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1906

Un assassinat à Saint Pol de Léon - Roscoff Kéravel
 

 

Source La dépêche de Brest juin 1906

 

Un assassinat à Saint Pol de Léon - Roscoff

 

Saint-Pol de Léon, 24 juin.

 

Le bruit qu'un crime a été commis au village de Kéravel s'est répandu, hier, à deux heures, en ville.

 

Nous nous sommes immédiatement rendus sur les lieux.

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Voici le résultat de notre enquête :

Kéravel, un des plus importants villages de la campagne de Saint-Pol-Roscoff,

est distant de Saint-Pol d'environ 2 kilomètres 500.

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Le village est en Roscoff.

La maison où le crime a été perpétré est éloignée de 30 mètres seulement d'une autre maison de ferme. 

Il a été commis entre neuf heures et midi. 

La victime est Jean-Marie Urien, âgé de 50 ans, père de quatre enfants.

 

Il servait comme domestique chez M. Joseph Jacq, 77 ans, propriétaire, un des plus riches cultivateurs de Roscoff, d'une honorabilité connue de tous. 

Urien était un peu l'homme de confiance de M. Jacq, qui était, du reste, son oncle. 

La femme du défunt habite avec ses enfants rue Cozec, à Saint-Pol de Léon.

 

Mais son mari couchait à peu près tous les soirs à Kéravel. 

Ce matin, il quittait le village à six heures moins le quart. 

A Saint-Pol, il se confessait et communiait à la messe de sept heures. 

Il regagnait Kéravel à neuf heures. 

La bonne, Françoise Laurent, âgée de 48 ans, qui l'avait rencontré en chemin, lui avait remis la clef de la maison.

 

Personne ne l'y vit rentrer.

 

Le propriétaire s'était rendu à Saint-Pol, vers les sept heures.

Urien était donc seul. 

M. Jacq regagna Kéravel, à midi.

 

Sa domestique restait déjeuner en ville. 

Tranquillement, de son pas de vieillard, il ouvrit sa porte. 

On juge de son épouvante en présence de l'affreux spectacle qui s'offrit à ses regards. 

Affolé, il se dirigea vers la demeure de son plus proche voisin, M. Guillerm, fermier.

 

Tout le monde y déjeunait. 

En toute hâte, hommes et femmes sortirent.

 

Quelle ne fut leur stupéfaction en voyant le corps de Urien étendu sur l'aire de la maison,

la face baignée dans une mare de sang. 

La tête porte une horrible blessure. 

Des taches de sang sont ici et là, sur la table, sur un banc, etc.

Une serviette, posée sur un support fixé au bout d'un lit, est ensanglantée. 

On croit que le criminel a dû s'en servir pour s'essuyer les mains, une lois le crime accompli.

 

Urien tient un couteau ouvert à la main droite et sa pipe, non bourrée, de la main gauche. 

Sur la table, qui est à côté de l'endroit où il gît, sont du pain et du lard,

ce qui laisse supposer qu'il mangeait lorsqu'il a été frappé.

 

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Un chapeau de paille est par terre.

 

Au moment où nous terminons ces lignes,

on nous avertit qu'un pieu de charrette vient d'être découvert dans le jardin qui touche la maison, et qui est planté

de pommes de terre.

 

Ce pieu est certainement l'instrument

qui a servi à l'auteur du crime.

Il est rouge de sang.

 

Quel a été le mobile du crime ? 

Sans aucun doute, le vol. 

Deux mille francs en pièces de 20 francs, renfermés dans une bourse en laine, ont été pris. 

Un porte-monnaie, contenant 500 ou 600 francs, a été aussi vidé. 

La bourse et le porte-monnaie ont été laissés dans l'armoire. 

Ajoutons que M. Jacq avait négligé d'enlever la clef de ce meuble.

 

Comment Urien a-t-il été tué ? 

Selon tous, il a été assommé. 

Quel est l'auteur du crime ? 

On se perd en conjectures à cet égard. 

Le parquet, prévenu, est attendu. 

La population tranquille de Kéravel est consternée.

 

C'est le premier meurtre dont le village ait été témoin.

 

Quant à M. Jacq et à sa bonne, Mlle Françoise Laurent, leur douleur fait peine à voir. 

Ni l'un ni l'autre ne veulent rentrer chez eux. 

