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Fenêtres sur le passé

1891

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Les engrais chimiques

Source : Le Finistère janvier 1891

 

Les engrais chimiques.

 

On a donné le nom d'engrais chimiques à des matières qui renferment à l'état de concentration les éléments

de la fertilité et peuvent remplacer les fumiers de ferme.

 

Grâce à leur emploi, il est possible à l'agriculteur de donner aux plantes une alimentation qui n'est plus limitée

comme à l'époque où les fumiers naturels étaient seuls employés, car les engrais chimiques,

nommés aussi commerciaux ou complémentaires, sont abondants.

 

L'efficacité de ces produits est aujourd'hui démontrée et il ne s'agit plus que d'étudier le profit que peut donner

leur emploi et les conditions de leur application.

 

Nous rappellerons que pour donner des céréales passables le sol doit contenir par kilogramme 1 gramme d'azote ;

1 gramme d'acide phosphorique ; 2 grammes de chaux et 1 gramme de potasse.

 

Dans les terres de Bretagne, généralement la première et la dernière de ces substances existent en abondance,

la dernière surtout et il n'est pas nécessaire d'en apporter davantage ;

mais pour les deux autres il n'en est pas de même, ce qui justifie pleinement dans notre contrée,

l'usage des phosphates et de la chaux.

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Quant à l'azote qui existe dans nos terres, il n'est, malheureusement,

pas toujours assimilable, et dans certaines circonstances on a intérêt

à recourir à l'azote des engrais chimiques et le but de cette notice

est d'indiquer les conditions de son emploi.

 

On considère comme certain qu'une ferme soutenue uniquement

par le fumier qu'elle produit, s'épuise peu à peu par l'exportation des récoltes et des animaux

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Le rôle de l'engrais chimique consiste à compenser ces pertes et en outre à importer un surcroît de production,

et il y a lieu de remarquer ici que le fumier ne fait que rendre au sol une partie des éléments que les récoltes

lui ont pris, mais ne lui fournit pas tout ce qui lui manque.

 

Exemple :

Nos terres bretonnes sont pauvres en acide phosphorique ; nos fumiers en contiennent peu, naturellement,

et ne les enrichiront pas en phosphate.

 

Les engrais chimiques ont une composition bien définie, chacun renferme un ou deux des éléments de la fertilité :

Les nitrates et les sels ammoniacaux contiennent l'azote; le phosphate de chaux, l'acide phosphorique et la chaux ; d'autres sels, la potasse, etc.; et si la terre manque de l’un de ces éléments, on peut le lui donner

par l'engrais chimique.

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Dans l'emploi du fumier, on donne au sol tous les éléments nécessaires à la végétation, mais il peut arriver que quelques-uns ne donneront aucun produit dans le cas, par exemple, où l'on fumera le trèfle, l'azote sera perdu.

 

Les engrais chimiques ont encore un avantage, c'est de renfermer

sous un petit volume une grande quantité de matières fertilisantes :

100 kilos de sulfate d'ammoniac contiennent autant d'azote que 3 à 4 tonnes de fumier ordinaire et 100 kilos de chlorure de potassium autant de potasse que 10 tonnes de fumier.

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En résumé, une tonne de fumier ordinaire pourra être remplacée par 10 kilos de phosphate précipité,

10 kilos de chlorure de potassium et 25 kilos de sulfate d'ammoniaque.

 

De plus, l'action des engrais chimiques est rapide et souvent le cultivateur peut la régler.

 

Cependant on ne peut pas en recommander l'emploi exclusif ; malgré les avantages que nous venons d'énumérer,

on ne doit les considérer que comme le complément des fumiers de ferme, ils ont pour but d'aider ceux-ci à assurer

la fertilité des terres ; mais ne l'oublions pas, le fumier est un engrais complet, les nitrates, etc., sont incomplets.

 

Les engrais chimiques comprennent les nitrates, les sels ammoniacaux et de potasse, les phosphates, etc.;

nous les examinerons successivement.

 

Nitrates.

 

Les nitrates employés en agriculture résultent de la combinaison de l'acide nitrique ou azotique avec la soude

ou la potasse.

 

C’est le nitrate de soude qui est le plus employé, il provient de la côte du Pacifique et coûte environ

22 fr. les 100 kilogrammes.

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C'est un sel blanc et cristallisé qui est vendu ordinairement avec la garantie

de 15 à 16 pour cent, d'azote ce qui met le prix à 1 fr. 40 le kilo à peu près.

 

Sa conservation étant assez difficile, on ne doit pas s'en approvisionner

longtemps à l'avance.

