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Fenêtres sur le passé

1870 Décembre

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Chronique de guerre dans le Finistère

Source : L'Électeur su Finistère décembre 1870

 

Jeudi 15 décembre

 

NOUVELLES DE PARIS

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Nous donnons à nos lecteurs des nouvelles de notre ami et du leur, M. Louis Hémon,

dans la correspondance suivante, que nous empruntons à la " Vigie, de Quimper ":

 

Villejuif, 20 novembre 1870.

 

La patience est la vertu à l'ordre du jour.

Mais que la patience est difficile à pratiquer surtout dans l'état d'ignorance où nous vivons

de ce qui se passe au-delà de l'enceinte de Paris !

 

Cette enceinte que nous trouvions trop grande autrefois parait bien étroite, depuis qu'elle est transformée en prison.

 

L'autre jour, j'ai eu, comme beaucoup d'entre nous, une fausse joie.

 

Ou annonçait l'arrivée de onze cents dépêches venues de province par une voie poétique,

mais irrégulière qu’à mise en honneur le siège de Paris, sur l'aile de pigeons messagers.

 

Hélas ! bien peu ont été favorisés : Bolloré, Pennenros de Douarnenez, Balestrié , M. de la Sablière : aucun autre.

 

Ces dépêches privilégiées, en excitant notre envie ont eu du moins le mérite de nous apprendre

que rien d'anormal ne s'est passé à Quimper, et que, par conséquent, par présomption naturelle,

la famille a dû rester telle que nous l'avons laissée au départ, telle que nous comptons bien la trouver au retour.

 

Le retour !

 

Quand viendra ce jour heureux auquel nous osons à peine songer, tant nous le voyons enviable et beau ?

 

Bien des choses nous l'ont fait espérer prochain, pour nous amener, après l’espérance, de cruelles déceptions.

 

Aujourd'hui en pesant de sang-froid tout ce qui doit nous en séparer,

nous croyons qu'il n'est pas possible de longtemps.

 

L'issue de la guerre, si elle doit être amenée par la diplomatie, est perdue dans les brouillards des négociations,

dont la lenteur d'après l'expérience que nous en avons faite, mérite de passer en axiome.

 

Si elle doit sortir de la force, ce ne sera qu'au bout de combinaisons stratégiques concertées entre des forces

qui se savent éloignées les unes des autres, et qui se connaissent à peine elles-mêmes.

 

Dans tout ce fracas où notre humble unité est noyée, nous ne pouvons nous raccrocher qu'à des conjectures.

 

Dieu veuille que de nos espérances sortent de bonnes et heureuses réalités !

Louis Hémon

Louis Hémon

Député du Finistère. 1876 - 1885 ; 1889 - 1912

 

Sénateur 1912 - 1914

 

Fils d'un professeur au collège de Quimper.

Bien que dispensé des obligations militaires, il participe en à la défense de Paris,

pendant la guerre de 1870, dans un bataillon de mobiles bretons.

Il se porte candidat aux élections législatives du 8 février 1870,

sur la liste républicaine du Finistère, mais échoue.

Il ne devient député (de la première circonscription de Quimper)

qu'aux élections du 20 février 1876.

Durant ses mandats, il siège à gauche.

Il soutient la politique coloniale et scolaire du gouvernement républicain.

Il s'oppose à l'élection de l'abbé Gayraud, député de Brest, en 1897,

protestant contre l'ingérence du clergé dans les élections.

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Une centaine de militaires blessés ou malades est arrivée hier à Brest.

 

D'autres sont encore attendus en grand nombre, et l'ancien hôpital Saint-Louis, occupé aujourd'hui par les pupilles, est disposé en partie pour les recevoir.

 

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On assure qu'une lettre de l'amiral Hugueteau de Challié, apportée de Paris à Tours, par le dernier ballon,

annonce que M. le capitaine de frégate Desprez (*) a été tué dans la forêt de Bondy,

lors de la sortie de l'amiral de La Roncière sur Épinay, et que notre concitoyen M. le capitaine de frégate Massiou (*), blessé à l'affaire du 24 novembre, a eu une jambe emportée par un boulet.

(*) DESPREZ Marie, Martin, Eugène

Naissance : 30/03/1828 à Sainte-Suzanne (La Réunion)

Commandant du bataillon de marins n° 10

Au début du mois d'août 1870, en raison de la tournure prise par les opérations militaires et des premiers revers de l'armée française,

le gouvernement décida de faire appel à la Marine et de lui confier la responsabilité de plusieurs forts autour de Paris,

pièces maîtresses de la défense de la capitale.

Ces forts furent armés par des bataillons de marins pris dans les équipages devenus disponibles

après l'abandon du projet de débarquement en mer Baltique.

