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Fenêtres sur le passé

1896

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Un vicaire violent et gifleur d'une jeune femme

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L'abbé G..., vicaire dans une paroisse de l'arrondissement de Brest, voisine de la côte, vient s’asseoir sur la sellette.

Il est inculpé de coups et blessures.

Âgé de 35 ans, grand, fort, l'abbé G... prend place nonchalamment sur le banc des prévenus, l'air satisfait,

les jambes croisées et se frottant les mains.

Il n'a nullement l'air de s'apercevoir de l'effet que sa présence produit dans l'auditoire.

Il rit complaisamment et hausse les épaules pendant les dépositions des témoins.

 

Voici le cas de l'abbé :

Le 30 août, vers huit heures du soir, M. Pascoët (Gabriel), menuisier, sa femme, sa belle-mère et une voisine, revenaient en voiture d'un pardon des environs quand, en route, ils se croisèrent avec un char à bancs

dans lequel se trouvait l'abbé G...

En passant à sa hauteur, M. Pascoët dit :

« Bonsoir, monsieur l'abbé !

Le vicaire ne répondit pas tout d'abord, mais, quarante mètres plus loin, il descendit de voiture et se précipita sur Pascoët en lui demandant s'il se... moquait de lui et en le menaçant de le frapper.

Effrayées par l'attitude agressive de l'abbé, dit M. Pascoët, ma femme et ma belle-mère s'interposèrent entre lui et moi.

Ma femme l'invita même à se calmer.

Mal lui en prit.

Elle reçut au même moment un violent soufflet en plein visage. »

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Anonyme

Pendant toute cette déposition, le prévenu ne cesse de sourire.

 

La femme Pascoët, une jeune cultivatrice de seize ans,

confirme la déposition de son mari.

 

Le jeune Tallec (Yves), âgé de onze ans, qui se trouvait par hasard

sur la route, déclare que Pascoët a tranquillement dit bonsoir à l'abbé.

Il a parfaitement vu celui-ci souffleter Mme Pascoët.

 

Julie Arzur, la jeune voisine qui a assisté à la scène, n'a pas vu l'abbé frapper Mme Pascoët, mais cette dernière lui en a fait part aussitôt.

 

Un dernier témoin, qui se trouvait dans la voiture du prévenu,

déclare n'avoir absolument rien vu.

 

Interrogé à son tour par le président, l'abbé G...

nie avec emphase « l'existence de la gifle » et essaie d'expliquer

son intervention par l'attitude de M, Pascoët, qu'il a jugée agressive

et menaçante.

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— Alors, vous avez voulu vous rendre justice vous-même, lui dit le président. 

— Parfaitement, répond l'abbé avec aplomb.

 

— Cependant, votre caractère vous commandait, plus qu'à tout autre, de ne point vous arrêter

et de continuer votre route.

Quel besoin aviez-vous de descendre de votre voiture ?

Vous pouviez vous adresser à la justice.

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Et le président rappelle au prévenu la récente condamnation à l'emprisonnement prononcée par le tribunal contre

un marin en congé accusé d'avoir outragé son frère, aumônier de marine.

« Le rôle de votre parent, dans cette circonstance, a été plus digne que le vôtre », ajoute-t-il.

 

Le président rappelle aussi à l'abbé G..., qu'il y a quelque temps, il a pris le béret du frère de M. Pascoët,

sous un prétexte futile, et que lorsqu'il est venu le réclamer au presbytère, il l'a enfermé 

et l'a assez sérieusement brutalisé.

 

L'abbé G... ne répond pas.

 

Me Le Bras, qui défend l'abbé G..., déclare que son client reconnaît qu'il est très vif et qu'en se débattant,

dans le feu de la discussion avec M. Pascoët, « sa main a pu rencontrer involontairement la joue de Mme Pascoët ».

Quant à l'avoir volontairement frappée, il le nie énergiquement.

 

Reconnu coupable du délit qui lui était reproché, l'abbé G... a été condamné à 25 fr. d'amende.

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