Leurs voisins les consolent de leur mieux et partagent leur chagrin. 

Celui-ci est, d'ailleurs, ressenti par tous ceux qui ont voulu se rendre compte de l'affreux tableau que présente l'intérieur de la maison Jacq.

 

Nul n'y pénètre sans être péniblement impressionné. 

Nous avons remarqué sur les lieux MM. d'Herbais et Quément, maire et adjoint au maire de Roscoff.

 

En quittant Kéravel, nous avons vu Mme Urien et l'un de ses fils, pleurant à chaudes larmes. 

On les tient avec raison éloignés de leur époux et père. 

Le parquet de Morlaix se portera demain matin sur les lieux du crime, en compagnie d'un médecin légiste.

 

L'autopsie de la victime aura probablement lieu sur place.

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Roscoff, 25 juin.

 

Dimanche, à trois heures,  la gendarmerie de Saint-Pol de Léon prévenait

le parquet de Morlaix du crime commis à Kéravel.

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L'assassin était mis en état d'arrestation à dix heures du soir, à Morlaix. 

Ce matin, avant huit heures, M. le procureur de la République nous l'amenait entre deux gendarmes. 

Il est difficile de procéder plus vite et de satisfaire plus rapidement une population désireuse de voir

le coupable tomber sous la main de la justice.

 

Le coupable présumé est Pierre Guivarc'h, ouvrier agricole, célibataire, âgé de 38 ans, né à Plouzévédé. 

On le surnomme « Den ouarn », l'Homme de fer.

 

Hier matin, vers huit heures, il entrait chez M. Rioulec, débitant, où il jouait une partie de dominos. 

Peu après, il allait payer 1 fr. 10 chez M Cocaign, débitant, Grand'Rue. 

Il fut rencontré ailleurs entre huit et neuf heures. 

Jusqu'ici, il n'a pu justifier de l'emploi de son temps de neuf heures à midi. 

Or, c'est l'heure où le crime a été accompli. 

À midi ou à midi 10, Yves Derrien et André Le Boull, journaliers, le virent sous le porche du Kreisker.

 

Il leur demanda où ils allaient et se joignit à eux, rue Cadiou, pour aller dîner chez M. Castel, restaurateur.

« J'ai tout dépensé, disait-il, sauf l'argent de mon repas. » 

Cela ne l'empêcha pas de régler avec une pièce de cinq francs. 

Une demi-heure après, les trois ouvriers se séparèrent. 

Guivarc'h a déclaré avoir pris le train de trois heures pour Morlaix. 

Aussitôt son arrivée dans cette ville, il achetait une paire d'espadrilles et une paire de chaussettes. 

Puis, place Saint-Martin, il hélait une voiture et se faisait conduire dans une de ces maisons

qu'il est inutile de désigner autrement. 

Il ordonnait au conducteur de l'attendre.

 

Nous ne savons si on se conforma à ses désirs. 

Ce qui est sûr, c'est que M. le procureur de la République avait prévenu la police de Morlaix de ce qui se passerait.

 

À dix heures précises, MM. Jaffrennou et Amelot, sergents de ville, arrêtaient Guivarc'h à sa sortie du lieu précité

et le coffraient sans plus de retard. 

Les sabots furent recherchés. 

Ils portaient des taches de sang. 

On faisait la même remarque sur son couteau et sur la manche droite de sa chemise.

 

II n'y eut plus de doute qu'on se trouvait en présence de l'assassin lorsqu'on eut découvert 1,500 francs dans ses poches. 

Nous verrons tout à l'heure comment il en explique la provenance. 

En attendant, disons que M. Chardon, procureur de la République, ménageait à la population saint-politaine une surprise mêlée de légitime contentement.

 

Un peu avant huit heures, de deux voitures descendaient MM. le procureur ;

Le Clec'h, juge d'instruction ;

Le Tous, commis-greffier ;

Ronan, interprète ;

Bodros et Rolland, médecins-légistes ;

les gendarmes Sébillot et Brodbecker, de la brigade de Morlaix et,

enfin, Pierre Guivarc'h, l'assassin probable, pour ne pas dire certain.

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Les habitants n'en revenaient pas. 

Parmi les plus étonnés, il faut mentionner les gendarmes de la brigade. 

Quelques minutes plus tard, on était à Kéravel, où l'on avait, été précédé par une foule nombreuse. 

