

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Après avoir subi un premier interrogatoire, dans la matinée, en présence de Me Bouthonneau, secrétaire de Me Jadé, son défenseur, Le Gall demanda à M. Rosec, juge d'instruction, l'autorisation de voir ses deux enfants.

À 13 h. 30, un gendarme alla chercher les petites Claude et Micheline, qui sont actuellement chez leurs grands-parents, Mme et M. Jaffrennou, qui demeurent à proximité de la gendarmerie, rue de Brest.

Cette courte entrevue fut très émouvante.

Les fillettes, joyeuses et insouciantes, répondirent aux questions que leur posa leur père.

Seule l'aînée, d'ailleurs, parut le reconnaître.

La petite Micheline se contenta de dire :

« Oh! il a mal à la tête ! »

 

— Vous ne reconnaissez pas votre papa ?

Dit encore Le Gall qui, bientôt gagné par l'émotion, s'effondra en sanglotant.

 

L'interrogatoire du meurtrier.jpg

 

Le Gall fut interrogé par M. Rosec, de 9 heures à 12 h. 30 et de 14 heures à 17 h. 30,

toujours en présence de Me Bouthonneau.

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Son Curriculum vitae.jpg

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Le meurtrier fut d'abord invité à établir son « curriculum vitae ».

Le Gall naquit, le 30 octobre 1890, à Brest-Recouvrance.

Fils unique, il fit ses études chez les Frères de l'école chrétienne, à Brest, ensuite au collège libre de Lesneven, puis au lycée de Saint-Brieuc.

Il s'engagea, à sa sortie du lycée, pour cinq ans dans la marine.

À sa libération, il entra comme expéditionnaire à la préfecture de Quimper.

 

En 1914, lors de la déclaration de guerre, il partit pour servir dans les fusiliers-marins.

Il fut blessé à Dixmude, puis obtint une citation et des témoignages officiels de satisfaction.

 

Versé dans les escadres de patrouilleurs, il fut libéré après avoir été décoré de la croix de guerre, de la médaille  de l'Yser et de la médaille de Serbie.

 

En 1919, il reprit ses fonctions d'expéditionnaire à la préfecture de Quimper.

Au mois de novembre de la même année, il fut reçu au concours de rédacteur, puis en août 1921, il fut nommé secrétaire en chef de la sous-préfecture de Châteaulin.

En 1926, il fut nommé chef de bureau à Quimper.

 

Le Gall affirma alors qu'il avait demandé récemment sa retraite, parce qu'il était malade.

Il avait, d'après ses dires, des troubles de mémoire qui furent constatés sur un certificat médical établi par le docteur Morvan, de Quimper, en octobre 1934.

 

Il reconnut, cependant, avoir été traduit, le 8 novembre, devant le conseil de discipline et avoir été rétrogradé de chef de bureau de 1ère classe au grade de rédacteur de 5ème classe.

Il prétendit ignorer tout de la décision prise par le conseil de discipline à son égard.

 

Sa pension, dit-il, fut liquidée sur la base de son traitement de chef de bureau, parce qu'il était malade.

Il nia, en tout cas, avoir été mis à la retraite d'office.

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Sa vie privée.jpg

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Le Gall se maria, une première fois, le 18 mai 1914.

De cette union, il eut une fillette.

En 1923, une séparation de corps fut prononcée entre les deux époux au profit de la femme.

Trois ans après, le divorce eut lieu d'office.

 

Le Gall épousa Mlle Jaffrennou, qui devait être sa victime, le 29 mars 1928.

Entre temps, il avait eu une liaison et avait eu un enfant illégitime en faveur duquel il fut condamné à payer une pension alimentaire.

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La génèse du crime.jpg

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D'après Le Gall, il s'entendit, dès le début, très bien avec sa seconde femme légitime.

Le ménage était très uni.

 

Bientôt, sa femme lui fit des reproches motivés, il le reconnaît, par son inconduite.

Sa mise anticipée à la retraite accentua encore cette situation.

Mais les dissentiments entre les époux s'aggravèrent surtout en octobre 1934.

 

Interrogé sur les mauvais traitements qu'il infligeait à son épouse, Le Gall ne reconnut les faits que de façon partielle.

