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1906
Meurtre d'une jeune couturière à Coat-Méal
Source : La Dépêche de Brest - Samedi 8 Septembre 1906
La paisible population du petit bourg de Coat-Méal, située à huit kilomètres de Lannilis, et comprenant
636 habitants, vient d'être le théâtre d'un drame mystérieux que la justice essaie de pénétrer.
Une jeune couturière a été assassinée dans un petit chemin, sans que l'on puisse établir le mobile du crime.
Dès que nous avons appris le drame nous ; nous sommes transporté sur les lieux.
Descendu du train départemental à Gouesnou, point le plus rapproché de Coat-Méal,
il nous faut faire dix kilomètres à bicyclette pour être sur les lieux du crime.
La victime
La victime est une jeune fille de 24 ans, Françoise Gouriou.
Ses parents tiennent au bourg même de Coat-Méal, sur la place, un commerce de vins, d'épicerie et de tabacs.
La famille se compose du père, de la mère, et de quatre enfants.
C'est la cadette qui a été tuée.
La fille aînée est mariée.
La famille Gouriou, très laborieuse, est estimée dans la commune.
Aussi ne peut-on s'expliquer le crime qui met en deuil ladite famille.
En journée
Jeudi matin, vers sept heures, Françoise Gouriou, couturière, quittait le domicile de ses parents pour aller travailler chez un cultivateur de Ker-na-Ouzoun, M. Le Guen.
Cette ferme est située à environ trois kilomètres du bourg de Coat-Méal.
Pour s'y rendre, la jeune fille prit des chemins de traverse afin d'arriver plus vite.
La journée se passa très bien, et vers 6 h. 30 la victime quittait la ferme, après avoir reçu de ses patrons la somme de 1 fr. 95 pour prix de son travail.
Pour s'en retourner chez elle, elle suivit le même trajet qu'à l'aller.
C'est au déclin du jour qu'elle a été frappée mortellement.
Par qui, où et comment ? Mystère.
La découverte du cadavre
Pendant toute la journée, M. Adam, cultivateur au bourg, a travaillé, avec deux domestiques, dans un champ situé à quelques mètres du crime.
Occupés à semer du trèfle rouge, ils n'ont perçu aucun bruit, sinon celui des pas d'une personne marchant dans le sentier qui borde le champ,
au lieu dit Pen-ar-Roat, à 47 mètres de la route de Coat-Méal à Saint-Renan.
Leur besogne terminée, il était alors environ 7 h. 30, M. Adam et ses domestiques attelèrent un cheval à une charrette pour regagner leur domicile situé,
comme nous l'avons dit, au bourg de Coat-Méal, distant du champ de 300 mètres.
Soudain, le conducteur aperçut dans le sentier le corps d'une femme qui barrait complètement la route.
Le véhicule arrêté, les trois hommes s'approchèrent de la femme, qui était morte ; le corps était légèrement couché sur le côté droit,
et la tête reposait sur un petit talus.
Une flaque de sang était visible près du corps de la femme,
qu'ils reconnurent aussitôt.
Un des cultivateurs prévint aussitôt le père de la victime, qui accourut.
Le pauvre homme ne put que constater le décès de sa fille.
La nouvelle du crime se répandit vivement dans le bourg et provoqua une sorte de terreur, attendu qu'on ne sait
à quel motif attribuer ce meurtre.
M. Adam dut renoncer à sortir du chemin avec son véhicule, qu'il abandonna après avoir conduit
le cheval à l'écurie.
Mais la nuit vint jeter un voile sur ce triste tableau.
On alluma des lanternes en attendant l'arrivée du maire de la commune,
que M. Ménez, secrétaire de la -mairie, était allé prévenir.
Le maire, M. de Blois, qui depuis 28 ans administre la commune de Coat-Méal, habite son château,
situé à quatre kilomètres du bourg.
Il fit immédiatement atteler et, une demi-heure plus tard, c'est-à-dire vers 8 h. 30, il était sur les lieux du drame.
Les constatations
M. de Blois procéda, à l'aide de lanternes, à une minutieuse constatation.
Les vêtements de la victime étaient en ordre.
La figure était calme ; aucune contraction des muscles ne fut relevée.
A la suite de cet examen, le maire conclut qu'il n'y avait pas eu de lutte, et de là l'hypothèse du viol fut éliminée.
