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Fenêtres sur le passé
1892
La lèpre en Bretagne
Lettre du Docteur Prouff de Morlaix

Source : La Dépêche de Brest 28 août 1892
Nous recevons la lettre suivante :
Morlaix, le 26 août 1892.
« Monsieur le rédacteur,
« La Dépêche du 26 août reproduit, d'après les Débats, le résumé d'une communication très intéressante faite à l'Académie de médecine « sur les lépreux en Bretagne », par le docteur Zambaco-Pacha, de Constantinople.
L'honneur de répondre à M. Zambaco revenait de droit à M. le docteur Morvan, de Lannilis.
Mais en attendant, et espérons que nous n'attendrons pas longtemps, que notre illustre compatriote puisse reprendre la parole, il est bon peut-être de calmer dès maintenant l'émotion que le discours de M. Zambaco va soulever dans le pays.
« Donc, pour notre distingué confrère de Constantinople, les lépreux foisonneraient encore aujourd'hui en Bretagne.
Ils seraient nombreux parmi cette tourbe de vagabonds estropiés, atrophiés, mal formés de toutes façons, qui promènent de pardon en pardon leurs ulcères soigneusement avivés à la veille de chaque exhibition.
Et cependant un de nos confrères, et des plus compétents, qui a piloté M. Zambaco dans l'un de nos pardons les plus renommés, n'y a pas vu un seul cas de lèpre indiscutable, un de ces cas typiques qui entraînent la conviction.
« Quant aux cas de maladie de Morvan, M. Zambaco arrivait avec une opinion toute faite, et il l'a conservée.
Pour lui, la maladie de Morvan n'est que de la lèpre atténuée, fruste, mais de la lèpre en somme.
Remarquons qu'après la dernière communication comme avant, ce n'est là qu'une hypothèse plausible pour les uns, erronée pour les autres, pour personne scientifiquement démontrée.
« M. Zambaco n'a vu en Bretagne que deux cas indiscutables de lèpre autochtone, née sur place, chez des personnes n'ayant jamais quitté la Bretagne.
Ces cas, nous les connaissions, nous les avions vus et revus avec notre ami le docteur Baret, et nous les montrions à M. Zambaco, à côté de cas de maladie de Morvan, précisément pour établir la différence des uns aux autres.
« Et c'est ici que l'hypothèse de notre savant confrère va faiblir.
Ces deux cas de lèpre authentique, classique, sont tous deux de la même maison :
C'est le neveu et l'oncle.
Tous deux ont toujours habité ensemble.
Le neveu est malade depuis sept ans, l'oncle depuis quatre ans.
« Est-ce que ce n'est pas là un fait évident de contagion ?
« Retrouverons-nous également la contagion dans la maladie de Morvan ? - Jamais !
Sur 30 à 35 observés jusqu'alors en Bretagne, il n'en est pas deux appartenant à la même famille, ou ayant habité la même maison.
« En résumé, on ne connaît actuellement dans le Finistère que deux cas de lèpre indigène.
« Ces deux cas proviennent l'un de l'autre par contagion.
« La maladie de Morvan est vraisemblablement distincte de la lèpre ; en tout cas, elle n'est pas contagieuse.
« Docteur PROUFF. »
