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Fenêtres sur le passé

1926

Les relations téléphoniques des îles avec le continent

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Source : La Dépêche de Brest 15 juin 1926

 

Quand il vente en tempête, quand les vagues, furieusement dressées, se ruent sur tous les obstacles comme pour les détruire, on songe aux marins en péril, on songe aussi à ceux que le sort a fixés au milieu de cette mer en courroux, sur des rochers qui ne les garantissent pas toujours contre les violences de l'océan.

 

On se rappelle à quelles inquiétudes étaient, en proie tous ceux qui s'intéressent à l'existence des habitants

de l'île de Sein quand, en janvier 1924, se produisit le raz de marée qui dévasta les côtes de l'Atlantique.

 

Les jours se succédaient sans que l'on pût savoir ce qui se passait sur l’île.

On se rappelait comment, après bien d'autres événements du même genre, la mer, en 1912, avait submergé les quais, les maisons, les champs ;

comment les flots déferlant dans les ruelles, y roulaient les embarcations et les engins de pêche.

Et l'on se demandait si le drame ne recommençait pas.

 

Les communications télégraphiques avaient été coupées et il fallut attendre pendant dix-huit jours que la mer se fût suffisamment calmée pour permettre au sloop, qui assure le service avec le continent, d'entreprendre la traversée du Raz de Sein.

 

L'alerte avait été vive, mais n'avait fort heureusement pas eu de trop graves conséquences.

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Bientôt, les relations télégraphiques, qui avaient été interrompues sur la côte même, pouvaient être rétablies.

Le câble, sous-marin rattachant Sein à Audierne et aboutissant sur le continent à Plogoff, dans la baie des Trépassés, n'avait pas souffert.

On venait d'apprécier son importance.

On l'apprécierait davantage encore si un jour les îliens se trouvaient menacés ou si des marins en péril avaient besoin de secours plus importants que ceux que peut fournir l’île.

 

Or, aujourd'hui, n'importe quelle tragédie pourrait se dérouler dans l'île aucun appel ne parviendrait au continent.

 

Le câble sous-marin est rompu !

 

Il l'est depuis des mois et des mois, et toutes les protestations des intéressés n'ont servi à rien.

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En matière de télégraphie, Ouessant connaît tous les perfectionnements.

Dès 1903, le savant spécialiste qu'était M. Tissot avait été chargé par la Marine d'y établir un poste de T. S. F.

La merveille du moment n'en était encore qu'aux installations qui semblent aujourd'hui rudimentaires.

Le décohéreur de Branly, à la limaille de fer, était en usage.

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Édouard Branly

En 1905, la Marine cédait ce poste aux P. T. T.

Quelques années après, on découvrait les détecteurs (galènes, électrolytiques) qui permirent une plus grande sensibilité et une plus grande vitesse de transmission.

Puis les inventeurs apportèrent, pendant la guerre, de nouvelles et importantes améliorations, telles que les amplificateurs à lampes.

 

Ouessant avait été le premier poste à grand rayon d'action.

 

Déjà, l'île était reliée au continent par deux câbles :

L'un partant directement de Lampaul-Plouarzel au Stiff ;

l'autre partant de la baie de Trézien, près de la pointe de Corsen et passant à Molène pour rejoindre le Stiff.

 

Traversant l'île, des lignes aériennes joignent le Stiff au Créach, d'où les guetteurs sémaphoriques signalent

chaque jour à Brest leurs observations météorologiques, ainsi que le passage des navires.

 

Au bourg de Lampaul, se trouve la bureau de l'administration des P.T.T, à l'usage du public.

 

La station de T. S. F., en permanentes relations avec les navires, devant emprunter également les câbles pour communiquer avec le continent, il s'ensuivait parfois certain embouteillage qui déterminait des retards pouvant avoir les plus graves conséquences quand il s'agissait de la transmission d'un appel de détresse.

 

Un Inspecteur de l'administration M. Pierre Picard, découvrit un dispositif qui permettait d'effectuer simultanément deux transmissions sur un même câble.

Grâce à lui, tandis que la sémaphore ou le bureau public correspond avec Brest en courant continu,

la station de T. S. F. peut emprunter la même voie au même moment en utilisant, un courant vibré.

 

Ainsi, avec ce procédé, on a pu faire l'économie d'un câble.

Un poste de secours.jpg

Mais les câbles sous-marins se rompent parfois.

L'exemple fourni par celui de l'île de Sein le démontre.

Les difficultés du parcours de Molène à Ouessant causent également d'assez fréquentes interruptions.

 

Pour pallier aux inconvénients qui résultent d'accidents de ce genre, un petit poste de T. S. F., dit de secours,

a été installé, dans les mansardes du vieil immeuble de la rue Jean Macé, qui sert de. central téléphonique,

M, Pisquet, ingénieur des P. T. T., qui dressa tant de ces postes en montagne où la neige comme le froid

causent la chute des lignes aériennes, a ainsi relié Brest à Ouessant.

 

Et lorsque l'utilisation des câbles est devenue impossible, il se sert de ce poste de secours.

Depuis 1922 ouessant et batz.jpg

Ainsi, Ouessant se trouve desservie de façon parfaite au point de vue télégraphique.

Mais, en raison de l'importance de l'île, nous n'en avons pas moins déploré souvent qu'elle ne fût pas reliée téléphoniquement au continent.

Nous avons exposé quelles difficultés en résultaient pour la population en général et pour les commerçants en particulier.

 

Dans sa séance du 20 septembre 1922, le Conseil général l'entendait exposer également de la façon suivante!

 

« Ouessant, avec ses 3.000 habitants, est un des rares cantons de France qui ne soit pas pourvu du téléphone ;

les relations commerciales entre l'île et le continent ne peuvent se faire que par correspondance

et que deux fois par semaine ;

le vapeur postal, porteur du courrier, n'accostant cette île que la mardi et le vendredi, il s'ensuit qu'un simple échange de lettres avec le chef-lieu d'arrondissement demande huit Jours, quoique en répondant par retour du courrier.

Dans ces conditions, le commerce de l'île avec le continent se trouve complètement paralysé, et il est superflu d'insister sur l'intérêt que présente la liaison demandée. »

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Navire câblier Pierre Picard - 1913

Du même coup, on constatait « que l'île de Batz, avec son importante population, se trouve dans les mêmes conditions d’isolement que l’île d'Ouessant. »

 

Et le Conseil général, qui s'est toujours montré très favorable à la diffusion du téléphone, décidait de contracter un emprunt dans lequel figurait le câble d'Ouessant pour 330.000 francs et celui de l'île de Batz poux 60.000 francs.

 

En 1922, les crédits nécessaires étalent donc votés :

En 1926, cabines et circuits terrestres établis, on attend encore la pose des câbles.

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Le service des câbles sous-marins qui a pour base La Seyne, dispose de deux navires.

 

L'un, l'Émile Baudot, de construction récente, ne quitte guère la Méditerranée.

 

L'autre, la Charente, antique transport transformé en câblier, opère quand il peut dans la Manche et l'Atlantique.

Il se trouve en réparations depuis un long moment au Havre.

 

Il doit, dit-on, se rendre à Sein, cette année, pour procéder au, relevage et à la réparation du câble.

Souhaitons qu'il n'y ait pas d'empêchement !

 

Mais, comme ses visites dans nos parages ne sont, pas très fréquentes,

ne pourrait-il ensuite effectuer la pose des câbles tant attendus dans les autres îles ?

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