Après avoir examiné la blessure, M. de Blois fit transporter la victime chez ses parents, qui, on le comprend,
sont dans la désolation.
Le sang a abondamment coulé de la blessure ; les vêtements de la jeune fille sont absolument trempés.
Elle a dû porter la main droite sur la blessure pour essayer d'arrêter l'hémorragie,
car le sang a coulé le long de son bras.
La main gauche est également maculée, ainsi que les ciseaux attachés par une chaîne à sa ceinture.
L'enquête
On est ici en plein mystère.
Le brigadier Bogouin et le gendarme Bemier, de la brigade de Plabennec, ont procédé à la première enquête.
Prévenus le soir même du crime par M. de Blois, le lendemain matin, à la première heure,
ils enfourchaient leur bicyclette pour franchir les 11 kilomètres qui séparent Plabennec de Coat-Méal.
Dès leur arrivée dans cette localité, ils se mirent en campagne.
Malgré toute leur vigilance à rechercher l'assassin, ils n'ont pu, comme nous, réussir qu'à se procurer
de vagues renseignements.
Ils ont inspecté l'emplacement où a été découvert le cadavre ; des cailloux avaient été disposés
pour indiquer la position.
Les champs et buissons des alentours ont été fouillés pour essayer de trouver l'arme avec laquelle
le meurtrier a frappé.
Ces recherches sont demeurées infructueuses.
Ce meurtre n'a pas eu le vol pour mobile, attendu que !a somme de 1 fr. 95 a été trouvée
en possession de la victime.
Mais alors, quelle hypothèse choisir : la jalousie ?
La victime, d'une conduite irréprochable, n'avait pas d'intrigues connues.
Il y a quelque temps, elle avait reçu d'un matelot, originaire de Guilers, quelques lettres d'amitié.
Mais, depuis longtemps, ce matelot n'a pas paru dans le pays.
Mardi dernier, un individu du nom de B..., était rentré dans le débit Gouriou et avait absorbé une consommation servie par la victime, qui était seule au comptoir.
Un dialogue s'engagea entre les deux jeunes gens, puis B... pria la jeune fille de vouloir bien garder son livret militaire pour qu'il ne soit pas mouillé, disait-il.
En effet, l'individu était trempé par une averse qu'il avait dû recevoir sur la route.
Le dépôt de ce livret avait paru étrange, à la mère de la victime, qui en fit la remarque à B…
Celui-ci répliqua : « Vous n'avez pas peur moi, je suppose ! »
Et la mère de répondre : « Oh ! non. »
Puis l'individu partit et, depuis, il n'a pas reparu au débit Gouriou, qu'il fréquentait assez souvent,
et où se trouve toujours son livret,
On nous dit aussi que dans la journée du crime, deux journaliers, domestiques de ferme,
avaient fait la fête ensemble, au bourg.
Ils se séparèrent vers sept heures, et l'un d'eux, se voyant refuser à boire dans tous les débits,
alla se coucher dans un champ.
Son camarade serait, lui, parti pour Guipronvel.
D’autre part, un individu, portant un panier aurait été vu assis sur le bord de la route,
à l’heure et à proximité du lieu du meurtre.
Nous ne pouvons, bien entendu, qu’enregistrer ces déclarations, sans accuser qui que ce soi,
soin que nous laissons à la justice.
Descente du parquet
A 2 h. 15 arrivent, en voiture, MM. Rougier juge d'instruction suppléant, le docteur Mahéo et M. Laurent,
secrétaire du juge d'instruction.
Ces messieurs se rendent a la mairie, où les attendent M. de Blois et les gendarmes charges de l'enquête.
Le maire fait un rapide portrait du meurtre puis le parquet se rend au domicile de la victime.
L’autopsie
Pendant que M. Rougier commence, à la mairie, l'instruction de cette affaire, le docteur Mahéo procède
à l'autopsie de la victime.
Le meurtrier s'est servi d'une arme pointue et tranchante.
Le coup a été porté avec une violence extrême.
Le cœur a été percé de part en part, d'où mort instantanée.
Les ciseaux, le corsage et la chemise de la victime ont été saisis.