Le 30 novembre 1870, lors de la première sortie générale de l'Armée de Paris au-delà de la Marne, entre Bry-sur-Marne et Champigny,

deux opérations de diversion furent entreprises :

l'une en avant de Créteil, l'autre confiée à la 6e division de l'amiral Pothuau, sur la rive gauche de la Seine vers Choisy-le-Roi et Thiais.

Chargé d'une mission de reconnaissance aux abords de Choisy-le-Roi, le capitaine de frégate Desprez fut tué à la tête de son bataillon.

(*) Charles Daniel Vincent de Paul MASSIOU

Né le 6 novembre 1826 à POITIERS (Vienne) –

Décédé le 28 février 1880 à LA ROCHELLE (Charente Maritime)

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Samedi 17 décembre

 

L'Amla, goélette prussienne, conduite par

M. Mallard de la Varende (*), enseigne de vaisseau de la frégate

la Circé, a mouillé sur rade le 16, à minuit 1/2.

 

Ce navire a été capturé par la Circé, le 21 septembre dernier,

aux environs de Montevideo, allant de Buenos Ayres à Hambourg, avec un chargement de diverses marchandises.

 

L'Amla jauge 22 tonneaux, 6 hommes d'équipage, 3 passagers

et 8 marins de l'État de la frégate la Circé.

 

Ce navire est entré ce matin dans le port de guerre.

 

(*) Marie Charles Gaston MALLARD de la VARENDE

Né le 10 mai 1849 à PARIS Vème (Seine) –

Décédé le 27 juillet 1887 à CHAMBLAC (Eure).

Pomone sistership de la Circé

 

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Mardi 20 décembre

 

Lettre de l'honorable M. de Kératry.

 

Nantes, 17 décembre 1870.

 

À Monsieur le rédacteur en chef du "Phare de la Loire".

 

Monsieur, J'ai eu jusqu'ici peu de loisirs à consacrer à la lecture des journaux ; mais j'apprends aujourd’hui

qu’un journal bien intentionné a prétendu que j'avais fait, comme général en chef, à la ville de Quimper,

un don obscur de 25.000 fr., qui déguisait une largesse électorale.

 

Je me borne à cette simple réponse.

 

Le ministre de la guerre a télégraphié au préfet de Saint-Brieuc, qui lui demandait des fonds pour l'équipement

des mobilisés des Côtes-du-Nord la dépêche suivante à la date de fin octobre :

Général de Kératry est ordonnateur de toutes gardes nationales mobilisées : c'est donc à lui à délivrer mandats.

 

Conformément à cet ordre, j'ai donné sur le crédit ouvert aux villes

de Nantes, Saint-Nazaire, Vannes, Lorient, Rennes, Redon, Brest, Quimper.

 

Toutes ces villes ont reçu 25.000 fr., Nantes et Brest en ont reçu 50.000 en raison des armes perfectionnées

qu'elles ont fournies.

 

J'avais ordonnancé des fonds pour les Côtes-du-Nord ; mais le préfet du département ayant envoyé

2,500 hommes dépourvus de tout, et les dépenses incombant au camp de Conlie étant beaucoup plus fortes

que celles des autres départements, par suite de cette façon de procéder, j'ai supprimé cet ordonnancement.

 

Voilà l'explication de mes manœuvres électorales, et j'ajoute que depuis ma prise de commandement,

je n'ai ni paru dans "le Finistère", ni écrit un seul mot, soit à mes compatriotes, soit aux journaux bretons,

laissant à l’opinion publique le soin de s'éclairer elle-même.

 

Agréez, etc.

 

Comte de Kératry.

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Jeudi 29 décembre

 

Dépêche télégraphique

 

Quimper, 28 décembre, 3 h. 56s.

 

Préfet aux Sous-Préfets, Finistère.

 

Je viens de recevoir de Monsieur le général Marivault la dépêche suivante :

 

Toute la brigade du Morbihan est en marche vers Laval, en échelons, pour être cantonnée dans la Mayenne.

 

Finistère et Loire Inférieure sont cantonnées dans l'Ille-et-Vilaine.

 

Légion de Vitré à Redon.

 

Chefs aviseront leurs préfets respectifs des localités et j'aurai soin que les lettres ne s'égarent pas.

 

Ces mouvements permettant de choisir emplacement fait qu'on souffre moins au camp.

 

Pour copie conforme :

 

Le Sous-Préfet de Brest,

 

H. CAURANT

 

 

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Brest, le 28 décembre 1870.

 

Monsieur le Rédacteur en chef de l’Électeur,

 

Voudriez-vous être assez bienveillant pour donner une place dans vos colonnes à l’appel

que nous faisons encore une fois à la charité de nos concitoyens.

Pour le Comité de Brest :

Le Président, Ed. BROUSMICHE,

Médecin principal en retraite.

Société internationale de secours aux blessés des armées de terre et de mer.

 

COMITÉ DE BREST.

