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Fenêtres sur le passé
1928
Nos palais scolaires - L'école de Tréouergat
Sources :
Bulletin du Syndicat du Finistère - Fédération des membres de l’Enseignement laïque - octobre 1927
La Dépêche de l'Aube 28 mars 1928
1928 - Palais scolaires, l’école de Tréouergat
Le poste déshérité des postes déshérités.
Je me rends au Bourg par un chemin vicinal défoncé, raboteux, le seul d’ailleurs.
Après 6 kilomètres de danse sur les cailloux et dans les ornières,
j’arrive dans le village qui comprend une « cathédrale » toute neuve et un presbytère à un étage avec cinq fenêtres
de front, grand bâtiment pour le curé célibataire ; cinq ou six maisons complètent la « capitale ».
Pas de cabinets ; avant de rentrer garçons et filles s'alignent ;
je n'interroge pas l'institutrice, mais je suppose qu'elle doit aussi circuler à travers champs.
Il y a trente uns que la construction d'une école neuve est décidée,
votée, les plans sont faits, on peut les voir.
Quand passera-t-on à l'exécution ?
On ne blanchit pas les classes.
La commune est pauvre, si pauvre qu'on a construit en 1902
une église toute neuve, sculptée, avec des arcs boutants découpés.
L'an dernier encore, on achevait le clocher garni de dentelle de pierre :
coût quarante-cinq mille (45.000 francs).
Des vitraux tout neufs flamboient aux baies, coût cinq mille francs.
Si on parlait d’une école libre, on trouverait cent mille, deux cent mille francs, mais pour l’école publique, il n’y a rien...
La Fédération des membres de l’Enseignement laïque
Je demande l’école.
On m’indique la plus vieille, la plus délabrée des maisons.
L’institutrice, mariée et mère de deux enfants nous reçoit.
Ce n’est pas une école d’avant la République.
Lavisse n’a pas trouvé ça pour avant 1789.
Avant Charlemagne, peut-être.
Une affreuse turne, basse de plafond, aux boiseries pourries,
mangée par l’humidité et les champignons,
deux petites fenêtres disloquées, voilà le « Palais Scolaire ».
On passe au logement : une seule pièce.
Si la classe est horrible, le taudis où habitent l’institutrice
et ses deux enfants est sordide.
Le planché est troué ; au-dessus dans un grenier, rats et souris dansent.
Tout cela est pourri, vermoulu, les boiseries n’ont jamais vu la peinture,
et ont pris la teinte sombre et atroce des vieux bois
que l’on ne voit que trop souvent dans nos écoles.
Je touche presque le plafond.
Pas de jardin, pas de cour, par d’eau ?
Il faut faire deux cents mètres pour en trouver dans une mare,
au milieu d'une prairie marécageuse.
Ernest Lavisse,
né au Nouvion-en-Thiérache
le 17 décembre 1842
mort à Paris le 18 août 1922,
historien français,
fondateur de l'histoire positiviste,
manueliste, auteur des nombreux
« manuels Lavisse ».
Chantre du « roman national »
au service de l'histoire
et de son enseignement,
il a contribué à répandre des images
et une mythologie qui sont restées gravées dans la mémoire de générations d'écoliers. Ainsi la phrase inscrite dans le fameux
petit manuel d'histoire et rapportée
par Michel Vernus :
« Tu dois aimer la France,
parce que la Nature l'a faite belle,
et parce que
l'Histoire l'a faite grande. »