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Fenêtres sur le passé
1906
Dangereux malfaiteur à la Trinité Plouzané
Source : La Dépêche de Brest 7 juillet 1906
Nous avons raconté, dans notre dernier numéro un vol d'une certaine importance commis,
dans la nuit de lundi à mardi, au préjudice de M. Tromelin, au Buis.
Pour pénétrer dans la maison, qui était inhabitée, le voleur a passé par le soupirail de la cave
et a enlevé des litres de vin et d'alcool.
Les appartements du premier étage ont également été visités, et les meubles fracturés.
Le voleur est Alain Colin, surnommé « l'Oiseau bleu », 36 ans, originaire de Lambézellec, retraité de la marine, demeurant à Saint-Pierre Quilbignon.
Colin s'est livré à de nouveaux exploits près de la Trinité.
Dans son expédition nocturne de lundi, Colin s'était emparé d'un revolver et de cartouches Mercredi matin,
vers 5 h. 30. Colin, armé de son revolver et de munitions, quittait le bourg de Saint-Pierre,
et s'acheminait sur la route du Conquet.
Il s'arrêta à Coatuélem, chez Mme Floch, 39 ans épicière et débitante,
et déposa plusieurs litres de vin et d'alcool, produit du vol de lundi.
Colin but plus que de raison et il quitta le débit dans une surexcitation extrême.
Tenant son revolver chargé, il le brandissait et menaçait les personnes qu'il rencontrait.
Vers 7 h. 30, il revint dans le débit de Mme Floch, où il absorba encore une certaine quantité d'alcool.
La débitante tremblait de tous ses membres à la vue du revolver que brandissait son client.
Colin appuya sur la détente de l'arme, et une balle alla se loger dans le comptoir de l'épicerie.
La débitante n'osa le faire sortir, dans la crainte de représailles.
Enfin, le forcené quitta le débit et se dirigea vers la Trinité.
Il voulut, au passage d'un tram se jeter sous le véhicule.
Tenant toujours son revolver de la main droite, il rencontra, à environ un kilomètre du hameau de la Trinité,
le soldat Louis Quéinnec, 23 ans, de la 11e batterie du 2e régiment d'artillerie coloniale, détaché au fort du Minou,
qui se rendait à Brest à bicyclette.
Arrivé à quelques mètres du cycliste, Colin braqua son revolver vers le militaire et fît feu par trois fois en disant :
« Celui-ci est à moi ! »
Par bonheur, le cycliste ne fut pas atteint.
Il s’empressa de rebrousser chemin de toute la force de ses jarrets.
Plusieurs fillettes se rendant à l'école de la Trinité avaient assisté à cette scène,
mais aucune d'elles ne fut atteinte par les projectiles
Le soldat Quéinnec, encore sous le coup d'une vive émotion, rencontra, près de la Trinité, un cultivateur,
François Gilot, du Conquet, conduisant une voiture à un cheval et se dirigeant vers Brest.
Le cycliste le mit au courant de ce qui venait de se passer et demanda à monter dans le véhicule, ce qui lui fut accordé.
La bicyclette fut également déposée dans la voiture, et l'attelage continua son chemin.
Bientôt, l'on rencontra Colin, qui rechargeait son arme, mais cette fois il ne se livra à aucune menace.
Le cycliste mit bientôt pied à terre, enfourcha sa bicyclette et fila à toute vitesse sur Brest.
À Saint-Pierre Quilbignon, il rencontra le commandant du détachement, M. le capitaine d'artillerie Guéguen.
L'officier conseilla au soldat de porter plainte à la gendarmerie.
Sur ces entrefaites, apparurent les gendarmes Garin et Yves Paul, de la caserne de la rue Portzmoguer,
en tournée dans la commune.
Le militaire leur conta la lâche agression dont il avait été victime, et donna le signalement du meurtrier.
À la recherche du forcené
Les gendarmes Garin et Paul décidèrent de se mettre à la recherche du coupable, et se dirigèrent vers La Trinité.
L'expédition était dangereuse, en raison de l'état d'esprit de Colin, qui était armé.
Les représentants de la force publique commençaient leur enquête dans le débit de Mme Floch,
lorsqu'ils furent avertis que Colin se dirigeait vers ledit débit pour consommer ce qui lui restait de litres de vin volés.
Arrestation mouvementée
Mme Floch laissa les deux gendarmes seuls dans le débit.
Colin, qui a déjà été arrêté et condamné plus d'une fois, exècre les gendarmes.
