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Fenêtres sur le passé

1886

Un pardon explosif à Plouguin

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Source : La Dépêche de Brest 22 janvier 1887

 

Audience du 21 janvier.

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La septième affaire de la session est venue hier.

Notre correspondant de Quimper nous télégraphie hier, 7 h. soir :

 

Les nommés :

1° Cabon, Gabriel, âgé de 21 ans ;

2° Cabon, Yves, âgé de 18 ans ;

3° Pellen, Pierre, âgé de 24 ans, tous les trois marins-pêcheurs, demeurant à Saint-Pabu, sont accusés :

En premier lieu :

Les trois, d'avoir, le 29 août 1886, en la commune de Plouguin, volontairement exercé des violences ou voies de fait sur la personne

d'un commandant et d'un agent de la force publique,

pendant qu'ils exerçaient leur ministère, ou en cette occasion ;

lesquelles violences et voies de fait ont été cause d'effusion de sang, blessures ou maladies ;

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En deuxième lieu :

Cabon, Gabriel, d'avoir :

1° dans les mêmes circonstances de temps et de lieu,

volontairement porté des coups et fait des blessures aux nommés Le Vern, François, et Le Vern, Claude, ou exercé sur eux toute autre violence ou voie de fait ;

2° outragé par paroles et gestes ou menaces un agent dépositaire

de la force publique et un commandant de la force publique.

 

En troisième lieu :

Cabon, Yves,

1° d'avoir, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, volontairement exercé des violences ou voies de fait sur la personne

du garde-champêtre de Plouguin, agent de la force publique, requis

par le maire en cette qualité et agissant dans l'exercice de ses fonctions ;

2° de s'être évadé par bris de prison ;

 

En quatrième lieu :

Pellen, Pierre, d'avoir, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu volontairement porté des coups et fait des blessures à la nommée

Anne Prigent, femme Lannou, ou commis envers elle toute autre violence ou voie de fait.

 

Le dimanche 29 août 1886, Billemand, brigadier, et Guerchet, gendarme, à la résidence de Ploudalmézeau, se trouvaient de service au pardon

de la commune de Plouguin.

Vers six heures du soir, ils aperçurent le nommé Cabon, Gabriel, qui, ayant cherché querelle aux deux frères Vern, les avait saisis tous les deux et s'efforçait de les frapper.

Ce Cabon est doué d'une force musculaire remarquable ;

dans tout le pays, il est excessivement redouté

et on l'a surnommé « le géant ».

Le brigadier l'ayant engagé plusieurs fois à lâcher prise et voyant

qu'il n'était tenu aucun compte de ses exhortations,

lui prit le bras pour le forcer à obéir.

Alors Cabon, se retournant, s'élança sur le brigadier et l'empoigna

à la gorge avec une telle violence que le sang sortait par la bouche.

 

Le gendarme Guerchet voulut porter secours à son chef.

 

La foula s'ameuta ;

on s'acharnait contre les gendarmes, on les criblait de coups,

on paralysait les mouvements qu'ils faisaient pour se défendre, et pendant que ces deux hommes requéraient main-forte au nom de la loi, les spectateurs de cette lutte demeuraient impassibles ou bien encourageaient les agresseurs en leur criant qu'il fallait « frapper».

 

Néanmoins, le brigadier maintint Cabon Gabriel, qu'il avait pris au collet ; il reçut un croc-en-jambe et, jeté à terre, il fut aveuglé par les coups

dont l'accablaient Pellen et plusieurs autres ; Cabon, Gabriel,

le mordait cruellement aux mains et le frère de celui-ci Cabon, Yves,

lui lançait un violent coup de pied aux parties sexuelles.

 

Par un effort désespéré, il réussit à se relever, dégaina et donna

trois coups de plat de sabre sur la tête de Cabon, Gabriel,

qui cherchait toujours à l'étrangler ;

il fut renversé une seconde fois, ses épaulettes et ses aiguillettes furent arrachées et divers agresseurs, parmi lesquels Pellen, s'efforcèrent

de lui prendre sa baïonnette.

 

Il parvint encore à se dégager ;

mais la foule se resserra et il fut renversé une troisième fois.

Son gendarme et lui, complètement épuisés, allaient succomber,

lorsque survinrent à leur aide deux commerçants de Brest.

Enfin, le maire de Plouguin et le garde-champêtre arrivèrent sur les lieux.

Le brigadier tenait encore son prisonnier, qu'on n'avait pas pu lui enlever.