La rapidité du crime
Nous avons dit, plus haut, que vers 7 h. 30, le cultivateur Adam et ses deux domestiques, en quittant le champ
où toute la journée ils avaient été occupés, avaient trouvé le cadavre dans le chemin de Pen-ar-Roat.
Or, cinq minutes avant leur passage dans ledit chemin, la femme Branellec, couturière, demeurant au bourg de Coat-Méal, avait passé par là sans remarquer rien d'anormal.
De l'endroit du meurtre à son domicile, elle a mis cinq minutes à franchir cette distance.
C'est donc dans cet -intervalle que la fille Gouriou a été tuée.
La victime n'a pu crier, foudroyée qu'elle fut.
Si elle avait pu appeler au secours, le cultivateur Adam et ses domestiques se seraient sûrement
portés à son secours.
L'émotion dans le pays
Comme bien l'on pense, l'émotion est considérable dans la commune.
Une terreur légitime s'est emparée des huit ou neuf couturières du bourg,
qui fréquemment se rendent en journée chez divers fermiers de la commune.
Deux individus soupçonnés
Au moment où nous quittons le bourg, le brigadier Bégouin et le gendarme Bernier arrivent de Guipronvel,
où ils ont invité un domestique de ferme, un de ceux dont il est parlé plus haut, à se rendre à Coat-Méal.
Ce domestique â été trouvé porteur d'un couteau d'assez grande dimension.
M. Rougier, juge d'instruction, l'a interrogé, ainsi que son camarade soupçonné,
mais ce dernier parait être atteint d'aliénation mentale.
Après le meurtre, l'un des inculpés, voyant le curé de Coat-Mêal appuyé sur le mur du cimetière,
s'approcha de lui et dit : « J'ai quelque chose à vous dire, mais c'est un secret. »
Le curé, ignorant le meurtre, n'écouta pas l'individu, qui s'éloigna.
Les obsèques de la victime auront lieu aujourd'hui.
Nous continuerons notre enquête sur cette mystérieuse affaire.
Source : La Dépêche de Brest - Dimanche 9 Septembre 1906
Les obsèques de Mlle Françoise Gouriou ont eu lieu hier, à deux heures du soir.
Presque tous les habitants de la commune avaient tenu à assister aux obsèques,
témoignant ainsi leur sympathie à la famille éplorée.
Il faut dire qu'hier c'était fête dans toutes les communes, à l'occasion de la Nativité.
Dès une heure, la place du bourg présente une animation extraordinaire.
A deux heures exactement, M. le curé Inizan fait la levée du corps, au milieu de l'émotion générale.
Tous les hommes sont découverts.
Le cercueil est porté par six jeunes filles, qui pleurent à chaudes larmes.
Le père de la victime conduit le deuil avec ses deux fils.
En tête des hommes marche M. de Blois, maire de la commune.
Les femmes sont également très nombreuses, et un certain nombre d'entre elles sont vêtues
d'un grand manteau noir de deuil.
Le glas sonne sans discontinuer.
Le cortège pénètre dans l'église, située à environ 50 mètres du domicile de la victime.
Après le service funèbre, le cercueil est déposé devant l'assistance, dans le cimetière qui entoure l'église.
Hommes et femmes, très émus, défilent ensuite devant le cercueil, à proximité duquel, agenouillés,
les parents de la victime sanglotent.
Cette profonde douleur émeut beaucoup les assistants.
A trois heures, la cérémonie est terminée.
Recommandations du maire
A l'issue de l'enterrement, M. de Blois, maire de Coat-Méal, s'est rendu à la mairie.
D'une des fenêtres du local, il a fait aux cultivateurs présents aux obsèques une allocution en breton.
Le maire a d'abord causé du crime lui-même, qu'il a qualifié de monstrueux.
Il est persuadé que Dieu ouvrira les portes du paradis à la victime.
M. de Blois a ensuite parlé des mesures à prendre en présence de ce malheur.
Il a recommandé aux cultivateurs et fermiers de ne plus, autant que possible,
garder de jeunes filles couturières après le déclin du jour.
M. de Blois a rassuré la population, en déclarant que la justice saura trouver et punir le coupable.
L'enquête
La gendarmerie continue à recevoir de nouvelles déclarations, mais rien de sérieux n'a transpiré jusqu'ici.
