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Fenêtres sur le passé

1891

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Abordage du torpilleur Edmond Fontaine par le Surcouf

​

et autres accidents de torpilleurs

Edmond Fontaine abordage.jpg

Source : La Dépêche de Brest 8 mai 1891

 

Dans la nuit d'avant-hier à hier, la division cuirassée du Nord, qui avait appareillé de La Hougue dans la journée,

a fait un simulacre d'attaque de Cherbourg, défendu par les torpilleurs de la défense mobile.

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Pendant l'opération, le torpilleur de haute mer l'Edmond Fontaine,

aveuglé par la lumière électrique du croiseur de 3e classe le Surcouf,

a été abordé et coulé par ce bâtiment.

 

Tout l'équipage du torpilleur a été sauvé, sauf un quartier-maître mécanicien,

qui s'est jeté à l'eau au moment du choc et a disparu.

 

L'épave de l'Edmond Fontaine a été remorquée, par petit fond,

près de la rade de Cherbourg, et l’on procède à son renflouement.

 

La division cuirassée a pris son mouillage en rade.

 

Voici les dépêches que nous avons reçues hier sur

ce nouveau et regrettable accident :

 

11 h. 27 matin.

 

Projecteur de marine.jpg

L'Edmond Fontaine a coulé par trente mètres d'eau, à un mille ouest de la digue de Cherbourg.

Il était remorqué par le torpilleur Bouet-Villaumez (voir article plus bas), mais comme il coulait,

on dut couper la remorque.

 

Le Surcouf a essayé le renflouage, aidé par des remorqueurs.

 

L'amiral Gervais et les autorités maritimes se sont rendus sur les lieux du sinistre.

 

2 h. 15 soir.

 

Le Surcouf est rentré après des recherches infructueuses des scaphandriers pour retrouver l'Edmond Fontaine.

 

On a perdu pour le moment ses traces, quoiqu’une bouée ait été jetée au moment de l'abordage, pour reconnaître la place où le torpilleur a coulé.

 

De nouvelles recherches vont être opérées.

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2 h. 45 soir.

 

Le quartier-maître mécanicien noyé se nomme

Christophe-Albert Le Filoux.

 

Il était né à Brest.

Le Filoux était, en effet, notre compatriote.

 

Sa mère tient un débit route de la Vierge.

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Brest Rue-de-la-Vierge.jpg

Sa femme se trouve en ce moment dans une situation intéressante.

 

La préfecture maritime, avisée télégraphiquement de l'accident, a fait immédiatement prévenir la famille,

dont on devine la douleur.

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Source : Journal des débats politiques et littéraires 17 mai 1891

 

On nous écrit de Cherbourg que le torpilleur Edmond Fontaine, coulé dans la nuit du 6 au 7 mai par l'éperon du Surcouf,

à un quart de mille de l'entrée Ouest de Cherbourg,

a été relevé et conduit dans une des formes de l'arsenal.

 

Les opérations, conduites par la direction des mouvements

du port avec une grande habileté, ont été favorisées

par un très beau temps et une mer toujours calme.

 

Torpilleur _12.jpg

Après avoir exactement reconnu la position du petit navire, qui reposait sur son arrière par des fonds de 13 mètres

à mer basse, on a amené au-dessus de lui deux pontons reliés par des poutres portant 10 grosses chaînes.

 

À mer basse on entourait l'Edmond-Fontaine de ces chaînes en les raidissant fortement,

et à mer haute le torpilleur se trouvait soulevé de toute la hauteur de la marée, 3 à 4 mètres dans les mortes eaux.

 

On remorquait alors les pontons et tout l'ensemble du système jusqu'au moment où le navire coulé reposait

sur des fonds de 9 à 10 mètres à mer haute ;

la mer baissant de nouveau de 3 mètres, l'opération répétée amenait l’Edmond-Fontaine

par des fonds de 6 à 7 mètres, ainsi de suite.

 

On calcule que l'arrière seul du torpilleur doit être endommagé et que les réparations ne seront pas très coûteuses.

 

En revanche, on a été surpris des dégradations qu'a subies l'avant, très effilé à la vérité, du croiseur Surcouf.

