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Fenêtres sur le passé
1880
Un sabotier assassiné à Landerneau
au lieu-dit "La Bascule"
Sources : Le Finistère février 1880 et juillet 1880
1880 – Un sabotier assassiné à Landerneau au lieu-dit la Bascule
Landerneau
Samedi matin, des habitants de Saint-Thonan rencontraient sur la route de Landerneau à Guipavas,
à 500 mètres environ du lieu-dit « La Bascule », une voiture en travers du chemin.
En vain, ils demandèrent qu'on leur fit place ; rien ne bougea.
En approchant de plus près, ils aperçurent, avec effroi dans la voiture,
un cadavre tout sanglant et défiguré par d'atroces blessures.
Ils se hâtèrent d'aller déclarer leur lugubre découverte à la mairie de Landerneau.
Les constatations légales eurent lieu aussitôt.
L'identité du cadavre fut établie.
La victime était un marchand de sabots de la Feuillée, nommé Paul (Jean) ;
il avait le crâne fracassé, un œil hors de l'orbite, la mâchoire supérieure broyée ; d'après l'avis du Dr Chalmet, chargé de l'autopsie,
le crime avait dû être commis vers les onze heures du soir,
par un seul individu, qui aurait frappé avec acharnement,
à l'aide d'un instrument contondant, selon toute probabilité
à l'aide de la lourde barre de bois qui sert à enrayer les roues.
On se mit en quête de l'assassin.
Les plus graves préventions pesaient sur un autre sabotier de la même commune et propre neveu de la victime, le nommé Le Touz (Guillaume) âgé de 22 ans.
Il accompagnait la veille son oncle.
Il fut mis en état d'arrestation.
Interrogé, il répondit que, la nuit précédente, en effet, étant en compagnie de son oncle,
ils avaient été attaqués par plusieurs individus à l'embranchement de la route de Saint-Divy et de La Forêt,
et qu'après avoir essayé de se défendre, voyant d'ailleurs son oncle perdu, il avait pris la fuite.
Ce récit à sensation ne convainquit nullement, comme bien on pense, la justice.
Une perquisition fui faite chez Le Touz, et des charges nouvelles et accablantes sont,
venues confirmer les premières présomptions contre lui.
Malgré le soin qu'il avait pris de couper la manche droite de sa chemise, sans doute pleine de sang,
et en dépit d'un lavage récent, on a reconnu des traces de sang sur les vêtements qu'il portait cette nuit-là ;
on a trouvé aussi en sa possession une somme d'argent supérieure à celle qu'il pouvait avoir,
et, entr'autres pièces, vingt pièces de cinq francs en argent toutes tachées de sang.
Il n'a pu en expliquer la provenance.
Sa culpabilité semble absolument établie.
Dans la confrontation avec le cadavre, ce jeune criminel n'a montré aucune émotion.
Assises du Finistère
3e session de 1880
12e Affaire - ASSASSINAT ET VOL.
L'accusé est le nommé Le Touz, Guillaume-Marie, âgé de 23 ans, marchand de sabots, demeurant à la Feuillée.
Le 15 février 1880, au point du jour, des ouvriers se rendant à leur travail,
découvrirent dans une voiture qui stationnait à un kilomètre de Landerneau, sur la route de Brest,
le cadavre du sieur Jean Paul, sabotier à la Feuillée.
Il portait à la tête seize plaies faites avec un instrument contondant.
On trouva dans la charrette un fragment d'os, une dent canine et on y constata de nombreuses flaques de sang.
Le vol avait été le mobile du crime.
En effet, Jean Paul avait vendu, à Brest, pour 165 fr. de sabots et on ne retrouvait plus que 23 fr. 50
dans ses poches et dans la voiture.
On apprit que la veille, vers 8 heures du soir, Le Touz était arrivé à Landerneau.
Il venait de vendre à Brest un chargement de sabots, dont il avait retiré 156 francs.
Il avait raconté qu'à l'auberge du Cerf, située à neuf kilomètres
de Landerneau il avait rencontré Jean Paul et qu'il était reparti
en même temps que ce dernier ; puis, qu'attaqué et frappé sur la route,
il s'était enfui.
Mais on remarqua que ses vêtements, ses ongles,
les pièces de monnaie qu'il avait sur lui, étaient tachées de sang.
Ses explications sont dépourvues de vraisemblance.
Il n'est pas plus heureux quand il s'agit de rendre compte de l'argent
qu'il a en sa possession.
L'accusé se sentant perdu,
a essayé de faire retomber son crime sur des innocents.
Il a accusé d'abord l'un de ses co-détenus ;
ensuite le sieur Léal, l'aubergiste du Cerf ;
puis son voisin Prédom et son domestique.
L'innocence de ces quatre personnes a été nettement établie.
Le Touz est tombé dans des contradictions de toute sorte.
Pour répondre aux objections soulevées par l'un de ses récits,
il n'a pas hésité à déplacer de 1050 mètres le lieu de l'attaque.
Toutes ses affirmations ont été successivement démenties, soit par les témoignages,
soit par les constatations matérielles de l'information.
Trente-six témoins ont été entendus à la requête du ministère public.
Le verdict du jury est négatif sur la question de vol.
Reconnu coupable de meurtre avec admission de circonstances atténuantes, Le Touz, Guillaume-Marie,
a été condamné à la peine de vingt années de travaux forcés et vingt années de surveillance.
Défenseur, Maître de Chamaillard.
Cette affaire est, de toute la session, celle qui a occupé le plus longtemps la Cour.
Commencée le 10 juillet à 10 heures du matin, elle ne s'est terminée que le 13, à 8 heures du soir.
Bagne de Nouvelle Calédonie
Proposé pour une remise de peine
de 18 mois en 1890
Remise de peine de 3 ans en 1893
Décédé le 30 janvier 1914
en Nouvelle Calédonie
à l'âge de 57 ans