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Fenêtres sur le passé
1906
Le Clergé Breton

Exemple.
Il y a quelque temps, au village de Mahalon, près Pont-Croix,
un tailleur perd sa femme et va demander au curé un enterrement convenable.
Source : La Calotte novembre 1906
Le Clergé Breton
Un écrivain catholique, M. Augustin de Croze vient de dresser
dans la Revue le plus formidable et le plus documenté réquisitoire
contre le clergé breton.
Il le montre ignorant et paresseux, attaché aux superstitions,
et surtout âpre au gain :
Il va de soi que là-bas, comme dans tout le reste de la France,
le clergé fait commerce de la publication des bans, des messes de mariage.
Ça rentre dans le casuel.
Et, comme partout, il fait payer le plus cher possible pour les enterrements.
Mais il y a parfois des récalcitrants.

Augustin de Croze

Huit jours après, le tailleur s'enquiert de ce qu'il doit.
Stupeur : Cinquante francs, a répondu l'abbé !
Craignant un scandale et respectueux de autrou person (monsieur le curé),
le tailleur s'exécute.
Mais, un mois plus tard, le prêtre appelle le tailleur et lui commande
un ouvrage pressé ;
notre homme se met aussitôt à la besogne et toute la journée,
à l'ahurissement du recteur et de la servante, chante et siffle à perdre haleine.
Le soir venu, l'ouvrage est terminé, le curé, satisfait, demande ce qu'il doit.
Cinquante francs, fait l'autre, doucement.
Hein ! Vous plaisantez ?

Mon Dieu ! Monsieur le curé, pour avoir chanté pendant une heure à l'enterrement de ma pauvre femme,
vous m'avez demandé cinquante francs.
Moi, j'ai travaillé toute la journée et je n'ai pas arrêté de chanter, alors, ça vaut bien cinquante francs,
et vous ne voudriez pas aller au juge de paix pour ça !
Le prêtre comprit et paya.
Le clergé de Cornouaille ne dédaigne nullement de tenir des hôtels.
Les religieuses tiennent depuis vingt-huit ans, à Saint-Quay-Portrieux, un hôtel très fréquenté, qu'elles ont fait bâtir sur l'emplacement
d'un ancien cimetière.
À Saint-André-en-Pléneuf, près de Saint-Brieuc, à Saint Gildas-du-Rhuys, à Trègastel, il en est de même : hôtels tenus par des sœurs.
Au pied du Calvaire
Comme au bon vieux temps

(au « bon vieux temps » pour les seigneurs et les moines), le clergé de Cornouaille prélève la dime sur les récoltes
et les produits des fermes !
« Les curés ou les vicaires procèdent en personne à cet impôt extraordinaire et vont de porte en porte,
suivis de porteurs de sacs ou de paniers, en lesquels s'empilent, soit le beurre et les œufs, soit des grains, du blé,
de la volaille, du lard, des pommes de terre et même des crins de cheval ou des queues de vache,
faciles à vendre aux bourreliers. »
A Plougouven, très riche commune de Gouvin, le clergé fait tous les ans deux quêtes, étonnamment productives et vendues au pied du Calvaire,
la première, en mai, pour le beurre, la seconde, pour le blé,
tout aussitôt la moisson terminée.
Un voiturier de Châteaulin, qui eût à travailler pour le curé,
certifia à M. Croze que, l'an dernier, à Quimerc'h,
le presbytère envoya à la minoterie, 5,000 livres de blé.
À Lopèrec, les paysans paient de 10 à 13 francs l'honneur de porter,
au Pardon, la croix processionnelle.
Au Kergoat, cet honneur (!) n'est pas tarifé,
mais les privilégiés font des cadeaux au curé.
Nous parlerons à peine des cierges tenus aux processions,
et qui constituent pour le clergé une source de revenus considérables.
Sachez seulement qu'un cierge de quarante sous rapporte
douze ou quinze francs à la cure.
Le Pardon de Saint-Herbot est d'un beau revenu
pour le recteur de Plonèvez-du-Faou.
Les fidèles offrent des crins de vache ou de cheval et du beurre ;
ces offrandes sont si nombreuses que leur vente, au profit de l'église, atteint parfois 4,000 francs.


À Karnac, on offre à Saint Cornély, invoqué contre les maladies des troupeaux, un grand nombre d'animaux que le curé vend ensuite aux enchères.
Les paysans de Saint-Corentin-en-Ploéven offrent des poulets et des crins qui,
vendus au pied de la croix (toujours !) rapportent de 500 à 1,000 francs au curé.
Il y a tout lieu de penser que le casuel de ce bon pasteur ne s'arrête pas à ce chiffre, assez enviable déjà.
De ces volailles, de ces grains, de ces crins de cheval, de ces queues de vache, de ces cierges,
le clergé garde le nécessaire pour les besoins du presbytère.
Le surplus est vendu soit aux enchères publiques, soit directement aux marchands en gros.
Telle est, résumée fidèlement, un peu sèchement peut être tant la documentation y abonde,
l'étude de M Augustin de Croze.
L'auteur laisse au lecteur le soin de conclure.
Nous ferons comme lui.