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Ce bâtiment a dû rentrer dans le port et s'échouer dans

une forme pour changer une partie des tôles de son éperon.

 

On fait, à ce propos, la remarque que l'échantillon

de ces bâtiments est décidément trop faible,

les tôles de bordé n'ayant guère plus de 6mm à l'avant.

 

De plus, il semble que l'acier de ces tôles soit aigre :

une déchirure s'est produite sur une longueur

de 30 centimètres environ,

là où l'on n'aurait pensé trouver qu'un renfoncement.

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Surcouf _01.jpg

Du reste, la voie d'eau produite était insignifiante, la cellulose ayant parfaitement rempli son rôle, et il est certain que, en temps de guerre, le Surcouf n'aurait pas été obligé d'interrompre ses opérations.

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Source : L’Illustration 30 mai 1891

 

LE TORPILLEUR «EDMOND-FONTAINE»

 

L'Edmond-Fontaine était un torpilleur de haute mer de 41 mètres de longueur,

déplaçant 66 tonnes et monté par un équipage de 21 hommes.

 

Il a coulé dans la nuit du 6 au 7 mai, à l'entrée de Cherbourg, au cours d'un simulacre d'attaque de la division cuirassée de la Manche contre ce port, qui était défendu par six torpilleurs de la défense mobile.

 

Cette fois, c'est aveuglé par la lumière électrique d'un cuirassé,

le Surcouf, que le torpilleur,

qui appartenait à la division assaillante, a été abordé.

 

Tout le monde sait l'impression que l'on ressent lorsqu'on passe de l'obscurité à une lumière éblouissante.

 

Il faut alors quelques minutes pour que la rétine perçoive

les objets qu'elle distingue très bien en temps ordinaire.

 

Torpilleur _11.jpg

On conçoit donc que si le projecteur électrique d'un cuirassé frappe à l'improviste un torpilleur,

il aveugle complètement le capitaine et l'homme de barre.

 

C'est ce qui est arrivé pour l'Edmond-Fontaine.

 

Or, celui-ci était lancé à toute vitesse, et lorsque le capitaine a pu se rendre compte de sa position,

il reconnut que son unique et très problématique chance de salut était de passer à l'avant du cuirassé,

qui faisait machine en arrière.

 

C'était là une manœuvre hardie et qui a failli réussir à quelques secondes près.

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Malheureusement le torpilleur ne put franchir complètement l'obstacle, et son arrière fut atteint.

 

L'Edmond-Fontaine a coulé par 13 mètres d'eau à mer basse.

 

On vient de le ramener à terre,

et notre dessin montre les graves avaries qu'il a subies.

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Edmond Fontaine _01.jpg

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(*)Bouet Willaumez, torpilleur de haute-mer.

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Cherbourg, le 1 septembre 1900.

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Le torpilleur Bouet-Villaumez, basé à Cherbourg, a touché sur une roche hier soir près des roches de Douvres

et a coulé.

L'équipage a été sauvé.

Les autorités de port ont envoyé le sur place pour porter assistance .

Le torpilleur 108, qui accompagnait le Bouet-Villaumez, est arrivé à l'île de Bréhat avec l'équipage.

 

Agence Reuter.

Le ministre de la Marine a reçu ce matin de Brest et de Cherbourg deux télégrammes lui annonçant  que hier soir à 6 h. 30,

par un temps brumeux, le torpilleur Bouet Willaumez

de la défense mobile de Cherbourg a touché la roche Gauthier

sur le plateau de Barnouic près des roches Douvres.

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Il a coulé bas.

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Heureusement, cette fois, l'équipage a pu être sauvé,

mais on ne sait si le torpilleur a pu être renfloué.

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Torpilleur en construction chantiers sch

Torpilleurs en construction chantiers schneider

Le Buffle a été envoyé sur les lieux.

Le torpilleur 108 qui l'accompagnait est arrivé à l'ile Bréhat avec deux équipages.

 

Le Bouet-Villaumez est un torpilleur de 1er classe.

Il avait été construit en 1886.