Pour lui, on exagère considérablement ces sévices.

Si sa femme demanda la séparation de corps, ce ne fut pas tant pour cela, mais surtout pour incompatibilité d'humeur.

Le Gall se défend pied à pied et cherche, bien entendu, à écarter toutes les charges qu'il juge accablantes pour lui.

 

En ce qui concerne les allégations qu'il fit immédiatement après le crime, Le Gall se montre très réservé.

Il ne voulut rien dire à propos des griefs qu'il imputa à sa femme.

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Le Gall au banc des accusés - Le Petit Parisien 19 octobre 1935.jpg
Le Gall nie avoir prémédité son crime.jpg

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Le Gall nie formellement avoir prémédité son crime, ce qui, en somme, surprend quelque peu.

Il aurait acheté son revolver le 2 février dernier, chez M. Chuto, armurier à Quimper, dans l'intention de se suicider.

 

Il vint alors à Morlaix pour se tuer devant la chambre de sa femme, qui s'était réfugiée chez ses parents,

Mme et M. Jaffrennou, rue de Brest.

 

Mais, comme nous l'avons dit, M. Jaffrennou avait fait changer toutes les serrures des portes de sa demeure.

Sans doute, avait-il de bonnes raisons de le faire.

Le Gall trouva donc tout fermé chez ses beaux-parents et n'insista pas davantage.

Il se rendit, en pleine nuit, à Locquénolé ; il s'assit sur le parapet bordant la rivière, au Bruby, et sortit son revolver.

Mais, à ce moment, il pensa à ses enfants, pour lesquels, d'ailleurs, il manifeste, chaque fois qu'il en parle, une affection qui paraît sincère.

Il revint donc à Morlaix, vers quatre heures du matin, alla se coucher dans une auto stationnant à Traon-ar-Velin, puis se rendit à l'Hôtel du Commerce, où il passa une partie de la matinée.

Il rentra à Quimper dans la journée ; il n'avait alors aucune idée de suicide et comptait réorganiser sa vie.

Il pensait venir s'établir à Morlaix avec sa vieille mère.

 

Le 7 février, les époux Le Gall vinrent en conciliation devant le président du tribunal de Quimper.

Le Gall remit à sa femme une lettre par laquelle il la priait de revenir sur sa décision et lui promettait de mener une vie droite et sérieuse.

Mme Le Gall demeura inébranlable.

Le même jour, dans l'après-midi, Mme Le Gall vint chez elle et, en présence de son mari, fit ses malles.

 

Le meurtrier précise alors qu'à ce moment-là, il aurait pu tuer sa femme, s'il l'avait voulu.

Il se sert, bien entendu, de cet argument pour écarter la préméditation.

 

Des difficultés s'étaient élevées entre les deux époux au sujet du partage du mobilier que le mari voulait vendre et que sa femme voulait conserver en partie.

 

Et l'on en arrive au drame.

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Le 21 février, jour du drame, Le Gall fit une visite à Me André, notaire à Quimper.

Celui-ci lui fit savoir que sa femme était venue à Quimper et qu'elle avait dû repartir pour Morlaix.

 

Le Gall, voulant avoir une dernière explication avec son épouse avant la rupture définitive, prit un taxi pour rattraper l'autocar S.A.T.O.S., qui avait quitté Quimper vers 17 h. 30.

Mais auparavant, il s'était rendu chez lui et, dans un tiroir, il avait pris de l'argent et le revolver dont il devait se servir peu après.

 

Le taxi dans lequel se trouvait Le Gall rejoignit l'autocar S.A.T.O.S. à La Feuillée.

Or, Le Gall affirme qu'en montant dans le car, il ne vit pas sa femme.

Ce serait la raison pour laquelle il se serait dirigé vers le fond du véhicule.

En cours de route, il voulut choisir une place à l'avant et ce fut à ce moment qu'il vint s'asseoir auprès de sa victime.

Le Gall demanda à sa femme de reprendre la vie commune et, sur le refus de celle-ci, il ne put se contenir.

Il sortit son revolver de sa poche et, à quatre reprises, il tira à bout portant sur sa compagne.