Pierre Guivarc'h fut mis en présence du cadavre de Urien. 

Il demeura très maître de lui et parut plutôt indifférent, un peu hébété.

 

Il nia être l'auteur du crime, prétendit qu'il avait été arrêté à tort, qu'on l'accusait du forfait d'un autre.

Guivarc'h a persisté dans la-même attitude, pendant que MM. les docteurs Bodros et Rolland, pratiquaient l'autopsie, à laquelle il n'a pas voulu assister.

 

Les médecins ont constaté que le pauvre Urien avait, outre la plaie contuse dont nous avons parlé hier, une blessure large et pénétrante sur la partie antérieure du cou. 

Elle a été faite, sans doute, à l'aide d'un couteau. 

L'artère carotide a été tranchée, ce qui explique l'existence de la mare de sang dans laquelle étaient noyés la tête

et le haut du corps de la victime.

 

À dix heures, le parquet reprend le chemin de Saint-Pol. 

On y arrive à 10 h. 1/2. 

Puis il est procédé à l'enquête en ville.

 

Pierre Guivarc'h est conduit rue Cadiou, chez une dame Y. Le F..., qui vit, nous dit-on, séparée de son mari et où il cachait ses économies. 

Il indique la poutre sur laquelle il les déposait.

 

L'intérieur du logis n'indique guère que celui qui y couchait quelquefois — nous parlons de Guivarc'h —

en possession d'une somme de 1,500 francs. 

Du reste, nous savons aussi bien que personne qu'il est impossible à un placenner (c'est le nom local de l'ouvrier agricole) de constituer une épargne. 

Il s'en montre d'autant moins soucieux qu'il n'en voit pas l'emploi.

 

Quoi qu'il en soit, cette promenade ne nous apprend rien,sinon que Guivarc'h ne devait pas être un modèle de conduite. 

Une autre conséquence aussi s'en dégage : c'est que Guivarc'h ment. 

L'assistance a grossi rue Cadiou et Grand Rue. 

Une nombreuse escorte suit la voiture qui transporte Guivarc'h.

 

Sur la Grande Place, on crie :

« À mort ! Enlevez-le ! À l'eau ! Assassin ! Voyou ! »

 

M. Bourdillon, commissaire de police doit intervenir.

 

Sur le parcours, ce dialogue curieux :

« Eh bien ! Guivarc'h, tu as été à Morlaix ?

Oui.

Voir ta tante ?

Oui.

T'as-t-elle ménagé une bonne réception '?

Excellente. »

 

C'est du cynisme.

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Saint-Pol de Léon, 25 juin.

 

Guivarc'h est un homme de haute taille, rasé comme la plupart des campagnards, sans méchanceté apparente. 

Il porte les vêtements des cultivateurs du Léon. 

Samedi, il ne pouvait donner que 0 fr. 80, au lieu de un franc, pour le lit qu'il avait occupé dans la semaine. 

Il était loin alors de posséder 1,500 francs. 

Autre contradiction : l'enquête a démontré qu’il est parti hier, à Morlaix,

par le train de sept heures du soir et non par celui de trois heures, comme lui-même l'avait déclaré d'abord. 

Cette enquête s'est terminée à 2 h. 1/2. 

À 2 h. 45, l'accusé était dirigé sur Morlaix, en voiture.

 

Il a été largement conspué sur la Grande Place.

 

Grand'Rue, le cocher, pour soustraire sa voiture aux cris de la population, a dû faire prendre le trot à ses chevaux.

 

On a beaucoup remarqué que l'attitude de Guivarc'h était bien différente de sa contenance de la matinée :

il était triste, pâle, accablé, comme s'il était prêt à pleurer. 

Est-ce l'heure du remords qui sonne ? 

Entrera-t-il bientôt dans la voie des aveux ?

 

On le croit.

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La femme de Urien habite rue Corre, dans une petite maison très proprement tenue. 

Au moment où nous nous y présentons, elle est à Kéravel. 

Une voisine nous dit que les deux enfants les plus âgés, un garçon et une fille,

sont employés comme cocher et femme de chambre dans un château, près de Paimpol. 

La fille cadette est apprentie couturière à l'ouvroir de la ville. 

Un jeune garçon vit avec la mère. 

Le père est un modèle de conduite et de régularité. 