 

Le Comité de secours de la ville et de l'arrondissement de Brest se trouve dans la nécessité de faire

un nouvel appel à la population qui a montré déjà tant d'empressement à lui venir en aide.

 

Jusqu'à ce jour, nous n'avons pu secourir que de loin les victimes de la guerre ;

mais le théâtre des opérations s'est rapproché de nous ;

les hôpitaux et les ambulances des départements voisins de la Bretagne sont encombrés de malades et de blessés

qui commencent à refluer jusqu'à Brest.

 

L'hôpital maritime et ses succursales en ont déjà reçu 2,000 et de nouveaux convois nous sont annoncés.

 

Le chiffre des lits de la marine est de 1,700 lits et les dispositions sont prises pour le porter

avant la fin du mois à 2,000.

 

Le service de santé du Port de Brest a mis à la disposition du Département de la guerre toutes les ressources

de son personnel ;

cinquante-neuf médecins et pharmaciens de la marine ont été dirigés sur les armées actives,

vingt-quatre étudiants ont suivi volontairement la même destination.

 

II en a été de même pour le matériel ;

nos Magasins ont fourni l’approvisionnement des ambulances de l'armée de Bretagne et de celle de l'Ouest.

 

La marine, en un mot, a disposé de toutes ses ressources, mais il est à craindre qu'elles ne suffisent pas aux exigences de la situation, et c'est pour y faire face, en créer de nouvelles que M. le maire de Brest d'accord

avec notre Comité, dont il a bien voulu accepter la présidence d'honneur,

ouvre une première Ambulance dans l’Établissement de Saint-Georges.

 

L'autorité municipale et militaire, nous donne leur bienveillant concours et aujourd'hui M. le maire

fait un nouvel appel à la charité.

 

Le personnel ne nous fera pas défaut ; MM. les médecins et pharmaciens de la ville,

avec le dévouement et l'abnégation qu'ils ont toujours montrés en toute circonstance, nous aideront tous.

 

Il nous sera facile de recruter des auxiliaires pour les aider dans l'accomplissement de leur lâche

et exécuter leur prescription.

 

Mais les envois que nous avons faits en août et septembre à Paris, ceux adressés au camp de Conlie

depuis le jour de sa création ont amoindri nos ressources.

 

Nous avons pu cependant jusqu'à ce jour donner du tabac, du papier, des enveloppes, quelque douceur

à tous les arrivants aux hôpitaux et même fournir à ceux qui rejoignent nos armées tous les objets d'habillement

qui leur manquaient partout par la saison rigoureuse qui règne en ce moment.

 

Ce que nous demandons aujourd'hui, c'est que les habitants, qui voudraient recevoir chez eux des convalescents

le jour où nous serions obligés d'évacuer ces hommes de l'ambulance pour faire place à de plus malades,

veuillent bien s'inscrire, soit à la mairie, soit chez l'un de nous,

soit chez l'économe de la Société, M. Lucas-Labastire, rue la Rampe, 53.

 

Nous demandons enfin du linge, des chaussettes en laine, des chemises, des objets de literie,

nous demandons des verres, des couteaux, du bois, du charbon, etc. ,

en un mot, tout ce qui pourra nous aider pour monter notre ambulance et la rendre la plus confortable possible,

pour nos braves soldats, nos mobiles, nos mobilisés et pour nos marins.

 

Tous les dons en argent seront reçus et inscrits, rue de la Rampe, 53, ainsi que les dons en nature,

qui pourtant à partir de lundi pourront être remis au Portier de St-Georges.

 

Les Membres du Comité,

 

Signés :

A. Lemonnier, président d'honneur ; Ed. Brousmiche, président; Penquer, F. Daniel, J. Aubry, docteurs-médecins ;

C. Thomas, commissaire-adjoint.

 

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Ce matin, sous une neige épaisse, a eu lieu une revue de la garde nationale sédentaire de Brest,

dans laquelle il a été procédé à la remise du drapeau de la légion et à la reconnaissance de M. Gargam,

lieutenant-colonel, chef de lé­gion, des quatre chefs de bataillon, MM. Barillé, Léger, Blarez, Robin du Parc

et des autres officiers non encore reconnus.

 

Grâce à la bienveillance de M. le Préfet maritime, l’excellente musique des équipages de la flotte prêtait son concours à cette cérémonie qui s'est terminée par le défilé des quatre bataillons, sur le Cours d'Ajot,

devant M. le Maire de Brest et aux cris de : Vive la France ! Vive la République !

 

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L'administration fait un nouvel appel aux ouvriers cordonniers de Brest et de l'arrondissement

pour la confection de souliers pour les mobilisés du Finistère.

 

Elle les informe que les souliers-types déposés dans les bureaux de la Sous-Préfecture de Brest,

où ils sont tenus à la disposition des ouvriers qui voudraient en confectionner.

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© 2018 Patrick Milan. Créé avec Wix.com
 

Dernière mise à jour - Mars 2022
 

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