Avant-hier soir, M. Rougier, juge d'instruction, est resté sur les lieux du meurtre jusqu'à sept heures du soir,
c'est-à-dire la tombée de la nuit.
Installé dans la mairie, il a successivement interrogé, en présence de M. de Blois, deux journaliers,
Abernot et Coum, sur lesquels planaient des soupçons.
Le premier, âgé de 60 ans, donne fréquemment des signes de troubles cérébraux ; quand au second,
qui est âgé de 55 ans, il habite Guipronvel, village situé à quatre kilomètres du bourg de Coat-Méal.
Ce dernier s'adonne à la boisson quand il a de l'argent.
Employé comme journalier, il n'est rétribué que par sa nourriture.
Or, le jour du crime, Abernot et Coum firent la fête au bourg de Coat-Méal, ainsi que nous l'avons dit hier.
Abernot a déclaré aux gendarmes qu'après avoir quitté son camarade, vers sept heures du soir,
il. était allé se coucher dans un champ.
Invité à montrer l'emplacement où il s'était couché, Abernot conduisit les gendarmes dans un champ
à proximité du lieu du crime.
A l'endroit indiqué par Abernot, l'herbe n'était nullement foulée.
Abernot déclara alors qu'il ne s'était pas couché, mais simplement adossé au fossé.
Quant à son camarade Coum, il était rentré à son domicile à 8 h. 30 du soir.
L'interrogatoire de ces deux individus a été très long, mais rien qui puisse les désigner
comme les coupables n'a été relevé.
En conséquence, ils ont été relâchés.
On a vu hier Abernot aux obsèques de la victime.
Autre remarque
Nous avons dit que cinq minutes avant le passage du cultivateur Adam dans le chemin où a été trouvée la victime,
la femme Branallec n'avait rien remarqué d'anormal.
Le meurtre a donc été perpétré après le passage de la femme Branellec.
Or, hier, on nous a déclaré que quand M. Adam a découvert le cadavre, le sang qui souillait les mains de la victime paraissait avoir coulé depuis un certain temps.
Celte constatation pourrait faire supposer que la victime, après le meurtre, aurait été transportée à cet endroit.
Cette hypothèse doit être écartée pour plusieurs raisons.
D'abord, pendant le transport, le sang s'échappant de la blessure aurait coulé dans toutes les directions.
Or, pas une goutte de sang n'a taché la poitrine, au dessus de la blessure.
Ensuite, l’assassin n’aurait pas déposé sa victime si près de la grand ‘route, de peur d’être vu.
La blessure
Avec quelle arme la victime a-t-elle été frappée ?
La blessure, longue de trois centimètres et large de trois millimètres, présente, vers le milieu, une petite déviation.
Les deux extrémités tendent à former un demi-cercle.
En résumé, la blessure est ovale.
La victime n'a donc pas été frappée avec un couteau.
Détail important: une expérience faite avec un ciseau sur un corps mou présente absolument le même aspect
que la blessure de la victime.
Or, les ciseaux que Mlle Gouriou portait attachés à son côté par une chaînette, étaient tachés de sang.
Est-ce l'arme du meurtre '?
Mlle Gouriou s'est-elle suicidée ?
Autant de points d'interrogation que l'on ne peut résoudre.
Le suicide est invraisemblable.
Nous avons rencontré, hier, au bourg, Mme Le Guen, chez laquelle la victime a travaillé le jour du crime.
Mlle Gouriou était plutôt timide.
Autant que possible, elle évitait de se trouver à table avec les gens de la ferme, au moment des repas.
Elle mangeait alors seule dans une chambre de l’étage, où elle travaillait.
Le soir où elle a été tuée, elle était gaie; toute l'après-midi elle a chanté en travaillant.
Le soir, après le dîner, elle quitta la ferme après avoir reçu 1 fr. 95 pour prix de son travail.
Sur une question, M. Le Guen nous dit que maintes fois, cependant, la victime lui avait fait part
de son appréhension de faire seule, à pieds, les trois kilomètres qui la séparaient de chez ses parents.
Sa peur, comme on le voit, n'était que trop justifiée.
Dans la matinée d'hier, M. le capitaine de gendarmerie Minot, commandant l'arrondissement de Brest,
s'est rendu à Coat-Méal.