Sa triste fin est déplorée de tous.

 

À cinq heures, on annonce que l'enterrement se fera demain, à dix heures, à Saint-Pol de Léon.

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Saint-Pol de Léon, 26 juin.

 

Les obsèques de la victime de Guivarc'h ont eu lieu à dix heures, ce matin, en présence d'une foule considérable.

Le deuil était conduit par M. l'abbé Drien, frère du défunt, professeur à Paris, assisté de M. l'abbé Kerbiriou, son neveu. 

M. Treussier, curé-archiprêtre de Saint-Pol, fait la levée du corps. 

M. Morvan, recteur de Roscoff, chanoine, donné l'absoute. 

À la sortie du cimetière, les conversations ont eu pour thème le forfait qui a jeté la consternation dans la région.

 

Quelques-uns pensent que Guivarc'h a eu un complice, et se fondent, pour l'avancer, sur ce fait qu'on n'a trouvé sur lui qu'une partie de la somme volée : 1,500 fr. au lieu de 2,500 fr.

 

On raconte encore que le père de Guivarc'h, qui travaillait, hier, à Kervent, en Saint-Pol, en qualité d'ouvrier agricole, disait que son fils était un mauvais sujet et qu'il n'avait jamais pu en venir à bout.

 

Deux renseignements plus importants nous sont fournis, vers onze heures :

Guivarc'h s'est fait servir un verre dans une auberge bordant la route de Roscoff et située en face de Kéravel, vers 9 h. 15.

 

À la même heure, une personne a vu un homme prendre le chemin rural qui conduit au lieu du crime.

Une complainte sur les événements du 24 est chantée dans l'après-midi. 

Nous en ferons grâce à nos lecteurs.

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Nous avons rencontré, au marché de ce jour, plusieurs habitants de Plouzévédé. 

Ils ont été unanimes dans leur jugement sur Guivarc'h. 

Tous le considèrent comme un homme de mauvaise conduite.

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Nous avons déjà parlé de l'attitude de Guivarc'h en présence du cadavre.

 

Mais nous avons négligé un détail assez curieux :

par deux fois, dans des accès de nervosité, il a demandé une chique à l'un des assistants.

  

Autre remarque : Guivarc'h a prétendu qu'il avait saigné du nez : de là, la maculation de ses vêtements.

 

C'est l'explication classique.

 

Ce soir, on nous confirme l'exactitude du renseignement d'après lequel Guivarc'h aurait été, à 9 h. 15,

dans une des auberges de la Barrière de la Croix.

 

La gendarmerie continue son enquête.

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Morlaix, 26 juin.

 

L'arrestation de Guivarch, qui s'est opérée de façon si rapide dimanche soir, est due en grande partie au brigadier Le Moal et aux agents Derrien, Jaffrennou et Amelot, pour l'intelligence remarquable qu'ils ont déployée en cette affaire.

C'est l'agent Derrien qui a découvert les sabots tachés de sang du criminel. 

La police morlaisienne mérite, pour cette arrestation, les félicitations les plus chaleureuses.

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Saint-Pol, 27 juin.

 

Lundi, le frère de Pierre Guivarc'h, « placenner », fauchait dans une prairie de la campagne de Saint-Pol, en compagnie de plusieurs autres ouvriers. 

Soudain, un notable de la ville apparut sur le terrain. 

Il fut immédiatement cerné et questionné au sujet de l'affaire de la veille. 

Lorsqu'il eut appris que le coupable avait été arrêté à Morlaix et ramené à Saint-Pol, le matin, entre deux gendarmes, tous voulurent savoir son nom.

 

À peine celui-ci fut-il prononcé, l'un des faucheurs trembla, pâlit et ajouta :

« Mab den Ouarn, le fils de l'Homme de fer !...

Mais, c'est Pierre Guivarc'h, mon frère !...

Oh ! ce n'est pas trop tôt qu'on lui coupe le cou !... »

 

Nous avons indiqué hier l'emploi du temps de l'assassin dans la journée du dimanche, jusqu'à 9 h. 15 du matin. 

À 11 heures précises, notre enquête nous permet de le trouver, sur la route de Roscoff, dans le débit Grall,

à 500 mètres, à vol d'oiseau, du lieu du crime.

