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Fenêtres sur le passé

1892

Naufrage au Guilvinec

Source : Le Finistère juin 1892

 

Guilvinec

 

Dans la nuit du 1er au 2 courant, vers 2 heures du matin, Le Gall (Alain), de Kérity,

patron du bateau de pêche Tamerlan, revenait au port, lorsqu'arrivé dans le chenal dit Pen-en-Guer,

non loin des récifs les Étocs, il entendit des cris de détresse.

 

Il regarda aussitôt dans la direction d'où partaient ces cris et aperçut, à une quinzaine de mètres environ,

deux ou trois hommes accrochés à la quille d'un bateau.

 

Il fit de suite amener les voiles, pour ralentir la marche de sa chaloupe et commanda de jeter l'ancre.

 

À ce moment il se trouvait à environ 100 mètres de l'embarcation naufragée.

 

La mer était tellement grosse que la sienne chassait sur ses ancres.

 

Il crut un moment qu'il allait être jeté sur les rochers et fut obligé de quitter le mouillage et de hisser sa misaine.

 

Il navigua alors dans la direction où il avait entendu des cris dix minutes auparavant,

mais ces cris avaient cessé et il ne remarqua plus rien, sur la mer.

 

La nuit était sombre, le vent soufflait en tempête, et il pleuvait à torrent.

 

Le Gall n'avait plus qu'à regagner Kérity, ce qu'il fit, non sans peine.

Dans l'après-midi de la journée du 2, le patron Vincent Cléach,

du bateau 1080 du Guilvinec, se rendait à la pèche,

à environ 1 un mille au large, entre Guilvinec et les Étocs,

il aperçut des épaves flottant à la surface de la mer.

 

On se dirigea de ce côté et on découvrit un mât,

une voile et un filet de pèche que l'équipage reconnut

pour appartenir au bateau de pêche Saint-Louis,

patron Berrou, Louis, du Guilvinec.

 

Guilvinec _01.jpg

Le corps du nommé Thalouarn (Michel), novice, âgé de 19 ans, était resté engagé dans les filets.

 

Ces indices ne permettent plus de douter du triste sort des sept autres malheureux qui montaient le Saint-Louis.

 

La chaloupe s'est évidemment perdue corps et biens.

 

Les autres victimes sont les nommés :

1 - Berrou (Louis), 25 ans, patron, marié et père de 3 enfants ;

2 - Ollivier (Michel), 30 ans, marié, 2 enfants ;

3 - Buanic (Jean), 28 ans, marié, 3 enfants ;

4 - Jaouen (Jacques), 28 ans, marié, laisse une veuve sans enfants ;

5 - Le Lay (Louis), 18ans, célibataire ;

6 - Crédou (Michel), 16 ans, mousse ;

7 - Draoulès (Sébastien), 13 ans, mousse.

 

Tous habitants du Guilvinec.

Guilvinec _02.jpg

Les pertes matérielles, consistant en bateau, gréement et filets, s'élèvent à environ 1,100 francs et ne sont point assurées.

 

Les familles des naufragés, privées de leurs soutiens naturels,

vont être réduites à la misère.

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6 juin,

 

Notre correspondant du Guilvinec nous écrit d'autre part :

 

Encore un sinistre à déplorer.

 

La nuit du 2 courant n'a pas seulement enlevé quatre marins à la population de Penmarch ;

elle a cruellement éprouvé celle du Guilvinec.

 

Cette nuit-là, vers deux heures du matin, le patron Berrou (Louis), et son équipage,

se trouvaient avec le canot Saint-Louis, près des « Étocs de Penmarch ».

 

On levait les filets à maquereaux de dérive.

 

Une violente tempête éclata ;

le canot fut poussé dans les brisants et se perdit avec les huit hommes qui le montaient.

 

Le même jour, le cadavre du nommé Thalouarn qui faisait partie de l'équipage du bateau naufragé

a été recueilli par le patron Le Cléach (Vincent).

 

Il l'a débarqué au Guilvinec.

 

Un autre cadavre a été trouvé également ce jour-là,

mais ce dernier provient du naufrage du canot Notre-Dame-de-Bon-Voyage qui s'est perdu corps et biens

dans la nuit du 30 au 31 mars.

 

Le noyé a été reconnu par sa famille ; il se nomme Diquélou.

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Le 2 courant, vers 6 heures du soir, le sieur Bignès (Pierre), patron de la chaloupe n° 832 se rendait sur le lieu de pêche lorsqu'il aperçut dans le chenal de Men-Meur,

à environ un mille au large du Guilvinec,

le cadavre d'un homme flottant à la surface de la mer.

 

Il dirigea Immédiatement son embarcation vers ce point

et il attacha le corps à son bateau

et le ramena jusqu'à la cale du Guilvinec.

 

Ce cadavre était en complet état de putréfaction ;

il portait l'habit de pêcheur, pantalon et blouse cirés.

 

Le pied gauche était encore chaussé d'une botte de mer.

Guilvinec _03.jpg

Le pied droit, les mains, la tête enfin toutes les parties non recouvertes par les effets étaient littéralement rongées.

 

Cette victime de l'Océan a été reconnue pour être le nommé Diquélou (Jean),

âgé de 37 ans, marin-pêcheur à Guilvinec qui a péri dans la nuit du 29 au 30 mars dernier,

lors du naufrage du bateau Notre-Dame-de-Bon-Voyage.

 

Le corps a été remis à la dame Marie Le Bec, veuve Diquélou, et l'inhumation a eu lieu dans la soirée du même jour.

 

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17 juin.

 

De notre correspondant :

 

Hier, le bateau Volonté-de-Dieu, patron Broussard, du port de Morgat,

qui faisait ici la pêche de la sardine depuis quelques jours, a recueilli, à un mille au large des Étocs,

un cadavre, qu'il a ramené dans notre port et où on l'a reconnu pour être le nommé Cloarec (Jean),

de Saint-Pierre, et faisait partie du bateau la Marie, qui s'était perdue dans la nuit du 1er au 2 courant.

 

Ce malheureux a été transporté aussitôt à Kérity par le patron Le Floch, de ce dernier port.

 

Le même jour, le cadavre de Michel Olivier, qui faisait partie du canot Saint-Louis, du port,

et qui s'était également perdu corps et biens dans la nuit du 1er au 2, a été trouvé à Penmarc'h

et transporté à Guilvinec où il a été inhumé aussitôt.

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