 

Le nitrate de soude est très soluble et il peut être entraîné par les eaux pluviales ;

c'est ce qui fait recommander son emploi après l'hiver seulement.

 

Il active la végétation des céréales qui auraient jauni pendant l'hiver.

 

Il peut être appliqué sur tous les terrains, de préférence en mars.

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En mai, cette fumure pourrait avoir des inconvénients : la forte végétation des feuilles donne trop d'ombrage

à la partie inférieure du chaume, ce qui amène la verse.

 

En raison de la solubilité du nitrate, beaucoup de cultivateurs l'emploient en couverture,

mais quelques-uns l'enfouissent en labourant pour les céréales de printemps, afin, disent-ils,

d'éviter l'action nuisible du sel quand il touche la semence.

 

Dans le Finistère, le nitrate de soude a donné des résultats différents : généralement il a poussé à la production

de la paille ; dans d'autres cas, il a coïncidé avec une assez forte augmentation du rendement en grain.

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Supposons, deuxièmement, une terre chaulée et phosphatée, mais pauvre en azote; ici, le nitrate est indiqué

et la dose peut être doublée ou triplée.

 

Voici, du reste, des résultats obtenus sur des cultures surveillées avec le plus grand soin :

un hectolitre de froment contient 3 kilos 18 d'azote; mais, pour obtenir cette augmentation de rendement,

il a toujours fallu en employer au moins 6 kilos, ce qui a mis le prix du grain à 8 fr. 40, quelquefois le double ;

alors le froment revenait à 16 fr. 80, ce qui est beaucoup trop cher, et toujours, bien entendu ,

dans des terres pourvues de tous les autres éléments, ce qui est assez rare en ce pays.

 

Nous concluons donc que le remboursement du nitrate est loin d'être assuré dans tous les cas ;

mais il est de première nécessité que les expériences faites dans le département soient continuées et publiées,

c'est par elles seulement que le cultivateur pourra être fixé, et non par des chiffres.

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En mai, cette fumure pourrait avoir des inconvénients : l

a forte végétation des feuilles donne trop d'ombrage à la partie inférieure du chaume, ce qui amène la verse.

 

En raison de la solubilité du nitrate, beaucoup de cultivateurs l'emploient

en couverture, mais quelques-uns l'enfouissent en labourant pour les céréales de printemps, afin, disent-ils, d'éviter l'action nuisible du sel quand il touche la semence.

 

Dans le Finistère, le nitrate de soude a donné des résultats différents :

généralement il a poussé à la production de la paille ; dans d'autres cas,

il a coïncidé avec une assez forte augmentation du rendement en grain.

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Ici, 100 kilogrammes de nitrate seront suffisants ; en donnant de la force à la plante, ils pourront lui permettre de mieux rechercher dans le sol les autres éléments.

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Sulfate d'ammoniaque.

 

C'est un composé d'acide sulfurique et d'ammoniaque ; à l'état pur,

il contiendrait 20 à 21 % d'azote et coûterait plus de 30 francs, soit environ 1 fr. 50

le kilo de cette denrée ; mais les sulfates d'ammoniaque du commerce dosent moins.

 

Ils peuvent varier de 7 à 15 et 19 pour cent, c'est-à-dire que les achats ne doivent

être faits que sur analyse, et encore ne faut-il pas confondre les termes azote

et ammoniaque, car la dernière substance vaut 1/5 en moins.

 

La solubilité du sulfate d'ammoniaque est grande, mais cependant les eaux pluviales

ne l'entraînent pas comme le nitrate de soude.

 

La terre le fixe en grande partie, surtout l'argile.

 

Le sulfate d'ammoniaque se change assez facilement en nitrate, forme qui est indispensable à la végétation,

mais ne se produit qu'en terrain riche en calcaire ; quant aux terres acides, terres de landes, de bruyère,

le sulfate d'ammoniaque qu'on leur confierait resterait inutilisé, puisque là toute nitrification est impossible.

 

D'ailleurs, nous savons par expérience qu'il n'y a pas intérêt à employer les engrais azotés dans les terres riches

en débris organiques (c'est le cas de beaucoup de terres du département), et qu'il est préférable de les traiter

par la chaux.

 

Les quantités à employer comme essai et seulement dans les terrains chaulés, nous le répétons, seraient

un peu plus fortes que celles de nitrate, en raison de la lenteur plus grande dans l'assimilation.

 

On a conseillé d'en mettre un peu à la semaille et le reste au printemps, mais toujours avant la fin d'avril.

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