 

Il y consomme avec MM. Yves Jacq, Roignant, etc., et est sur le point de contracter un engagement pour la moisson, à raison de 35 francs par mois, avec l'une des personnes présentes. 

Guivarc'h a donc menti une fois de plus quand il a déclaré, à l'instruction, qu'il avait passé toute la matinée à Saint-Pol.

Nous en possédons la preuve absolue. 

Comme on le voit, les mailles de la toile qui enveloppera bientôt l'accusé se resserrent vite.

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Morlaix, 27 juin.

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Pierre Guivarc'h, accusé du crime de Saint-Pol, a été interrogé par le juge d’instruction. 

Il nie toujours être l'auteur de l'assassinat.

 

*

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Source : L’écho du Finistère Samedi 28 Juillet 1906

 

Le crime de Roscoff.

 

Guivarc'h, l'auteur présumé du crime de Roscoff, persiste toujours à conserver le mutisme. 

Quand on l'interroge sur les dépositions des témoins, il répond invariablement :

« Je n'ai rien à dire, je ne dirai rien ».

 

À la prison on le surveille étroitement, surtout depuis qu'il a voulu attenter à ses jours en absorbant du sulfate de cuivre que l'on mettait dans son baquet pour le désinfecter.

 

Le sulfate de cuivre a été supprimé, et Guivarc'h, qui se livrait avant à quelques travaux, a été isolé des autres prisonniers et porte maintenant les menottes.

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Assassinat et vol qualifié.

 

7e affaire.

Audience du 19 avril

 

Le nommé Pierre-Marie Guivarc’h, 38 ans, journalier à Saint-Pol-de-Léon, est accusé d’avoir, le 24 juin 1906, assassiné puis volé le nommé Urien, demeurant chez son oncle, le nommé Jacq, cultivateur à Keraval, en Roscoff.

 

Surpris à l’improviste, pendant qu’il mangeait, le malheureux Urien fut assassiné à l’aide d’une pièce de bois

qui fut retrouvée maculée de sang, puis l’assassin lui trancha la gorge.

 

Il déroba ensuite une somme de 2.000 francs.

 

Les plus lourdes charges pèsent sur Guivarch, qui a toujours nié, mais qui n’a jamais pu fournir d’alibi, et qui a changé très souvent de système de défense, se démentant lui-même à chaque instant.

 

M. le procureur Le Marc’hadour soutient l’accusation, Me Verchin est assis au banc de la défense.

 

On voit, comme pièces à conviction, un pieu de charrette, une paire de sabots, un couteau, des effets ensanglantés.

 

Trente-trois témoins sont cités. 

La journée d’hier a été occupée par leur audition.

 

Audience du 20 avril.

 

Assassinat. 7° affaire.

 

Au cours de la première audience, de l’affaire Guivarch, l’assassin de Roscoff, 21 témoins avaient été entendus. 

La seconde audience commence à 8 heures du matin.

 

L’audition des témoins continue.

 

Guivarc’h ne se départit pas de son système de défense, ou il nie ce qui l’embarrasse ou il ne s’en souvient pas. 

Tous les témoins entendus, M. Le Marc’hadour prononce son réquisitoire.

 

Après avoir raconté l’émotion profonde que causa dans le pays de Roscoff un crime accompli

avec une pareille férocité, il se livre à un examen minutieux et complet des détails de l’accusation.

 

Il établit la présence de Guivarc’h sur le lieu du crime, il montre son attitude et ses démarches incohérentes

pendant les heures qui ont suivi, ses dépenses excessives dans les cabarets où il payait à boire à tout le monde,

lui qui a des habitudes parcimonieuses.

 

En terminant, le procureur de la République réclame du jury une peine proportionnelle avec la gravité du crime.

 

Me Verchin, défenseur, soutient qu’on n’a apporté aucune preuve directe,

aucune preuve matérielle pouvant justifier un verdict de culpabilité.

 

Il supplie donc les jurés de sonder leurs consciences et d'apprécier cette affaire comme elle le mérite,

c’est-à-dire en rapportant un verdict inspiré par la prudence et la sagesse.

 

Le jury ayant répondu affirmativement à toutes les questions, avec admission de circonstances atténuantes, Guivarc’h est condamné aux travaux forcés à perpétuité.

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Embarqué pour la Guyane le 18 juillet 1907

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Décédé le 9 mai 1908

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