Il était en acier et avait 41 mètres de long, 3 m. de large, 2 m. 33 de tirant d'eau, un déplacement de 66 tonnes

la force de ses chaudières était de 700 chevaux, sa vitesse de 20 nœuds.

Il n'avait qu'une hélice et pouvait s'approvisionner de 12 tonnes de charbon il avait 2 tubes lance-torpilles

et son équipage se composait de 20 hommes.

L'épave est vendue en janvier 1901.

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Accident torpilleur 131.jpg

Source : La Dépêche 30 juin 1891

 

Mercredi soir, vers 3 heures 1/2 de l'après-midi, le torpilleur 131, commandé par M. Fautrat,

lieutenant de vaisseau, était sorti du port militaire et se livrait sur notre rade à des exercices de torpilles portées.

 

Ces torpilles, généralement appelées torpilles de combat, sont chargées de poudre noire et la construction

de ces engins est toute spéciale pour les exercices journaliers des torpilleurs.

 

Après l’avoir placée sur une hampe à son avant, le petit bâtiment s'élance à toute vapeur pour torpiller le navire

qu'il combat et, au moyen d'un mécanisme spécial, il communique le feu à la torpille.

 

Après quoi le torpilleur, renversant la vapeur, fait machine en arrière pour s'éloigner de la torpille

et éviter toute commotion dangereuse.

 

Or, sur le torpilleur 131, on avait, pour allonger sans doute le bras du levier et la distance d'explosion,

amarré une flèche en bois au bout de la hampe sur laquelle était suspendue la torpille.

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En plongeant sa torpille, le navire étant à toute vitesse,

la hampe s'est brisée et, en se recourbant, la torpille portée

au bout est venue se loger au-dessous du blockhaus dans l'eau.

 

Comme on ne s'était pas aperçu à bord de la rupture de la hampe, on communiqua le feu à la torpille,

la croyant éloignée du navire.

 

C'est ce qui a déterminé l'accident.

 

flambergue-et-catapulte-bons.jpg

Malheureusement, un marin gabier de la défense mobile se trouvant à la barre, dans le blockhaus,

éprouva une telle commotion qu'il fut soulevé en l'air, et sa tête, venant frapper les tôles du blockhaus,

il retomba sur le pont, littéralement assommé et sans connaissance.

 

Le torpilleur a reçu de graves avaries, surtout du côté de tribord, à peu près dans la longueur du poste avant :

les tôles ont été disjointes, bosselées, mais non déchirées ;

cependant, les rivets qui relient les tôles ayant sauté, il en est résulté une voie d'eau considérable

qui aurait pu faire couler le torpilleur, sans ses cloisons étanches.

 

Deux torpilleurs se trouvant dans les parages au moment de l'explosion,

ont remorqué le torpilleur 131 dans le port militaire.

 

Deux autres hommes de l'équipage, se trouvant sur le pont, ont reçu aussi quelques blessures

et tous les trois ont été transportés à l'hôpital maritime.

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L'infortuné matelot gabier qui se trouvait dans le blockhaus est un nommé Peiron (Ernest), âgé de 27 ans, célibataire.

 

Il a eu la colonne vertébrale fracturée, et malgré les soins dont il a été l'objet à l'hôpital de la marine,

il y est mort jeudi soir, à 8 h, 55,

après de cruelles souffrances.

 

Les deux autres blessés sont :

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1° Lemoine (Henri), âgé de 28 ans, matelot torpilleur réserviste, marié, sans enfants, demeurant à Bayeux ;

T154 1908 echoue paimpol.jpg

ses blessures consistent dans une plaie contuse de la face et des contusions dans la région dorsale et aux talons.

Son état n'a rien de grave ;

 

2° Jouan (Émile), quartier-maître torpilleur, âgé de 27 ans, marié, deux enfants,

domicilié à Cherbourg, rue des Fossés, 15, qui a reçu une contusion à la cuisse gauche.

 

Son état n'a également rien de grave et tous les deux en seront quittes, à moins de complications imprévues,

pour quelques jours de repos à l'hôpital.

 

Le torpilleur 131 a été mis dans un dock flottant et introduit dans le bassin Napoléon III du port militaire,

pour y être visité et réparé.

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