Lorsqu'il les aperçut, il s'écria: « Oh ! les vaches ! »
En même temps, il saisissait son revolver pour tirer sur eux.
Il n'en eut, heureusement, pas le temps.
MM. Garin et Paul, au courage desquels il faut rendre hommage,
se jetèrent sur lui et réussirent, après une lutte acharnée, à maîtriser Colin, qui fut désarmé.
La nouvelle de son arrestation produisit un vif soulagement dans la commune, où il était très redouté.
Le revolver est du calibre de 9 mm, à six coups.
Il contenait cinq balles et une douille.
De plus, les gendarmes ont trouvé sur Colin sept cartouches et quatre douilles.
Colin a donc tiré cinq coups de revolver, dont trois sur le cycliste.
Sur qui a-t-il tiré les deux autres ?
Solidement tenu par MM. Garin et Paul, le meurtrier fut dirigé sur Brest.
En cours de route, il déclara aux gendarmes qu'il regrettait bien de n'avoir pu tirer sur eux.
Colin, incarcéré à la prison du palais de justice, y mena un tel vacarme que l'agent Gallic, du service des prisons,
dut intervenir à diverses reprises.
Colin demandait une corde pour se pendre.
M. Tromelin s'est présenté au greffe du tribunal, où il a reconnu le revolver saisi sur Colin comme lui appartenant.
En terminant, nous renouvelons toutes nos félicitations aux courageux gendarmes Garin et Yves Paul,
qui n'ont pas craint d'exposer leur vie pour délivrer les habitants des communes de la Trinité et de Plouzané
d’une terreur bien justifiée.
Source : Le Finistère octobre 1906
Assises 22 octobre 1906
Dans la matinée du 4 juillet dernier, le soldat d’artillerie coloniale Quéinec, détaché au fort du Minou, se rendait,
à bicyclette, à Brest, pour un service de correspondance
dont il était chargé.
En arrivant, vers 7 heures 30 du matin, au hameau de la Trinité, en Plouzané, il fut surpris de voir la route déserte et toutes
les maisons closes ;
une femme, qui se trouvait sur le seuil de sa porte,
lui en donna l’explication, en lui disant qu’il y avait, sur la route, un individu qui menaçait les gens avec un revolver.
Obligé de faire son service, Quéinec poursuivit son chemin ;
à 250 mètres environ de là, il aperçut, au milieu de la route, un individu qui,
lorsqu’il ne fut plus qu’à une vingtaine de mètres de lui, braqua un revolver dans sa direction, en s’écriant :
« En voilà un qui est à moi! »
Et il fit feu à trois reprises.
Quéinec, heureusement, ne fut pas atteint.
Il signala, une heure après, le fait à deux gendarmes de Brest, qui surent que l’individu en question,
nommé Alain Colin, âgé de 36 ans, sans profession ni domicile, était entré, ce matin-là, au débit Floch, à Coatuélen, en Plouzané, et y reviendrait sans doute chercher deux bouteilles qu’il y avait laissées.
Ils l’y attendirent, et se précipitèrent sur lui au moment où il franchissait le seuil,
avant qu’il pût faire usage de son revolver, qu’il avait braqué sur eux, en s’écriant : « Ah ! les vaches ! »
L’arme était encore chargée, et Colin avait dans ses poches sept cartouches à balle, plus des étuis vides.
L’information ouverte contre Colin fit découvrir que le revolver trouvé en sa possession provenait d’un vol commis
au Moulin-du-Buis, en Saint-Pierre-Quilbignon, au préjudice
du sieur Tromelin, dont on avait dévalisé la maison.
À la double inculpation relevée contre lui, Colin a opposé des dénégations obstinées.
Il nie avoir tiré des coups de revolver et prétend avoir acheté cette arme à deux individus inconnus.
II a été trouvé en possession d’une partie du surplus des objets volés, soit une bouteille de vin et une de cognac,
et d’une somme d’argent correspondant à celle dont la soustraction a été constatée.
Colin est un malfaiteur des plus dangereux, très redouté dans les environs de Brest, où il rôde constamment.
Il a déjà encouru 44 condamnations et est passible de la relégation.
Reconnu coupable de tentative de meurtre avec l'admission de circonstances atténuantes,
Colin est condamné à six ans de réclusion et à la relégation.
Ministère public : M. le substitut Roman.
Défenseur : Me Hamon.
Bagne en Guyane