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Fenêtre sur le passé
1881
Le hanneton
Source : Le Courrier du Finistère juillet 1881
CHRONIQUE AGRICOLE
Le hanneton
Nous sommes à l'époque où l'on doit s'occuper d'une certaine variété d'ennemis de l'agriculture : le hanneton.
C'est ordinairement vers le commencement du mois de mai que cet insecte subitement transformé sort de terre pour prendre son vol à travers champs et s'abattre ensuite sur les arbustes de nos jardins, sur les ormes qui ombragent nos routes et nos promenades publiques.
Le hanneton s'offre à l'étude de l'agriculteur sous deux formes bien distinctes : à l'état de larve, et à l'état d'insecte.
Avant d'avoir subi sa métamorphose qui le transforme en insecte ailé, le hanneton n'est qu'un ver blanc très redouté des jardiniers aussi bien que des agriculteurs.
On sait les ravages que cause le ver blanc sur les racines des plantes
et principalement dans les champs de pommes de terre dont il détruit complètement le tubercule qui sert à la reproduction.
Les céréales n'échappent point non plus à sa voracité.
Il s'attaque également aux prairies naturelles, qu'il dévaste et rend stériles, tout aussi bien qu'aux racines des plantes potagères de toutes sortes
dont il fait ses délices.
Comme tous les animaux nuisibles, le hanneton se reproduit
avec une fécondité effrayante.
La femelle pond jusqu'à 30,000 œufs qui se transforment en autant de larves et qui deviendront elles-mêmes
autant d'insectes par leur métamorphose.
Heureusement que la larve met trois ans à se développer pour arriver à former l'insecte ailé dont elle est issue,
sans cela les hannetons pourraient être chez nous ce que sont les sauterelles en Afrique : un véritable fléau.
Ce n'est pas qu'ils n'occasionnent en certaines années des dégâts importants, mais généralement les dévastations produites par ces bestioles sont localisées à un nombre restreint de départements.
Leur apparition subit aussi quelquefois d'heureuses interruptions.
On prétend, non sans raison, que les hannetons ne sortent de terre en grand nombre qu'une année sur trois.
Ainsi, l'année dernière a vu une véritable invasion de hannetons s'étendre dans la Bauce, la Brie, l'Île de France
et la Picardie.
On peut, s'attendre à voir ces contrées à peu près indemnes de tout dégât sérieux des hannetons
pendant les années 1881 et 1882, sans cependant appliquer cette hypothèse aux vers blancs dont le travail souterrain et continu est si nuisible envers tout ce qui se sème et tout ce qui se plante.
Les gelées blanches tardives constituent le seul élément sérieux de destruction des vers blancs.
Les campagnols, les taupes, les rats des champs, les corbeaux et les moineaux sont aussi des destructeurs naturels des vers blancs, mais les larves ne sortant de terre qu'au moment où ces animaux trouvent facilement leur nourriture, il en résulte que les chasseurs de vers blancs en prennent tout à leur aise, ayant le choix de leur alimentation.
Que faire pour détruire les hannetons?
La question est très-difficile à résoudre d'une façon satisfaisante.
M. le marquis d'Havrincourt, un riche agriculteur du Nord,
conseille le hannetonnage, opération qui consiste à ramasser les hannetons
et à les jeter dans des récipients hermétiquement fermés.
On sait que chaque soir au coucher du soleil, le hanneton cherche une retraite
pour la nuit dans le feuillage des arbres.
C'est ainsi qu'une heure après que le soleil est couché, on peut « récolter»
le hanneton en hochant, en secouant vigoureusement les arbres.
Les hannetons tombent lourdement et peuvent être rapidement ramassés.
S'il faisait clair de lune, l'opération serait plus difficile parce que, aussitôt sa chute,
le hanneton reprendrait immédiatement son vol.
Alphonse de Cardevac
Marquis d'Havrincourt
Cette opération peut également avoir lieu au point du jour, les hannetons ne se levant qu'aux rayons du soleil
et quelquefois longtemps après, engourdis qu'ils sont par la fraîcheur de la nuit.
Pour ramasser les hannetons on pourra se servir de paniers n'ayant pour toute ouverture qu'un entonnoir
ou quelque chose de semblable.
Ces insectes devront être noyés el pourront être ensuite livrés à l'industrie qui a trouvé le moyen d'extraire
de la bouillie de hannetons une huile excellente pour le graissage des roues de voitures.