De leur côté, le brigadier Bégouin et un gendarme de Plabennec mènent une laborieuse enquête, interrogeant toutes les personnes pouvant fournir un renseignement utile.
Jusqu'ici, leurs efforts sont stériles, et il est à craindre que le meurtrier reste impuni.
Nous tiendrons nos lecteurs au courant de ce meurtre mystérieux.
*
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Source : La Dépêche de Brest - Lundi 10 Septembre 1906
Autres détails
L'attention de la justice semble se concentrer sur les journaliers Abernot et Coum qui, nous I'avons dit,
ont été longuement interrogés par M. Rougier, juge d'instruction.
Nous avons, hier, recueilli de nouveaux renseignements sur ces deux domestiques qui, le jour du crime, ont été vus à proximité du lieu du meurtre.
Au débit Gouriou
Jean-Marie Abernot, 61 ans, employé par M. Olivier Calvez, du bourg de Coat-Méal, était encore,
à six heures du soir, dans le débit Gouriou.
Comme il était sous l'influence de la boisson, M. Gouriou refusa de lui servir à boire.
Abernot sortit sans prononcer une parole.
Quelques instants après, Coum pénétrait également dans le débit Gouriou.
Etant, comme son camarade, sous l'influence de l'alcool, la débitante le pria de sortir.
Coum s'exécuta sans murmurer.
Ce dernier ne connait pas la victime qui, contrairement à ce que certaines personnes disent,
n'a jamais été demandée en mariage.
Elle connaissait beaucoup de jeunes gens, mais aucun de ceux-ci ne la fréquentait.
Le père de la victime
Une demi-heure avant le crime, le père de la victime, en revenant de chercher les vaches aux champs,
a rencontré au lieu dit « Croas-an-Tantes », à cent mètres du chemin où le cadavre de sa fille a été découvert,
le journalier Abernot, qui, en titubant, se dirigeait vers Guipronvel.
M. Gouriou continua son chemin ; il n'a pas vu si Abernot continuait à marcher vers Guipronvel
ou s'il revenait sur ses pas.
Déclarations d'Abernot
Continuant notre enquête, nous avons appris que le jour du crime Abernot avait eu une discussion
avec les autres domestiques de ses patrons.
A la suite de cette querelle, il quitta la ferme et ne reparut plus de la journée.
Vers neuf heures du soir, un domestique de M. Calvez trouva Abernot dormant dans l'écurie,
où journellement il se couche.
Une autre piste
Dès la nouvelle du meurtre, la population accourut vers le chemin où a été perpétré le crime.
Or, la femme Cadiou, tante de la victime, a remarqué, malgré la nuit, qu'un cultivateur se tenait
à l'écart du groupe, mais néanmoins s'informait de ce qui se disait.
Cet individu était porteur d'un paquet d'effets qu'il était venu chercher à Coat-Méal.
La femme Cadiou ne pourrait reconnaître cet individu.
Sur les lieux du meurtre
Nous avons dit qu'à quelques mètres de l'endroit où la fille Gouriou a été trouvée morte, le cultivateur Adam
et ses domestiques travaillaient dans un champ de trèfle.
De ce champ, ils ne peuvent voir le chemin, encaissé entre deux hauts talus bordés d'arbres.
Les domestiques ont déclaré que ni eux ni leur patron n'avaient, un seul instant, quitté le champ.
Les domestiques n'ont entendu aucun bruit, mais leur patron a déclaré qu'il avait perçu des bruits de pas
dans le chemin; toutefois, aucun cri n'a été poussé.
Au bourg de Coat-Méal, on raconte une autre version.
Deux ouvriers de Plabennec, venus à Coat-Méal le soir du crime, auraient déclaré ceci:
« Un peu plus, nous serions tombés sur le coup.»
On interprète différemment cette version, qui a été vérifiée.
Ces deux hommes auraient quitté Plabennec à 6 h. 15 du soir, pour se rendre à Coat-Méal.
Or, il est impossible qu'ils aient franchi onze kilomètres en une demi-heure.
Comme on le voit, il faut chercher une autre piste.
Sans se lasser ni se décourager, le brigadier Bégouin inscrit et pèse tous les témoignages qui lui sont apportés.
Aucun de ceux enregistrés jusqu'ici n'a été de valeur réelle, et cette mystérieuse affaire
semble destinée à être classée.