 

Dès le début, le gendarme Guerchet s'efforça de secourir son chef,

mais Cabon, Gabriel, le saisit par les aiguillettes

et le jeta sur un tas de pierres ;

à ce moment, un autre agresseur l'attaqua par derrière,

le souleva par les testicules et le fit tomber sur la tête.

 

Le témoin Véra vit Pellen prenant Guerchet à la ceinture et lui portant plusieurs coups.

Malgré les assaillants furieux dont il était accablé, Guerchet se releva, mais il fut terrassé de nouveau et piétiné.

S'étant dégagé un instant et ayant vu le brigadier dégainer,

il l'imita et lança quelques coups de pointe dont l'un dut atteindre

à la cuisse Cabon, Gabriel.

Enfin, après avoir été renversé, encore une fois, il put,

grâce à l'intervention des deux marchands, maîtriser Cabon, Yves,

le remettre aux mains du garde-champêtre et rejoindre son brigadier

pour l'aider à maintenir Cabon, Gabriel.

 

Ce dernier, le soir même, pendant qu'on le conduisait à Ploudalmézeau, n'a cessé d'outrager les gendarmes en les menaçant de prendre

sa revanche, dès qu'il sortirait de prison.

 

Cabon, Yves, s'est rendu coupable de violences envers

le garde-champêtre de Plouguin, qui procédait à son arrestation ; renfermé dans la chambre de sûreté de la commune de Plouguin,

il finit par s'évader après avoir forcé la porte et dégradé une partie du toit.

 

Enfin, pendant l'émeute contre les gendarmes, Pellen s'est livré

à des voies de fait sur la personne de la femme Lamour.

 

Le gendarme Guerchet a pu reprendre son service le 7 septembre

et le brigadier n'a été rétabli que le 17 du même mois.

 

Les trois accusés ont une mauvaise réputation.

Pellen nie tous les faits qui lui sont reprochés ;

il a voulu établir un alibi dont la fausseté a été démontrée.

Cabon, Gabriel, se borne à répondre qu'il ne se rappelle de rien ;

Cabon, Yves, a fait quelques aveux.

 

En 1879, à l'âge de 14 ans, Cabon, Gabriel,

poursuivi pour coups à sa mère, fut condamné à deux ans de détention dans une maison de correction.

 

Les témoins produits par Cabon étant en contradiction avec les témoins cités par l'accusation, l'affaire est renvoyée à la session prochaine.

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Source : La Dépêche de Brest 11 mars 1887

 

Les frères Cabon et Pellen, de Saint-Pabu, comparaissaient, le 21 janvier dernier, devant la cour d'assises du Finistère, sous l'accusation de violences et voies de fait exercées, le jour du pardon de Plouguin, contre la gendarmerie,

dans l'exercice de ses fonctions.

 

Quatorze témoins avaient été entendus par M. le juge d'instruction de Brest.

Dix témoins ayant été cités, à la dernière heure, à la requête des accusés, pour déposer devant la cour d'assises,

il est résulté des dépositions des témoins deux faits qui ont paru contradictoires.

 

La cour se trouvant dans l'impossibilité d'examiner à l'audience la sincérité des témoins à décharge,

a prescrit une nouvelle instruction et renvoyé l'affaire à trois mois.

 

M. Leray, juge au tribunal de première instance de Quimper, l'un des assesseurs désignés par l'arrêt, s'est transporté, le 9 mars courant, sur le lieu de la rébellion pour procéder à l'enquête ordonnée par la cour.

 

Cette affaire reviendra vraisemblablement à la prochaine session des assises.

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Source : Le Finistère Avril 1887

 

Audiences des 22 et 23 avril.

 

Les nommés Cabon, Gabriel, 21 ans ; Cabon, Yves, 48 ans ; Pellen, Pierre, marins-pêcheurs à Saint-Pabu, sont accusés d'outrages par paroles,

de menaces et de voies de fait à l'égard d'agents de la force publique dans l'exercice de leurs fonctions.

 

C'est au pardon de Plouguin, le 29 août 1886,

que se sont passés les faits reprochés aux accusés.

Un gendarme et un brigadier de service ayant voulu mettre fin à une rixe entre les frères Vern, une sorte d'émeute s'ensuivit,

au cours de laquelle les trois accusés outragèrent et frappèrent violemment les représentants de la loi.

 

Cette affaire, déjà inscrite au rôle de la précédente session, revient après un supplément d'informations ordonné par arrêt du 24 janvier dernier.

 

Le verdict du jury est négatif et les trois accusés sont acquittés.

 

Ministère public :

M. Le Bourdellès, substitut ; défenseurs: Me Broquet,

pour les frères Cabon, et Me de Chamaillard, pour Pellen.

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