Son crime accompli, il voulut se suicider, mais se manqua.

Au sujet du nombre de balles tirées, Le Gall affirme qu’il a bien déchargé quatre fois son arme sur sa femme et une seule fois dans sa direction.

Il avait d'abord essayé son browning, à Quimper, dans son poulailler, pour vérifier son bon fonctionnement.

Il avait ainsi tiré une balle, si bien qu'au moment du drame, il n'avait pas eu besoin d'armer son revolver.

Le chargeur de l'arme était donc vide après le crime.

 

Le Gall, après ce long interrogatoire, prit le train de 18 heures pour Brest.

On ignore encore à quelle date aura lieu son prochain interrogatoire.

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Le drame du car Morlaix Quimper à l'instruction 13 mars 1935.jpg

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Source : La Dépêche de Brest 13 mars 1935

 

M. Rosec, juge d'instruction, avait convoqué hier matin, à 10 heures, dans son cabinet, Mme X..., première femme divorcée de l'assassin Le Gall.

Celle-ci déclaré qu'elle avait connu celui qui devait être son mari à L'Hôpital-Camfrout, où elle passait ses vacances.

Le mariage eut lieu le 18 juin 1914, puis le ménage vint s'établir à Quimper.

Quand la guerre éclata, Le Gall fut mobilisé et sa femme revint dans sa famille jusqu'à la fin des hostilités.

Après la guerre, les époux revinrent s'établir à Quimper, où ils avaient gardé leur appartement.

En 1921, naquit une fillette.

 

Mme X... vivait très heureuse avec Le Gall et n'eut aucun motif de se plaindre de lui jusqu'en 1922, époque à laquelle son mari fit la connaissance d'une demoiselle J..., de Quimper.

 

Mme X... apprit alors qu'elle était trompée par son époux, mais elle ne lui fit aucun reproche, dans l'espoir qu'il cesserait les relations qu'il entretenait avec Mlle J...

Soudain, sans qu'elle s'y attendît, Le Gall lança une procédure en séparation.

Mme X... obtint la séparation, bien entendu, à son profit, et avec une forte pension alimentaire.

 

Depuis ce moment, Mme X... s'était retirée dans sa famille, où elle éleva dignement son enfant.

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Madame X ne connaissait pas Mme Le Gall.jpg

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En ce qui concerne Mme Le Gall, malheureuse victime du drame, Mme X.. a affirmé qu'elle ne la connaissait pas, qu'elle ne l'avait jamais vue et qu'elle n'en avait jamais entendu parler.

 

Voilà qui mettra fin, espérons-le, à certains racontars que de mauvaises langues se plaisaient à colporter.

Mme X... a fait preuve, d'ailleurs, d'une grande charité en recueillant Mme Le Gall mère, son ancienne belle-mère, impotente, qui, avant le drame, vivait avec son fils et sa victime à Quimper.

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L'instruction de l'affaire.jpg

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M. Rosec, juge d'instruction, a adressé des commissions rogatoires dans diverses directions pour la recherche des antécédents de l'assassin Le Gall.

Par la suite, il lui fera subir un interrogatoire serré et critiquera ses premières déclarations.

 

Le Gall comparaîtra aujourd'hui, à Morlaix, devant le magistrat composant la chambre du conseil, pour une prolongation de détention.

 

On sait qu'un projet de loi, portant modification de la loi du 7 février 1933, sur la liberté individuelle — qui était en réalité une véritable loi de protection des malfaiteurs — a été adopté par le Sénat, il y a plusieurs mois.

Ce projet de loi, voté la semaine dernière à la Chambre, n'a pas encore paru à l'Officiel.

C'est pourquoi Le Gall devra être conduit aujourd'hui devant la chambre du conseil.

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Source : La Dépêche de Brest 14 mars 1935

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Le drame du car Morlaix Quimper 14 mars 1935.jpg

 

Source : La Dépêche de Brest 19 octobre 1935

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Lien vers la Dépêche de Brest

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Source : La Dépêche de Brest 20 octobre 1935

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Lien vers la Dépêche de Brest

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Le Gall Assises 2.jpg
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